mardi 28 décembre 2010

Mes photos

Bon les enfants, la thématique de ce soir est la suivante. Je vous montre quatre photos et je brode quelque chose autour. Ça vous va?

De toute manière, même si ça ne vous va pas, vous n’avez pas le choix.


Pour débuter, j’ai opté pour une photo de M... question de vous prouver que j’ai une vraie vie sociale ailleurs que sur mon ordi. Bien sûr, la photo est floue, mais c’est pour préserver l’identité de M...

Mais quand même, elle est juste assez claire pour qu’on sache que c’est une belle femme. Parce que bon, je ne suis pas plus maso qu’un autre et que j’aime bien la compagnie des jolies femmes. Et puis en plus, quand elles sont brillantes et généreuses, c’est difficile de ne pas aimer. Et ne pas aimer M... c’est justement très difficile. C’est de sa faute aussi. Elle n’a pas son pareil pour faire brûler ses casseroles ou pour oublier ses clés dans les serrures. C’est craquant comme tout.

Malgré le flou intempestif, on peut tout de même voir qu’elle a de jolis yeux. Quand elle me les plante à bout portant, c’est mortel.

En plus de faire cramer ses casseroles et de chercher ses clés de voiture qu’elle tient pourtant dans la main, M... souffre parfois d’anachronisme rock’n roll.

Ça veut dire quoi ça?

Ça veut dire qu’elle se plante souvent quand il est question de musique rock, qu’elle ne connaît pas - ou peu - ou mal - les icônes rock de notre génération.

Ça vient du fait qu’elle était intello très jeune et que cette maladie l’a rendue un peu décalée. À 14 ans, elle connaissait davantage la vie de Spinoza que celle de David Bowie. Pas plus tard que l’autre soir encore, elle croyait que Pink Floyd, Led Zeppelin et Genesis étaient des groupes américains.

Américains!

Faut le faire! Led Zeppelin par exemple, elle connaissait un peu, mais pas trop. Elle avait déjà entendu parler de Robert Plant mais ne savait pas que c’était le chanteur du groupe. Je crois aussi qu’elle n’avait jamais entendu parler de Jimmy Page, ce qui revient à dire pour une fille de mon âge que le soleil tourne autour de la terre et non l’inverse. Mais c’est aussi un peu pour ça que je l’aime. (Même si je ne dois pas trop dire ce mot) C’est drôle une fille qui se fait inviter pour écrire des articles dans les revues les plus sérieuses d’Europe, mais qui ne connait même pas Jimmy Page.

L’autre jour par exemple, je l’ai invitée à assister au concert de Jason Bonham, le fils de John et ancien batteur de Led Zeppelin. Fiston fait le tour du monde en rendant hommage au groupe de son papa et, ma foi, c’était tout à fait génial. Sans doute ce qui peut se rapprocher le plus d’une expérience Led Zeppelinienne sans Led Zeppelin.

Le lendemain matin, et pendant qu’elle prenait sa douche, je me suis mis à fureter sur YouTube pour scruter des bouts de concert des vrais Led Zep. J’ai trouvé ça: (bon, pour comprendre le reste du texte, il faut visionner le clip jusqu’au bout. Désolé.)http://www.youtube.com/watch?v=AIHabvURnpk&feature=related


- Tu regardes quoi? M’a-t-elle demandé en sortant de la salle de bain après s’être lavé les cheveux avec son shampooing fucked up à la graisse d’ornithorynque des Carpates.

- Un solo de guitare de Jimmy Page.

- Ah! tiens donc! Tu m’as devancée. Je comptais faire des recherches ce matin.


Vous entendez ça? Des recherches! Sur Led Zeppelin! Quand je vous disais qu’elle était craquante! Tout le côté intello universitaire de M... se résumait dans cette phrase. Faire des recherches! Sur Led Zeppelin!

C’est comme faire des recherches sur l’eau, l’air, le feu, la terre. Elle est drôle.

Je l’adore.

Je lui ai montré le clip. Avant, je lui ai expliqué que bien que le guitariste de la veille était très bon, il lui manquait la fluidité de Page, qu’on peut imiter la voix d’un chanteur, mais qu’on ne pourra jamais imiter le «picking» d’un dieu de la guitare et que de tous ces dieux, Jimmy Page est sans doute le meilleur. (Désolé pour les puristes, mais selon moi, Page est meilleur que Hendrix.) Elle comprenait parce qu’elle joue du piano et qu’elle possède l’oreille musicale. Mais je tenais tout de même à lui spécifier parce que

bon, elle croyait aussi que les Beatles, les Stones, Pink Floyd, Led Zeppelin, Genesis, Bowie étaient américains.


- Mais... pourquoi?

- Pourquoi quoi?

- Qu’est-ce qui pouvait expliquer la prédominance de la musique anglaise à cette époque et de son influence subséquente?


Ça aussi c’est tout à fait M... Tenter de trouver une explication rationnelle à tout, même aux choses les plus évidentes comme le rock britannique. Elle est toujours comme ça, même quand elle regarde une patate. «Je me demande où en serait l’humanité sans la découverte de la patate.»


- L’Angleterre est à la musique rock ce que l

a patate fut à l’alimentation planétaire. C’est-à-dire l’ultime condiment qui a pratiquement enrayé la famine à lui tout seul.

- Je ne te suis pas.

- Moi non plus, mais ça me semblait une belle image.

- Il doit y avoir une explication.

- En fait, ça part de Liverpool qui est un port commercial. Dans les années ’50, les marins ramenaient des disques de musique américaine. Ce qui faisait de Liverpool un centre culturel underground pour la jeunesse de la ville. En incorporant le rock avec la musique de la région, ça a donné ce qu’on a appelé le Mersay Sound. Les Beatles viennent de là. Après leur explosion en Amérique, les compagnies de disque se sont mises à embaucher tous les groupes d’Angleterre qui avaient les cheveux longs


J’étais très fier de lui donner la réponse vu que généralement, des deux, c’est elle la sociologue de service. Elle a ensuite regardé le clip de Led Zep, silencieuse en prenant son thé fucked up du matin. Une sorte de thé de je ne sais quelle partie du monde où les producteurs sont sans doute exploités jusqu’au trognon même si c’est écrit «équitable» sur le sachet recyclable (Faut pas nous prendre pour des cons) et qu’elle paie la peau des fesses. Sa conclusion fut que : «Vraiment, à l’adolescence, je n’étais pas prête pour comprendre ça. C’est carrément de la musique contemporaine. Ça me fait chier d’avoir raté ça!»

Elle est drôle non?


La seconde photo, c’est mon chalet. Si je la glisse ici, c’est pour vous informer qu’il est à vendre. Des fois que...

Si jamais ça vous intéresse, laissez-moi un message. Je peux aussi le louer. C'est un 4 saisons.

Pour la troisième photo, je voulais vous montrer un papillon étrange que j’ai retrouvé au matin au chalet. Observez bien la bordure avant des ailes. C’est tout simplement fascinant. Elle imite à la perfection une petite branche d’arbre avec des bourgeons. Un camouflage naturel!

Comme c’est un papillon de nuit, il est facile de deviner qu’il passe le jour dans les arbres. Or son aspect le rend tout à fait indétectable pour les prédateurs. Le vert de ses ailes se fondant dans le vert du feuillage et puis voilà quoi!

V’nez pas dire ensuite que ce blog ne contient que des inepties.


Je termine comme j’ai débuté, avec une photo de M... (Finalement, je réalise que je commence à m’ennuyer d’elle...) C’est un peu mon hommage à Andy Warhol version M...

Je respecte les consignes du propriétaire de ce blog, à savoir juste assez flou p

our préserver l’anonymat, mais pas assez pour ne pas voir qu’elle est foutrement belle. Cette photo fut prise au chalet (chalet qui est justement à vendre... vous l’avais-je déjà dit? Si? Ah bon, désolé.) quelque part cet été.

Ou était-ce au printemps?

Remarquez la pause décontractée qui fait «joie de vivre et jeune dans le vent». On croirait voir Françoise Hardy mais en mieux.

À noter ce singulier mouvement de la tête qui semble défier le photographe en lui disant quelque chose du genre «T’as pas remarqué qu’t’es chanceux de m’avoir ici, dans ton chalet, espèce de looser?» Ou quelque chose comme ça mais je n’en suis pas sûr et je scrute encore le non verbal pour être bien certain de mon analyse.

À la dernière minute

...(Les trois premiers paragraphes sont censurés)...


***


Mine de rien et mine de crayon, je laisse mes doigts se promener comme ils veulent sur le clavier en terminant ma coupe de vin. Faithful Hound 2005 de la maison Mulderbosh. Afrique du Sud. Amalgame de Cabernet Sauvignon, Merlot, Petit Verdot, Malbec et Cabernet Franc. Rond en bouche. Un bel équilibre. Ils savent comment faire le vin ces anciens esclavagistes. Un vrai petit péché mignon. Tu ne peux pas avoir mal à la tête avec un produit comme ça. Au contraire, ça t’aide à rester jeune. À 21$ la bouteille, c’est donné. C’est pour ça que je raconte n’importe quoi ce soir.

Si je ne me retenais pas, je parlerais encore d’Ingrid Betancourt mais ça serait un peu exagéré.

À la place, je vais mettre des photos.

Bonne nuit bande de voyeurs!






lundi 27 décembre 2010

Boris

J’ai revu Boris ce soir, une vieille connaissance qui remonte à un autre siècle. C’était à l’occasion d’une rencontre entre amis qu’on se fait une fois par année, généralement à ce temps-ci de l’année.

Boris est célibataire depuis toujours. Il faut dire que Boris est un peu particulier. Il vit en réclusion volontaire dans son logement et n’en sort que pour aller faire son épicerie. Et encore. Il lui arrive parfois de faire livrer sa bouffe.

Avant, Boris buvait. Du matin au soir et du soir au matin.

Un jour, il a fait un AVC et en est resté un peu abimé. Depuis, il ne boit plus, mais il marche désormais avec une canne. Mais j’ai parfois l’impression que c’est pour se donner un style.

Parce que du style, Boris il en a.

Par exemple, j’ai appris ce soir qu’il avait un pot de chambre à la maison qu’il utilisait comme crachoir.

Si, si. Comme crachoir. Il l’installe à ses pieds dans le salon quand il s’écrase dans son sofa pour regarder la télé. Et il passe ensuite toute la soirée à cracher dedans. Il dit que c’est parce qu’il est en processus d’arrêter la cigarette et que son corps se nettoie. Forcément, les poumons aussi et du coup, ce besoin de cracher ses juteux glaviots. C’est du moins comme ça qu’il l’explique. Mais je suis certain que c’est un prétexte, qu’il a en réalité toujours eu envie d’avoir un crachoir. Déjà que c’est le seul mec que je connaisse qui se mouche encore dans un mouchoir de poche. Un truc en tissu qu’il pli et repli avant de le remettre dans la poche de son pantalon après s’être mouché dedans.

C’est pour lui donner du style et c’est aussi un peu à cause de son style justement s’il est toujours célibataire.

Boris fait aussi de la BD depuis toujours. Il dessine des tas de personnages pendant des mois et quand vient le temps de les mettre au propre et d’en faire un véritable album, il les balance dans son porte-folio et recommence avec de nouveaux personnages et de nouvelles aventures jusqu’à ce que ceux-ci se retrouvent à leur tour dans le porte-folio. C’est comme ça depuis que je le connais, c’est à dire depuis 1986 environ. Il n’a jamais rien vendu, ou alors une planche mythique à l’ancienne revue Croc mais qui ne fut jamais publiée. Il en parle encore comme le grand moment de sa carrière.

Boris ne sait pas comment s’y prendre avec les filles. Par exemple, je l’ai déjà vu dans un bar de rockers à Sherbrooke draguer la serveuse en lui parlant de Attila le Hun. Une autre fois, je l’ai déjà vu se présenter à une amie en lui faisant un salut hitlérien pour blaguer dans le but de créer ainsi une manière de complicité qui, du reste, ne s’est jamais concrétisée. À mon ancienne blonde, il lui avait fait le baise-main la première fois qu’il l’avait rencontrée. Tout en lui mouillant le revers de la main avec ses lèvres, il lui avait dit «Très chèvre, je suis honoré de vous rencontrer». Notez le jeu de mots : «Très chèvre» au lieu de «Très chère». Mon ex m’avait ensuite avisé de ne plus jamais le faire entrer dans notre maison.

Boris laisse pousser l’ongle de son pouce droit et on ne sait pas pourquoi. Quand on le lui demande, il aime à dire que c’est par cocasserie.

L’aspect vestimentaire de Boris est aussi quelque chose qui a sûrement un rapport certain avec son célibat. Je pense notamment à ces sweat-shirts de dauphins et de ses pantalons remontés jusqu’aux aisselles. L’hiver, il porte un chapeau colonial et des bottes de caoutchouc qu’on enfile avec les chaussures, des trucs que plus personne ne porte depuis 1965, sauf lui. Il a aussi de gros gants en cuirette brune comme portaient nos grands-pères. Pour plaire à une fille, ce n’est pas vraiment l’image idéale.

Boris a aussi une manie qui dérange un peu. Dès qu’il arrive chez vous, il se dirige directement aux chiottes où il y restera pendant une bonne demi-heure. Il est comme ça Boris. Il aime faire son territoire.

Boris parle fort de toutes choses, même de celles qu’il ne connaît pas. C’est sa spécialité et c’est aussi un peu pour ça qu’il est toujours célibataire. Quand il parle, il aime pointer son index en l’air et de se faire craquer le cou en effectuant une manière de torsion cervicale que lui seul peut effectuer.

Il fut un temps où Boris avait une montre de poche qu’il aimait consulter à tout moment. Ça lui donnait du style avec son sweat-shirt de dauphins.

Quand il buvait, Boris adorait nous montrer ses talents pour la danse irlandaise. Il finissait toujours par se rétamer sur le plancher en renversant la table du salon au passage tout en prolongeant du même coup son célibat de quelques années.

Boris aura 50 ans dans deux ans. Je le connais depuis au moins 25 ans et je ne l’ai jamais vu avec une fille et je ne l’ai jamais entendu me parler d’une quelconque conquête. Toutes ses tentatives furent des échecs.

Ce soir, à cette réunion de vieux copains, il avait apporté avec lui des dessins de ses derniers personnages pour son énième BD qu’il ne publiera jamais.

Et le pire dans tout ça, c’est qu’il dessine comme un Dieu.

vendredi 24 décembre 2010

Asti Spumente

Censuré

jeudi 23 décembre 2010

Madame Dang et les angoisses de l'insomnie.

4h30 am, j’ai les deux yeux ouverts depuis trente minutes. Insomnie. Je me lève pour pisser un coup, prendre une large rasade de jus d’orange et je me recouche dans l’espoir de retrouver le sommeil. Mais de sommeil, nenni. Rien. Niet. Nada. Tourne d’un côté, tourne de l’autre, sur le dos, sur le ventre, y a rien à faire. Je repense à cette émission de bonne femme à Radio Canada l’après-midi. Il y a quelques semaines, une «spécialiste» du sommeil était invitée et donnait des trucs pour contrer l’insomnie. Technique de respiration, faire le vide, s’envelopper d’obscurité... j’ai appliqué toutes ces choses, mais ça n’a rien donné. Je ne pouvais m’effacer de l’esprit ce rêve étrange que je venais de faire et qui accaparait toutes mes pensées.


J’étais avec une amie, mais je ne pourrais vous dire qui elle était au juste. Tout ce que je sais c’est que dans mon rêve, c’était une amie. Avec nous, il y avait un type qui se trouvait à être un ami aussi.

Jusque-là donc, c’est facile à suivre. Je suis avec deux amis à moi, une fille et un mec. Mais l’histoire va drôlement se compliquer pour vous à l’instant et il faudra suivre bien comme il faut pour tout comprendre.

Parce que le mec qui est avec nous, il faut savoir qu’il est déjà mort, mais cela ne l’empêche pas d’être là, de rigoler et de parler de la pluie et du beau temps. Bref, il est mort, mais il vit devant nous.

Le mec est jeune, dans la vingtaine peut-être. Je n’en suis pas certain. Mais assurément, il est plus jeune que moi. Il porte une chemise blanche. Moi et la fille, on trouve tout à fait normal d’être accompagnés d’un ami mort parce que bon, il n’est pas désagréable du tout comme type et pour tout dire, il semble être en très bonne santé. Un mort en pleine forme quoi, heureux d’être encore en vie malgré sa mort. (Plus aussi évident à suivre hein? Je vous avais prévenu pourtant.)

Même qu’il nous explique en détail les raisons de sa mort survenue quelque temps plus tôt. On l’écoute avec intérêt jusqu’à ce qu’une petite lumière se fait dans nos têtes, la fille et moi : «Heu... s’il est mort, comment se fait-il que nous soyons devant lui en train de parler de la pluie et du beau temps, et même à l’écouter parler de sa mort justement?»

Épineuse question s’il en est une, même lorsqu’elle surgit dans un rêve. Du coup, en réfléchissant à ça, on perd de vue le type. Il n’est plus là quoi. On se retrouve tout seul la fille et moi. Le fait d’avoir évoqué entre nous l’incohérence de la situation aura eu comme conséquence de mettre fin à ladite situation. Bref, cette fois le type est bien mort puisqu’il n’est plus là. Mais pendant un court instant, j’ai l’impression immense d’être en train de découvrir le fameux pot aux roses concernant cette chose: La Mort. En effet, je «m’entends» expliquer à la fille que la mort n’existe que parce qu’on y pense, que si on y pense pas, elle n’existe pas. La preuve c’est que nous ignorions que ce type était mort, donc, devant nous, il ne pouvait qu’être vivant. Sans le savoir, notre ignorance de sa propre mort lui donnait par la même occasion deux esprits purs par lesquels il pouvait se faufiler et venir goûter un peu des plaisirs de la vie.

Oui je sais, c’est immensément tordu, mais ça l’était beaucoup moins lorsque ce rêve était tout frais dans mon cerveau. On dirait qu’à partir du moment où je tente de mettre des mots sur l’évocation de ce rêve, toute la compréhension parfaitement cohérente que j’en avais pourtant au moment où je me suis réveillé s’efface et disparaît à mesure, comme si la réponse était écrite sur le sable et que mon raisonnement avait les mêmes effets que les vagues. Comme si toute la compréhension de ce mystère devenait impossible à l’état d’éveil.

Toujours est-il que pendant les premières secondes de mon réveil, j’avais la certitude d’avoir percé le mystère de la vie et de la mort, que les deux étaient intimement liées... imbriquées l’un dans l’autre, comme deux composantes essentielles d’un grand Tout qui nous échappe, qu’il y avait autre chose justement que la vie et la mort, mais que ça prenait les deux pour y parvenir, qu’ici bas, on est jamais tout à fait mort ou tout à fait vivant, que les personnes disparues ne l’étaient jamais tout à fait, qu’il existait un endroit quelque part où les vivants et les morts pouvaient se fréquenter...

Mais comme je disais, tout ça m’échappait à mesure que mon esprit se «réveillait», avec comme résultat qu’il ne me reste plus que des miettes de sensations éparses pour tenter de vous expliquer tout ça.

Forcément, le résultat ne peut qu’être incohérent et totalement confus. Mais je vous jure que ça ne l’était pas quand je me suis réveillé.


Pourquoi ce rêve? Qui était ce type? Et cette fille? Existe-t-elle ou est-ce le fruit de mon imagination débridée? Et si elle existe justement, quel pourrait bien être son numéro de téléphone? Dans mon rêve, j’ai même pas pensé à lui regarder le cul.

Pourquoi?

Troublantes questions existentielles qui ne cessaient de me tarabuster le cerveau alors que je ne voulais que me rendormir. C’est là que je me suis levé pour aller pisser un coup. Ce rêve m’est sans doute venu à cause des expériences troublantes vécues dans la journée.

En effet, dans la journée j’ai été pour une deuxième fois me faire retirer du jus de coude chez madame Dang. Madame Dang, c’est la docteure de la clinique où j’ai mes habitudes ces temps-ci. Son vrai nom c’est docteure Dang mais j’aime mieux dire madame Dang parce que ça fait comme de la musique dans ma bouche. Un genre de turlutte québéco-vietnamienne.

Madame Dang

Madame Dang

Madame Dang

Dans la salle d’attente de la clinique de madame Dang, il y avait cette angoissante dame d’une cinquantaine d’années qu’on ne pouvait manquer parce qu’elle se tenait debout en plein milieu de la salle, se prenant le visage à deux mains, silencieuse et inquiétante. Sa longue chevelure emmêlée lui tombait plus que négligemment sur les épaules. Elle portait une long manteau de fourrure complètement défraîchie et qui devait dater de la dernière congélation du continent. Genre fourrure 100% mammouth de confection Néandertal et étiqueté équitable. Sous son manteau, on pouvait voir sa chemise de nuit. De toute évidence, elle n’allait pas bien du tout et quand j’ai dû passer devant elle pour aller me prendre une chaise libre, j’ai cru pendant un instant qu’elle allait en profiter pour sortir un long couteau de son manteau et de me le planter dans le dos avant de se mettre à hurler et à se griffer le visage, comme ça arrive toujours avec ce type de personnage dans les films d’horreur psychologique. J’avoue que ce tableau m’a un peu troublé.

Quand madame Dang m’a reçu dans son bureau, elle s’est tout de suite souvenue de moi à cause de mon coude et de la bosse qui trônait dessus comme une troisième couille qui chercherait à voir le jour après une longue balade dans les prés de Tchernobyl. Elle m’a expliqué qu’elle pouvait encore tenter de retirer le jus ou de me refiler de la cortisone.


- Les deux options sont bonnes. C’est vous qui décidez.

- Personnellement, j’opterais pour une deuxième tentative d’extraction avant de toucher à la cortisone.

- Parfait. Je vous retire le liquide et dans une semaine, si ça réapparaît, revenez me voir pour la cortisone.


Madame Dang est très gentille malgré qu’elle soit maigre à faire peur. Je ne sais pas pourquoi, mais ça me rassure que nos docteurs soient de plus en plus vietnamiens et de moins en moins québécois. À l’école, c’était toujours eux qui torchaient les autres dans les résultats scolaires et de les voir là, à nous triturer les couilles de coude, ça me réconforte. Le dernier docteur québécois que j’ai vu, c’était la veille de mon embauche. Un docteur payé par la boîte pour nous ausculter en deux secondes et pour nous cogner les genoux avec un petit marteau de caoutchouc. Un vieux criss de bougonneux qui ne pouvait pas s’empêcher de me faire la morale parce que je sentais la cigarette.


- Vous savez que c’est mauvais pour la santé? Vous pourriez même en mourir.

- Pas de danger parce que la vie et la mort sont imbriquées l’un dans l’autre, comme deux composantes essentielles d’un grand Tout qui nous échappe, qu’il y a autre chose justement que la vie et la mort, mais que ça prend les deux pour y parvenir, qu’ici bas, on est jamais tout à fait mort ou tout à fait vivant, que les personnes disparues ne le sont jamais tout à fait, qu’il existe un endroit quelque part où les vivants et les morts peuvent se fréquenter.


Pas de ça chez madame Dang qui se fout bien de savoir si je fume ou pas. Elle, ce sont les couilles de coude qui l’intéresse et ça me convient parfaitement. En quittant madame Dang, je me suis rendu chez moi où É... m’attendait pour me faire le topo des dernières nouvelles syndicales.

- Et ta couille? qu’il me demande dès qu’il met les pieds dans ma maison.

Je lui montre mon coude tout neuf.

- Disparue.

On se fait un café, on parle, on cogite, on planche sur des idées qu’on voudrait explorer en janvier et le temps de se retourner qu’il est déjà temps d’aller faire l’épicerie. Je quitte É... qui s’en va vers de nouvelles aventures et je me rends sur l’avenue Mont-Royal. Pendant que je marche, je sens une drôle de sensation dans ma bouche. Putain! Une dent qui chambranle! De retour à la maison, je me plante devant le miroir de la salle de bain et je scrute la chose. Effectivement, j’ai une dent qui commence à vouloir danser, résultat d’un déchaussement de la gencive.

Panique!

Il me faudra aller voir un dentiste même si j’a affreusement peur des dentistes! Du coup, j’observe plus attentivement la chose et je constate que mes gencives, ben mon vieux, c’est de moins en moins de la gencive et de plus en plus de l’éponge.

Immense panique!

Moi qui avait presque décidé d’aller voir un spécialiste de la vue pour me faire prescrire des lunettes, voilà-t-y pas que je devrai en plus voir un spécialiste de la gencive qui coûte assurément plus cher. Sans parler de mes cheveux qui tombent... MAIS, MA FOI, C’EST LA DÉCRÉPITUDE QUI COMMENCE!!!

Assurément, ces angoissantes aventures ont certainement été pour quelque chose dans mon insomnie. Sans doute que le type dans mon rêve, le mort avec la chemise blanche, c’était en fait ma dent. Et la fille, c’était peut-être une personnalisation chimérique de madame Dang. Ou alors la symbolisation mystico-vietnamienne d’une couille de coude?

Quand je vous disais que j’étais assailli d’oppressantes questions!

mercredi 22 décembre 2010

Cette main!!

Schubert couvre mon logement d’une chape de nostalgie. Musique de circonstance pour un 21 décembre qui se s’efface doucement. Curieuse journée. Curieuse soirée. Les dernières journées avant Noël sont remplies d’absurdités frénétiques et de fatigues combinées. Les gens sont tous fous, tous débiles, tous complètement abrutis par «cette urgence» de consommer.

J’étais là, sur le plancher de vente ou à la caisse, dépendant des urgences et des demandes, et je me sentais complètement décalé de cette stupidité collective. J’observais cette marée de tarés programmés comme des robots par la Très Sainte Religion de la consommation et une fois de plus, j’avais cette terrible sensation de ne pas être en phase avec mon époque.


- Voici le temps des Fêtes! Dépensez bande de cons!


Et parce qu’il est programmé pour suivre le troupeau, pour faire ce qu’on lui dit de faire, pour aller là où l’on veut qu’il aille, voici le grand cheptel humain qui se met à dépenser à défaut de penser.

Ecce homo les bras chargés de cadeaux parce que c’est comme ça qu’on lui dit de faire.


Je voulais passer une soirée tranquille après cette furie démoralisante, ce que j’ai fait. Je viens à l’instant de terminer l’immense cauchemar d’Ingrid Bétancourt qu’elle a publié sous forme de livre. Je l’ai lu lentement, très lentement. Je voulais m’imprégner au maximum de cette longueur du temps qui émane tout au long des chapitres. Comment aurais-je pu survivre avec une chaîne autour du coup pendant des années? «À midi, nous vîmes passer nos compagnons de l’autre groupe, en file indienne à la suite d’Enrique. Ils étaient tenus en laisse comme des chiens par un garde qui marchait derrière en pointant son fusil sur eux.

Je ne m’habituais pas à voir une chaîne autour du cou d’un homme.

Nos compagnons nous dépassèrent en nous frôlant, au risque de trébucher sur nous. (...) Nous dûmes les suivre. Nous aussi en silence, nous aussi tenus en laisse.»


J’ai trouvé cette photo sur le web. Ce sont les mains de Ingrid Bétancourt crispées par l’émotion à sa descente de l’avion le jour de sa libération. Superbe photo. Elle porte, au poignet gauche, une montre que l’un des chefs des FARC lui avait donnée les premiers jours de sa captivité et qui, dans la jungle, deviendra un objet d’une rare valeur. Elle porte aussi un bracelet qu’elle avait tissé elle-même pour passer le temps lors de ces longues journées à tuer le temps. À noter le crucifix qui pend ainsi que le bout de tissu vert dont j’ignore la signification. Je sais par contre qu’elle est très croyante et qu’elle s’en remettait souvent à Dieu pour ne pas sombrer dans le désespoir. Ma théorie personnelle est que ce bracelet serait une sorte de chapelet de Marie semblable à ces chapelets de Scout. Deux indices me portent à le croire. D’abord à cause des boutons qui serviraient à compter le nombre de «Je vous salue Marie». Et ensuite, et surtout devrais-je dire, parce que Ingrid Bétancourt n’a jamais caché sa dévotion à la vierge Marie. Mais j’aimerais que votre attention se porte surtout sur la main droite, celle dont le poignet est recouvert par un bandeau noir. Sans doute une blessure, mais dans le livre, il n’est nullement mention de ce bandeau ni de cette «blessure». Mais ce n’est pas vraiment important. L’important c’est que cette main à tenu une machette volée à des gardes meurtriers lors de ses tentatives d’évasion dans la jungle. Et ce que je voulais dire aussi c’est que deux ans, cinq mois et quelques jours après que cette photo fut prise, ma main à moi s’est retrouvée dans cette main là. Et à deux reprises à part ça! C’est d’ailleurs cette même main qui a écrit mon prénom à moi et qui me fut donné par ma mère. Je peux vous affirmer que c’est une toute petite main, mais toute chaude et remplie de vie.

lundi 20 décembre 2010

jeudi 16 décembre 2010

Le coude

J’avais, sur le coude, une bosse grosse comme une balle de golf. Une protubérance affolante apparue quelque part entre samedi et lundi dernier. C’est en effet lundi que je m’en suis aperçu mais c’est le samedi précédent que je me suis cogné le coude au travail produisant une sorte de décharge électrique. Mais je n’y ai pas fait attention puisque la douleur s’était rapidement dissipée.

Ladite bosse semblait être le résultat d’une accumulation d'un liquide mystérieux et quand j’appuyais nerveusement dessus avec mon doigt tout en sifflant (je siffle toujours quand j’explore avec mon doigt une partie de mon corps affligée par une blessure... ça rend la chose moins douloureuse), l’effet était le même que si j’avais mis le doigt sur un ballon rempli d’eau. Ça ne faisait pas mal, mais je sentais un léger engourdissement dans le bras. Il n’en fallait pas plus pour que l’hypocondriaque en moi ne s’affole et y voit le début d’un processus de liquéfaction interne de mon organisme menant directement à une mort certaine ou, au pire, à une hydrocéphalie grimpante du type «Elephant man» de David Lynch, même si je sais que le sujet du film n'est pas l'hydrocéphalie mais bien... heu...un autre type de dégénérescence fucked up, comme l'aurait si bien dit Lamartine.


Moi lors de ma crise d'hypocondriaque

m'imaginant en train de franchir

les portes du Centre Bell.


Je devais donc me rendre à la clinique ce matin, ce qui m’a fait doublement chier parce que, d’une part, je déteste me rendre dans les cliniques où l'odeur qui y flotte sent toujours un peu la fin de l’existence et d’autre part, parce que j’avais un meeting important... (Censuré) ... devant mener à des «pistes de solutions» (termes à la mode dont j’ai déjà traité dans ce blogue)

Les pistes de solutions, ça me fait toujours penser à mon père quand il partait à la chasse. Mon père a été effet le premier chasseur écologique de sa génération, ne tuant jamais de bête mais revenant toujours à la maison avec des tas d’histoires palpitantes où il avaient vues des milliers de pistes dans les sentiers de la forêt. Ce qui faisait immanquablement dire à ma mère qui ne manquait jamais d’humour que les soupes aux pistes ne nourrissaient pas beaucoup la famille.

À la clinique, ce fut une jeune Vietnamienne qui m’a traité. J’avais l’impression qu’elle avait 12 ans malgré une dentition proéminente. Quand elle a vu mon coude, elle a dit «Ah! C’est juste une inflammation». J’étais un peu déçu de sa réaction parce que je croyais vraiment l’épater avec ma bosse dans le coude. Du coup, elle m’a fait assoir sur sa table d’observation et j’étais bien content qu’elle ne me demande pas de me dénuder pour me tâter les couilles en me demandant de tousser parce que le papier protecteur sur ladite table d’observation était déjà froissé par le précédent visiteur et que franchement, je n’aurais pas voulu me coller les fesses sur un papier protecteur déjà utilisé par un précédent visiteur dont j’ignorais tout de ses tendances politiques. Elle s’est approchée avec une seringue grosse comme une tour Eiffel et m’a piqué le coude pour m’en extraire le jus accumulé. Elle m’a dit : «Prenez une grande respiration... ça va piquer un peu.» Pour lui montrer que je n’étais pas du type chochotte, je me suis mis à parler d’une manière très décontractée pendant qu’elle me plantait son instrument dans la peau. Le liquide qu’elle extirpait de mon corps était brunâtre comme un rhum des Antilles alors que je m’attendais à ce qu’il fût rouge comme du vin de Bordeaux.

Et puis ce fut tout.

mardi 14 décembre 2010

Anonyme

J’avais parlé de lui dans les premiers textes de ce blog, il y a deux ans de cela. Ce clochard sympathique qui avait pris l’habitude de quêter devant le magasin. Le type devait avoir à peu près mon âge. Un peu plus, un peu moins, difficile à dire. C’était un gars du quartier et plusieurs clients le connaissaient depuis des années. Ronald, un monsieur d’un certain âge qui n’a jamais quitté Montréal Nord me disait que ses propres enfants jouaient avec lui quand il était gamin. «C’était un bon gars, travaillant et courageux. Il a monté sa propre entreprise de réparation de toiture. À ses meilleures années, il avait 5 ou 6 employés sous ses ordres.» Un jour, on ne sait trop pourquoi, il a perdu les pédales et s’est retrouvé dans la rue. Certains disaient que c’était à cause du décès de sa femme. D’autres racontaient plutôt qu’il avait déjà perdu la boule avant le décès de sa femme. Ça n’a pas d’importance de toute manière. Le fait est qu’il était devenu sans-abris et qu’il quêtait devant la succursale. Je parlais souvent avec lui. Il était évident que le pauvre homme souffrait d’un trouble de psychiatrie et qu’il aurait dû être soigné. Avec une prescription bien dosée, je suis certain qu’il aurait pu être fonctionnel socialement. Son cas était traitable. Il avait un vocabulaire étonnamment élaboré, même dans ses délires, preuve qu’il possédait une érudition certaine. Mais quand je l’ai connu, il dormait dans le champ tout près de la voie ferrée et il aspergeait d’alcool désinfectant l’espace où il allait passer la nuit pour, disait-il, chasser les lutins mauvais. «Avec ça, t’as pas de problème de lutins» qu’il me disait souvent. J’aimais beaucoup lui parler. Il me faisait voyager dans des mondes impossibles juste le temps de fumer une cigarette. Je me souviens de ses yeux magnifiques colorés d’un bleu azur comme je n’avais jamais vu chez quiconque avant lui. Il y avait quelque chose de céleste dans sa pupille, mais il était le seul à l’ignorer. Il quêtait juste assez pour s’acheter des petites bouteilles de Brandy. «C’est pour me garder au chaud.» Il avait une faible résistance à l’alcool, mais il avait l’ivresse agréable. Il riait tout le temps quand il avait un coup dans le nez. Certains clients le connaissaient par son prénom et lui apportaient de la bouffe ou des vêtements chauds. Les quidams du hasard sont plus généreux qu’on ne le croit. Il aimait parler de vin avec moi même s’il n’y connaissait pas grand-chose. Quand nous avions des dégustations pour les clients, j’allais lui porter des gobelets remplis à ras bord du précieux nectar tout en lui parlant cépage et région vinicole. Dans ces occasions, il ne goûtait jamais le vin sans d’abord le sentir profondément en prenant un air de connaisseur qui ne faisait pas sérieux du tout. Mais c’était drôle de le voir aller. Puis, après avoir goûté, il me faisait un topo personnel sur les qualités générales et ma foi, ses opinions étaient très souvent dans le mille. Un jour, il s’était acheté un fromage quelconque avec les fruits de sa quête et qu’il comptait manger seulement pendant la nuit, quand le froid le réveillerait de son sommeil. Je lui avais acheté un Bordeaux de petit format que j’avais été lui donner pour accompagner son fromage. Il s’en était régalé et il m’avait par la suite souvent reparlé de ce festin nocturne vin et fromage. Il m’avait dit un jour que son rêve était d’acheter un conteneur à marchandises au port de Montréal et de le transformer en gîtes pour l’hiver. Sa mère vivait toujours et habitait encore dans le quartier. Il n’allait jamais la voir, sauf quand les soirs d’hiver se faisaient trop mordants. Dans ces moments, il allait chez elle pour dormir sous son balcon. Elle le priait de rentrer, de prendre un bain, de coucher au chaud, mais il refusait sans pour autant s’éloigner. Il préférait rester dehors, mais tout près d’elle.

- Pourquoi? Lui ai-je demandé un jour.

- Ça serait trop long à expliquer. Je n’embarque pas dans ces histoires. Ce n’est pas que je n’ai pas confiance en toi, mais j’aime mieux ne rien dire.

Il avait deux enfants dans la vingtaine. Un garçon et une fille. Il m’en parlait parfois, quand un éclair de lucidité le frappait. Il ne les voyait plus.

- Pourquoi?

- Ça serait trop long à expliquer. Je n’embarque pas dans ces histoires. Ce n’est pas que je n’ai pas confiance en toi, mais j’aime mieux ne rien dire.

Chaque fois que nous abordions ses histoires personnelles, ça se terminait toujours de la même manière.

Je ne l’ai plus revu depuis un an puisque mes fonctions syndicales m’ont éloigné du magasin. J’ai été étonné de ne plus le revoir à mon retour il y a trois semaines. Je demandais de ses nouvelles à mes collègues, mais personne ne savait où il était passé. Puis, Ronald est passé. C’est lui qui m’a appris la nouvelle. «Il est mort l’hiver dernier. On la retrouvé un matin raide comme une planche dans son champ, emmitouflé dans son sac de couchage près de la voie ferrée. Mort de froid.»

vendredi 10 décembre 2010

Milgram

http://www.ledevoir.com/international/actualites-internationales/312757/la-premiere-cyberguerre-mondiale


Ce n’est pas inintéressant ce qui se passe au sujet de Wikileaks. Cette histoire est même fascinante et très révélatrice de notre époque.

Qui est Julian Assange? Un type qui se sert des outils de son temps pour faire chier les gouvernements en coulant des informations ( petites et grandes ) confidentielles. À ce niveau, il me fait penser à ces pamphlétaires du Siècle des Lumières. Et exactement comme eux, son action est légale à la base, mais devient hors-la-loi quand elle commence à dérager sérieusement le pouvoir. Il est d’ailleurs assez cynique d’entendre ces politiciens le traiter de terroriste alors qu’au fond, tout ce qu’il fait c’est de recevoir de l’info et de la publier. Et c’est pathétique à mourir que de voir ces assassins assoiffés de pétrole qui ont fait plus de 100 000 civils tués en Irak et en Afghanistan accuser un simple nerd plus brillant que les autres d’être un dangereux criminel. Car sincèrement, en quoi Assange serait plus dangereux pour l’humanité que les Bush-Blair-Rumsfeld de ce monde?

Pour avoir publié la vérité?

Vous ne trouvez pas ça dégoutant? Ne vous vient-il pas une petite odeur orwellienne aux narines? Vous ne trouvez pas ça étrange ces supposées accusations de viol?

Vous croyez à ça vous?

Je n’aime pas Vladimir Poutine, mais j’ai adoré son commentaire. «S’il s’agit de démocratie au sens plein du terme, pourquoi cachent-ils M. Assange en prison? Qu’est-ce que c’est, la démocratie?»

Venant de Poutine, c’est rigolo. Enfin, dans la mesure où on a le sens de la dérision aiguisée. Mais la question est tout de même intéressante. En effet, qu’est-ce que la démocratie les amis? Croyez-vous toujours vivre en démocratie? La démocratie implique obligatoirement la liberté d’opinion.

Mais alors, pourquoi attaquer Wikileaks?

Parce que la liberté d’opinion n’est permise que lorsqu’elle ne menace pas le pouvoir. Affirmer le contraire c’est faire preuve d’aveuglement. On a qu’à retourner à l’été dernier et voir les 1000 manifestants pacifistes qui se sont fait enfermer lors du G20 à Toronto.

Et d’ailleurs, puisqu’on en parle je me suis toujours demandé pourquoi les membres du G8 se réunissent-ils toujours en huis clos? Ne sont-ils pas élus par le peuple? Pourquoi alors ces séances ne se déroulent-elles pas devant les médias? Pourquoi se cacher?

La vérité mes amis, c’est que nous nous faisons tous fourrer. Depuis la fin de la Seconde Guerre, nous vivons dans un système économique devenu global. En déréglementant les marchés, nos élus ont laissé le privé s’accaparer des leviers économiques. Les plus forts ont mangé les plus faibles, créant du même coup des monopoles plus forts que les gouvernements. Ils ne sont maintenant qu’une poignée d’oligarques à contrôler l’ensemble de la richesse de la planète. Comment tu veux, toi, petite France ou microscopique Québec, tenter de renverser la vapeur quand t’as laissé les propres fleurons de ton économie se vendre comme des putes de luxe à des sociétés étrangères?

Mais je m’égare. Je voulais parler de Assange, de cette cyberguerre qui commence, de cette révolution virtuelle qui se trame derrière les écrans cathodiques. Mais je suis un peu trop fatigué. ...


...(deux paragraphes censurés)...


... De ces types de sujets qui feraient exploser les résultats de l’expérience de Milgram. http://fr.wikipedia.org/wiki/Expérience_de_Milgram


Enfin bref, je vais aller me coucher.

Bonne nuit.