mercredi 30 juillet 2014

Tim's

Quotidien bousculé puisque le Mousse Café est fermé pour une semaine. Vacances obligent. Sentiment d’abandon si vous voulez vraiment tout savoir. Si, si ! Abandon et il n’y a pas d’autres mots.
Me suis donc arrêté au Tim’s hier matin, avant de me rendre au boulot. Celui sur St-Michel, juste au nord de la 40. Le matin, c’est une vraie ruche d’abeilles, mais le service est rapide grâce au nombreux staff qui y travaille.

Le mec qui m’a servit devait avoir quelque chose comme 40 ans. Il détonnait des autres employés autant par son âge que par cet accent particulier propre à ceux qui ont vu le jour en Afrique du Nord. À peine quelques mots échangés m’ont permit de comprendre que le mec était tout frais arrivé au Québec et que son bagage scolaire était gros comme ça.
Mais là, il sert du café chez Tim’s entouré de collègues ados qui n’ont pas terminé leurs études.

Ça m’a fait un petit pincement au cœur.

mardi 29 juillet 2014

La leçon



Israël tue.
Le Hamas tue aussi, mais moins.
Peut-on alors quantifier l’horreur par le nombre de cadavres ?
Des fois, on se dit que oui.
Selon l’ONU, 20% des morts en Palestine seraient des enfants.
T’as un enfant toi ?
Oui bon, je comprends. Tu te défends.
Mais des enfants !!
20% !
Tes dommages collatéraux, ils commencent à ressembler à un massacre.
Un génocide.
Tu comprends le mot j’imagine ? 
T’es pas Juifs toi ?
Le ghetto de Varsovie dans les années ’40, ça te dit quelque chose ?
Qu’est-ce qui est plus barbare ?
Le phosphore ou les chambres à gaz ?
Mais non je ne suis pas antisémite.
Humaniste je suis.
Y a des humais innocents sous tes bombes.
Des enfants.
20% de ta victoire avait moins de 10 ans.
T’es un champion.
T’as bien appris ta leçon.
Nazi va !  

vendredi 18 juillet 2014

Pendant les derniers jours

Pendant les derniers jours.
Pendant les derniers jours, il ne parlait presque plus. Chaque mot était un effort surhumain. D’ailleurs ce qui lui restait de vie était surhumain.
On ne dit pas « maigre » dans un cas de cancer en phase terminale. On dit « squelettique ». Si tu n’as jamais connu ça, tu ne peux même pas imaginer.
Même pas.
Allongé dans ce lit prêté par l’hôpital, il vivait encore.
Encore.
Encore.
Encore.
Encore.
Et encore.
Parfois, souhaiter la mort de quelqu’un, c’est faire preuve de pitié.

Pendant les derniers jours, sur le balcon de son chalet, il pleuvait à torrent.
La rivière débordait par ce ciel déversé sur la terre.
Un mur d’eau éphémère me tenait compagnie.
J’ai crié de toutes mes forces en pleurant « Grand papa, aide-le ! »

Pendant les derniers jours, ma main caressait sa tête renversée.
Mes larmes humectaient sa peau asséchée.
Des mots d’amour chuchotés drapaient nos derniers rapprochements.
Il grimaçait de ne pas pouvoir me répondre.
Mais la faiblesse de son corps ne parvenait pas à effacer l’essence de son âme.
Comme à un enfant effrayé qu’on veut réconforter, je luis disais « chhhhhh, ne parle pas papa. T’as pas besoin, t’as pas besoin. Je te comprends. »
Je lui ai embrassé au moins mille fois le front.
Ça l’apaisait dans sa prison.
Pendant les deniers jours, mon papa était comme un petit oiseau blessé au creux de ma main.

Pendant les derniers jours.
Pendant les derniers jours, j’ai été le papa de mon papa.
Sa petite main dans la mienne.
Mes baisers sur son front.
Mes caresses sur sa tête.

On savait que tu ne passerais pas la nuit.
Ton corps refroidi à 5h du matin, ce n’était déjà plus toi.
T’étais déjà ailleurs.

Dans l’invisible des choses.

mardi 8 juillet 2014

Un été

Été 1973.
Cet album est sans doute numéro 1 au palmarès et joue en permanence depuis des jours sur la table tournante de mon ainé de frère, celui par qui la découverte musicale arrive toujours. Paul McCartney frise le génie d’une plage à l’autre sur les deux faces de cet incomparable 33 tours. Probablement son meilleur album à vie sans ses légendaires copains de Liverpool. Chaque pièce s’imbrique avec la précédente comme autant de pièces d'un puzzle.



Dès que j’entends cette chanson, la magie des souvenirs me ramène immanquablement à l’été de mes dix ans. Dès les premières notes de guitare, ça vient me chercher et c’est parfois si fort que j’en arrive même à sentir l’odeur de cet été merveilleux vécu dans une banlieue plantée près d’un fleuve qui se cache trop souvent. Ça sent bon la pelouse fraichement coupée et le soleil du matin qui tape dans la cour arrière.
Quoi ? Kess tu dis toi ? Que le soleil du matin qui tape dans la cour arrière n’a pas d’odeur ? Si tu dis ça c’est que tu n’as jamais été un enfant. Y a des parfums dans tout quand t’as dix ans et que tu es heureux. Même dans les couleurs. T’as jamais remarqué que le bleu sent bon le cadeau de Noël et que le jaune sent bon les étoiles ?
Non ?
Mais t’es pas normal ou quoi ?

Été 1973 donc. Je ne sais pas pourquoi, mais nous gardons à la maison mes deux cousines et mon cousin pour quelques jours. Des jeux et des rires tout le temps. La normalité est bousculée par leur réjouissante présence. C’est fantastique.
Dans le sous-sol, du côté « non fini », y a la fournaise à l’huile tout au fond. La terrible fournaise à l’huile. Elle vit d’octobre à avril en faisant des bruits atroces quand elle se met en marche. On dirait qu’elle est toujours furieuse d’exister et qu’elle aimerait bien se payer l’un de nous pour souper. C’est qu’elle nous boufferait la salope si on n’y prenait pas garde. L’été, elle dort. Mais on la sent ne roupiller que d’un œil. L’autre nous guette. Si elle ne nous attrape pas, c’est qu’elle est trop alanguie par la chaleur de juillet. Mais elle nous guette ! J’en suis certain !
Le trip méga effrayant, c’est de jouer à la cachette de ce côté et de se trouver une planque après avoir fermé la lumière. Il fait noir comme chez le loup. On a la chienne et on en arrive même à avoir hâte de se faire repérer par celui ou celle qui, dans le jeu, est en chasse des autres. Mais c’est quand même chouette. Au fond de nous, on sait que c’est une réalité qui ne nous tuera pas. Nous avons 8, 10, 11 ou 12 ans. Nous sommes éternels.

T’es toujours éternel quand t’as 10 ans en 1973 et que ton grand frère vient de te faire connaître Band On The Run.