jeudi 27 novembre 2014

Des traces

Ils me font de plus en plus pitié ces gens autour de moi qui se croient toujours en démocratie.
Ils me dépriment.
On les voit se déchirer sur FB ou ailleurs en s’accusant mutuellement de ne pas avoir voté pour le bon parti, alors que tous les partis sont des pièges à cons.
Ils croient tous que ces partis travaillent pour le peuple alors que ça crève pourtant les yeux qu’ils n’en ont rien à foutre de toi.
De ta gueule.
De tes malheurs.

On les voit se déchirer sur FB ou ailleurs en s’accusant mutuellement de ne pas avoir voté pour le bon parti, alors que c’est exactement ce qu’ils veulent. Pendant que tu te déchires avec ton ami, ton frère ou ton collègue sur la bonne manière de voter, eux, ils te crossent.

Ouvre tes yeux et regarde.
Sont là pour leurs amis, ces oligarques qui ont payés pour les faire élire.
Et puis sont là pour leur poche.
Of course.
Sont là pour passer des lois qui ne profiteront qu’à leurs amis.
Et pour passer ces lois, ils vont te mentir en pleine face.

Plus tu crois en eux, plus ils vont te mentir
Et plus ils te crosseront.

Ils vont te diviser pour montrer qu’ils ne sont pas pareils.
Lui fédéraliste.
Lui indépendantiste.
Lui libéral.
Lui socialiste.
Mais tous mangent dans la main des oligarques.
Et ce sont les oligarques qui financeront leurs élections.
Et pendant ce temps là, tu accuseras le fédéraliste.
L’indépendantiste.
Le libéral.
Le socialiste.

La seule opposition qui est médiatisée en masse est une opposition contrôlée.
Par les médias.
Les médias appartiennent aux oligarques.
Et toi tu lis les médias en croyant qu’ils disent la vérité.
Quand l’opposition gagne le pouvoir, ce pouvoir appartient encore aux oligarques puisque ce sont eux qui ont fait élire l’opposition.

Tous les vrais opposants du pouvoir se font tuer. (Allende)
Ou meurent du « cancer » (Chavez et cie en Amérique du Sud)
Ou se font accuser de crime ésotérique (Snowden, Assange)
Tu vis dans un monde fasciste mec.
Tu ne me crois pas ?
T’es déjà fiché juste en lisant ce texte.
T’as laissé des traces virtuelles.


Désolé.

mardi 18 novembre 2014

- 12 °

Il fait -12° ce matin. Avec le facteur vent. Faut préciser. L’enfermement débute donc officiellement aujourd’hui. Enfin, ça fait quelques semaines que c’est ainsi, que tu ne peux plus prendre ton café matinal sur la petite table de ton balcon en regardant les jolies voisines promener leur chien par la ruelle. L’été, c’est mon passe-temps préféré.
La plus jolie, c’est M-C qui habite sur ma gauche, en haut, dans la bâtisse d’à côté. Toujours très souriante et très sympathique parce qu’elle vient de la Beauce et que les gens là-bas, ils sont tous comme ça. L’été, elle est encore plus belle qu’en hiver parce qu’elle ne craint pas de sortir son chien-chien en chemise de nuit. Enfin, chemise de nuit, faut le dire vite. C’est plutôt un espèce de long t-shirt qui lui descend jusqu’aux genoux et qui donne une certaine liberté à quelques unes de ses courbes stratégiques que l’œil mâle apprécie toujours. Surtout le matin en buvant ton café sur la petite du balcon. En hiver, c’est plus compliqué à observer à cause de toutes ces couches de vêtements qui amenuisent la qualité du spectacle. Mais avec un peu d’imagination, j’arrive toujours à trouver un bout de bonheur à admirer. On est comme ça, nous les mecs.
Je crois l’avoir déjà dit, mais elle sort depuis quelques mois avec un type un peu louche qui habite maintenant avec elle et à qui il arrive d’aller promener le chien à la place de M-C. Ce qui est purement scandaleux parce que ça bafoue les conventions. J’ai pensé faire une plainte à la ville mais j’sais pas c’est quoi le département pour ce genre de problème.

Anyway, ce que je voulais dire c’est qu’il fait officiellement froid et que c’est le début de l’enfermement hivernal. Jusqu’en Avril, ce sera la chasse au bout de soleil qui te réchauffe un peu la peau.


Faut pas y penser. Non, faut pas y penser.

dimanche 16 novembre 2014

Peut-être

De ces pensées qui te font plonger dans de profondes nostalgies, qui te font réaliser que le temps n’est peut-être qu’une abstraction qui se construit d’impressions.

Napoléon, qui pouvait être philosophe à ses heures, a déjà dit que la vie n’était peut-être qu’un songe.

Peut-être.
Ce mot revient si souvent quand on tente de comprendre les raisons de notre passage ici-bas.
Peut-être.
Tout n’est que peut-être.
La vie n’est qu’une suite de peut-être.

Depuis le départ de mon père, je me sens envahi par d’immenses vagues de nostalgies. Des vagues grosses comme ça qui balaient la berge de mes pensées en faisant plier les palmiers et en grugeant les falaises. C’est la bourrasque des souvenirs perdus qui submerge et engloutie le temps présent. Quand cette nostalgie se retire à la marée basse, la plage se remplie de petites et grandes épaves de mes années vécues.

Certaines de ces images sont si concrètes que j’en arrive même à sentir les odeurs. De ce logement-ci par exemple, le premier, celui sur la rue Rachel avec mes deux potes. Profond parfum d’automne, de feuilles mortes, d’eau de pluie, de terre mouillée surmonté d’un zest de poussière parce qu’on ne passait jamais l’aspirateur. Odeur de toasts brûlés, de cigarettes refroidies, d’encre de Chine et de peinture acrylique. De tout ça et puis aussi du parfum de Sylvie qui m’avait montré des tas de trucs qui ne s’apprennent pas dans les livres de philosophie.
Échos olfactifs d’une vingtaine qui s’entamait.

Peut-être que tout ça n’a jamais existé.
Peut-être que ça ne fut construit que dans ma tête.
Peut-être même que je ne suis pas là.
Que je suis un songe.
Que tout ceci n’est qu’un songe.
Même vous.
Peut-être.

Mon père qui fut n’est plus. J’ai peine à digérer tout ça. Il existe des preuves de son passage pourtant. Photos, vêtements, objets, mais ce ne sont plus que des artefacts sans âme qui parlent d’une époque passée. Le sujet qui s’accordait à ces choses a disparu par une nuit de juin. Son corps froid abandonné par sa substance intérieure, comme une enveloppe vidée de sa lettre, de cette correspondance qui nous rattachait à lui, reposait sur le dos, inerte.
Et nous pleurions tout autour du lit.

Submergé de souvenirs et de nostalgie. Et parlant de celle-ci, de la nostalgie, c’est vrai qu’après des deuils de la sorte, elle n’est plus ce qu’elle était. Elle te ramène à la fragilité de toutes choses, à l’éphémère. De ces jours heureux où je formais une famille unie avec ma femme et ma fille, de ces jouets qui traînaient dans la maison, de ce brouhahas fantastique à l’heure du souper, de ce bonheur incommensurable qui est là, présent, débordant, mais qu’on ne voit pas nécessairement parce que la seconde présente nous fait croire à une forme de normalité. Et ce qui est normal n’est pas nécessairement remarquable. Ce n’est qu’avec les années et la somme de nos chagrins que l’on réalise que le bonheur vécu ici-bas s’éparpille tout au long de notre vie en petites grappes épares et d’apparences anodines, mais qui prennent toutes leurs saveurs que lorsqu’ils n’existent plus.

Peut-être que le deuil apporte une part de réponse. Peut-être qu’il faut des départs pour que ceux qui restent comprennent certaines des substances invisibles de ce qui EST. Ces assauts répétés de nostalgies depuis juin dernier doivent surement construire quelque chose de nouveau en moi. Mais pour l’instant, je ne vois rien et je ne comprends toujours pas. Je sais simplement que je ne suis plus un enfant et que la fin se rapproche inexorablement.

Peut-être que tout ceci n’aurait été qu’un rêve finalement.
Un rêve vécu physiquement et que l’agonie qui nous attend tous, là-bas, au bout de cette route, n’est que le premier sursaut de l’éveil.

Peut-être.

vendredi 14 novembre 2014

Crème à café

Ce type chez Tim’s Horton alors que je m’y étais arrêté pour mon café d’après bouffe. C’est un technicien maison qui vient vérifier la salubrité des lieux et la qualité des produits. Je ne le vois que de dos et il tripatouille le fatras de filage complexe de l’intérieur de la distributrice à crème. Il a ses pipettes pour prendre des échantillons dans le but de les examiner. Je suis surpris de l’aspect sérieux du processus. Mais je le suis encore plus lorsque je vois le type se retourner et de me retrouver face à une copie conforme de Clint Eastwood. Sérieux, on dirait son jumeau identique. Du coup, la petite scène qui se déroule devant moi prend une toute nouvelle dimension et je tripe comme un fou à le regarder manipuler ses échantillons de crèmes et de café. T’en arrives à souhaiter qu’il se fâche contre un client pour l’entendre sortir une réplique culte.  


Voulant défier le technicien de la crème à café, le jeune client un peu fou approche sa main vers le petit panier dans lequel reposent les échantillons de crème. Mais au même moment, le technicien dépose sa pipette et plonge la main à l’intérieur de son veston. Il en ressort un 44 magnum plus gros qu’un porte-avion dont il pointe le canon entre le deux yeux du jeune client. Après avoir craché une giclé de tabac à chiquer sur le plancher, après avoir armé son flingue en actionnant le chien (Crrr !), il dit : Go ahead punk ! Make my day !

Rej

On vient de se farcir une nouvelle tête de directeur à notre succursale. Ma nouvelle directrice, celle qui fut nommée au printemps pour « mater » la bande à Rej, ben elle est partie officiellement ce matin. Elle remplaçait le précédent directeur, l’autre, celui qui avait essayé de suspendre un collègue et ami à Rej alors que tous les autres directeurs lui disaient de ne pas faire ça, pas dans la succursale à Rej. Mais il l’avait fait quand même et seulement cinq petits jours plus tard, et après quelques menaces bien pimentées de jeunes clients bien identifiés à des gangs de rue mais pote à nous, la direction a reculé, a payé la journée de suspension au collègue et décida du même coup de ne plus appuyer leur directeur. À partir de là, il était à nous et nous avons pu en faire ce que nous voulions. Nous l’avions donc mangé par petites portions pour faire durer le plaisir et le comble de l’humiliation fut donné par sa supérieure immédiate qui, à la fin, passait directement par Rej pour gérer la succursale. Rej avisait ensuite son directeur pour lui donner les dernières directives de la succursale en commençant toujours ses phrases par « Ta bosse m’a dit de te dire que… » ce qui contrariait beaucoup le directeur. Mais comme Rej parlait au nom de sa bosse, il baissait la tête et faisait ce que Rej lui disait.
Bien docilement.
Rej était heureux.
Ça se passait pendant les jeux olympiques d’hiver et sur le net, CBC diffusait les parties de hockey que Rej et sa bande aimaient bien regarder. Même sur les heures de travail alors que l’ordi derrière les caisses servait justement à assouvir cette passion. Les employés n’avaient pas le droit, mais le directeur ne disait plus rien. Rej comprit que ce directeur était vraiment cassé quand, un beau matin, ce même directeur décida de remplir une quelconque paperasse en se plaçant devant l’écran d’ordi pendant une partie de hockey. Le collègue de Rej, celui là même qui fut suspendu par le directeur quelques semaines plus tôt, apostropha d’une voix ferme le directeur en lui disant quelque chose comme : « Hey ! Tasse-toi ! Je vois rien ! Va faire ta câlisse de paperasse dans ton bureau ! » Quand Rej vit le directeur s’en retourner piteusement dans son bureau en s’excusant, il comprit que la job était faite, que le directeur était devenue une plante verte.

Deux mois plus tard, changement total de direction dans la division. Voilà un nouveau directeur de secteur qui remplace l’autre, celle qui passait directement par Rej. Il a une réputation grosse comme ça et il vient de la banlieue. Il nomme une directrice de succursale qui a grosso modo le mandat de mater la bande à Rej. Celle-ci fait la fière et elle n’est même pas encore en poste dans la succursale qu’on entend des rumeur à l’effet qu’elle vient là pour faire la loi.
Quelle loi ??
On a des chiffres de vente en progression depuis 5 ans, le boulot se fait tout seul, on attire de nouveaux clients, mais parce qu’on est des adultes et qu’on aimerait se faire traiter en adultes, ça les fait chier. Nous tout ce qu’on veut, c’est qu’on nous criss la paix et qu’on nous laisse faire notre boulot. C’est pas compliqué ! Faut comprendre que les directeurs se tournent les pousses. Il faut qu’ils s’occupent. Alors ils essaient de jouer « les gestionnaires ». Mais la plupart n’ont aucune expérience de gestion et usent de leur poste pour assouvir je ne sais quelle fantasme de domination.
Mais chez nous, ça ne marche pas.
Ça ne marche jamais.
Et notre réputation leur fait peur.
C’est drôle et pathétique à la fois.

La fille, et c’est triste à dire, n’est pas de taille. Rej avise le nouveau directeur de secteur que sa directrice essaie de jouer les gros bras et que ce rôle ne lui convient pas du tout. C’est une petite princesse gosse de riche et enfant roi d’à peine 30 ans qui ne connaît des Haïtiens que ce que le Journal de Montréal lui raconte. Rej lui parle même de la succursale, de sa clientèle singulière, du stress perpétuel qui consiste à servir des gangs de rues qui viennent armés et qui ne rigolent pas toujours, que la seule chose qu’on souhaite, c’est d’avoir un gestionnaire qui puisse comprendre. Rej lui dit même que la dernière directrice de secteur avant lui, passait par Rej. Le nouveau directeur de secteur s’indigne et lui dit «  Jamais je ne passerais par toi pour régler mes problèmes. »
Ok.

Cette fois, on l’a joué zen. En douceur. Une main dans le dos parce que c’était trop facile. On l’a démolie de manière éco responsable, en recyclant ses conneries. Depuis jeudi dernier, est ne rentrait plus. Elle s’était poussée comme une conne. Elle n’est réapparue qu’aujourd’hui pour fermer ses livres, faire les paies et décrisser après l’arrivée de Rej. Le nouveau directeur de secteur, bien en peine, a demandé à Rej de prendre l’intérimaire de la direction de la succursale. Rej a accepté en riant tout bas et en se retenant de lui dire que finalement, il venait de faire pire que ta précédente collègue.

Rej est maintenant payé 19% de plus pour faire 98% moins de travail.
C’est lui qui mène la baraque sans être imputable parce qu’il est toujours syndiqué.
Et sa bande va tout donner pour que ça marche.

Rej est heureux.