mardi 12 janvier 2016

Martin Guerre



À ma très grande honte, je n’avais jamais vu Le Retour de Martin Guerre (Réal. Daniel Vigne, 1982). Ça s’explique un peu. En 1982, date de la sortie du film en salle, j’avais 19 ans et c’est l’année de mon premier logement. Année un peu folle, un peu pauvre aussi et pendant laquelle le cinéma n’était plus ma priorité. Payer le loyer, manger, boire avec les colocs et coucher avec ma blonde passaient en premier, mais pas nécessairement dans cet ordre. Bref, j’avais raté le film en salle et par la suite, par des hasards toujours plus improbables les uns que les autres, j’avais raté les passages à la télé. J’aurais pu louer le film plus tard, dans un club vidéo, mais va savoir, je passais toujours devant la cassette (et plus tard le DVD) en me disant que bof, j’allais me garder ça pour plus tard. Et le temps passe et tu finis par oublier Le Retour de Martin Guerre. Enfin, pas tout à fait, mais c’est loin dans ta caboche. Tu y repenses quand tu vois Gérard Depardieu par-ci par-là dans d’autres films et tu te dis « Ah ouais, merde, Martin Guerre, faudrait bien que je le vois un jour ». Par contre, tu connais par cœur l’affiche du film. Ce triptyque en photos derrière les tronches de Gérard et de Nathalie Baye. Une image qui te ramène au temps de tes 20 ans parce que tu voyais cette affiche placardée partout dans la ville quand tu te rendais à ton cours de dessin au CEGEP du Vieux. Et puis voilà, 34 ans passent et un soir, alors que tu farfouinais sur YouTube à la recherche de quelque chose à regarder pendant que tu te boufferais ton steak et tes frites, tu tombes sur le film complet et 100% gratos.



Le Retour de Martin Guerre, sortie à mes 19 ans, vu à mes 52.



            C’est un très beau film. Il passe facilement le test du temps. Depardieu bouffe l’écran. Mais attends, tous les acteurs torchent solide. T’as envie de marier Nathalie Baye. Une histoire fascinante tirée d’un fait vécu de l’époque (milieu du 16e siècle). La photographie rappelle à bien des égards les peintres de cette période. (Pendant les deux heures qu’a duré ce film, j’ai souvent pensé à la peinture de Vermeer : La Jeune Fille à la Perle.) 



La réalisation est impeccable et franchement, je n’ai pas trouvé de faiblesse dans le film. Ou alors juste le moment où le doute s’installe sur l’identité réelle de Martin Guerre. Mais tu comprends que pour adapter un roman au cinéma, faut parfois tourner les coins ronds. Mais ici, c’est tellement minime que ça s’excuse.

            Y a un volet féministe à cette histoire qui s’est déroulée à la Renaissance. Celle d’une femme qui choisit son propre bonheur malgré le mensonge, le regard des autres et les « châtiments de Dieu ». Je ne peux pas en dire plus si vous n’avez pas vu le film mais c’est vraiment intéressant et ça te donne le goût d’en savoir plus sur la véritable Bertrande Rols.  

            Et puis je vais me coucher parce qu’il se fait tard.

lundi 11 janvier 2016

À bientôt dans les étoiles, Major Tom.

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Y en a comme ça qui s’en vont pour toujours et qui ne pourront jamais être remplacés. Ce sont, à leur façon, des espèces de guides du genre humain. L’art, plus que tout autre domaine, produit ce type de héro. Parce que l’art parle à l’esprit, à la conscience et puise sa résonance dans le mystère des étoiles, dans cet absolu inaccessible au commun des mortels. Ils sont très peu à pouvoir le faire et ils sont encore moins nombreux à pouvoir le transmettre. Ce sont des fous géniaux parvenant à surmonter les obstacles impétueux de la pensée programmée pour aller récolter des fruits qui ne poussent que dans les vergers de l’inexploré.



Le vide ressenti par l’annonce de leur départ vient du fait qu’ils ont remplie ta vie de leurs récoltes répétées faites de musiques, d’images, de couleurs ou de formes ; que même si tu ne les voyaient pas toujours, qu’ils se faisaient discrets parfois ou carrément silencieux, tu les savais toujours là, au-dessus de tes pensées à toi, mijotant quelques nouvelles créations qui t’apparaîtraient tôt ou tard. Ce sont des âmes bienveillantes qui appartiennent à la portion contemporaine de ton humanité. Et quand, en te levant ce matin-là, t’apprends le décès de l’un d’eux, ça te fait comme une lame de couteau qu’on te plante dans le ventre.



David Bowie est mort en ce 11 décembre 2016.

samedi 14 novembre 2015

Paris

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Paris se relèvera parce que Paris se relève toujours.

mercredi 11 novembre 2015

398 rue Saint Honoré

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Le prix moyen pour louer un appartement près du 398 rue Saint Honoré à Paris est de 10,000 . Si je le sais avec autant de précision, c’est que j’ai fais des recherches. Si si ! On trouve tout sur internouille de nos jours. Le problème c’est que je ne cherchais pas nécessairement le prix moyen des appartements de ce quartier, mais plutôt des images du 398 rue Saint Honoré. Ça m’arrive comme ça. Je lis un truc et je vais ensuite me taper des compléments d’informations sur le net. C’est chouette. C’est comme ça que je suis tombé sur ces estimations immobilières. Ça me fait toujours la même chose quand je farfouille dans les livres d’histoire concernant la France et que je vais ensuite picosser sur Google maps. Je suis toujours un peu déçu de ce que je découvre. Un peu comme un Français qui débarque à Montréal et qui s’attend à voir des Indiens avec des plumes et des caribous sur Peel. Mais le 398 rue Saint Honoré, c’est spécial. Je veux dire que le mec qui habitait là de 1791 à 1794 (anciennement 366 rue Saint Honoré), s’il vivait encore aujourd’hui et qu’il verrait le prix du loyer, je crois sans trop me tromper qu’il ferait couper la tête du propriétaire. Tu connais Maximilien Robespierre ? Ben c’est là qu’il a vécu les dernières années de sa vie. À l’époque, l’endroit avait l’air de ça :





Son appartement se trouvait à gauche, à l’étage juste au-dessus de la fontaine. Aujourd’hui, le même endroit a l’air de ça :




Si la photo a été prise du même point de vue, c’est à dire de la porte qui mène sur la cour intérieure, il faudrait supputer que son logement était à gauche, au dessus de l’espèce de verrière qui surplombe la cour. Autrement dit, on ne le voit pas vraiment. Mais on le devine. Robespierre a marché dans cette cour intérieure, ne serait-ce que pour se rendre à l’Assemblée.



Si l’on prend un peu de recul et que l’on photographie l’endroit en face mais de l’autre côté de la rue, devant la porte qui donne sur la cour intérieure, ça donne ça :





Tu rentres par là et tu te retrouves dans la cour intérieure. En principe, l’ancien appartement de Robespierre se trouverait à gauche derrière cette porte. Il sortait donc par ici et allait signer des décrets qui allaient donner des têtes à couper. Je résume et je tourne les coins ronds, je le sais. Il n’a pas fait que ça. Mais c’est tout de même par là qu’il est sorti pour aller mettre sa signature au bas d’un document qui allait condamner Danton, Dumoulin (son vieux pote) et les autres.



T’as une boutique aujourd’hui au 398 Saint Honoré. Tara Jarmon que ça s’appel. Des vêtements. J’sais pas. J’enlèverais ça. Oui bon, d’un autre côté, s’il fallait préserver comme à l’origine chaque logement de cette ville où un personnage célèbre y a résidé, ce ne serait plus une ville, mais un sanctuaire. 

mardi 10 novembre 2015

Encore sur le balcon, repoussant l'hiver d'autant.

10 novembre, matin. Café et laptop sur mon balcon arrière. Soleil, pas de vent, confortable. 
Voilà, c'était pour la petite histoire. 

dimanche 8 novembre 2015

Ruelle d'aujourd'hui

Ça c’est dans ma ruelle, mais la semaine dernière en revenant de la boucherie où j’avais acheté deux poitrines de poulet marinée (tomates, basilic et j’sais plus quoi). Elle est belle ma ruelle à l’automne, juste avant que les feuilles ne tombent. Elle prend un je ne sais quoi de nostalgique dans ses couleurs. C’est romantique aussi. Si j’étais réalisateur de cinéma, je verrai bien tourner la dernière scène de mon film là, en plein là, sous cette voûte de couleur jaune qui se décline sous tous les tons. La caméra serait placée exactement au même endroit où j’ai pris la photo. L’image serait mieux cadrée, bien sûr, parce que j’aurais une équipe de professionnels. Faut pas croire que je ne sais pas comment ça marche, même si je n’ai jamais fait de cinéma. Bon, voici le petit bout de scénario pour cette scène :

Scénario : Un homme marche seul dans une ruelle tapissée de feuilles mortes. Il fait dos à la caméra. Il porte une valise à la main, une grosse valise qui laisse penser que tous ses effets sont dedans. (Note pour le directeur du casting : Trouver un très bon acteur capable de faire ressentir un départ vers un ailleurs définitif juste en marchant et en le filmant de dos... Mmmhh… on a ça dans le bottin des artistes ?) On sent dans son attitude générale qu’il y est contraint, forcé, qu’il préférerait rester. On voit alors une femme passer devant le champ de la caméra et courir vers l’homme. Elle le rejoint alors qu’il vient d’atteindre la canopée de feuillues. Elle se place devant lui et l’empêche de faire un pas de plus. Elle pleure. Se jette dans ses bras. Il laisse tomber sa valise et l’enlace. La caméra recul, recul, recul jusqu’à ce qu’ils ne deviennent plus qu’un point flou. Fin !

Me reste plus qu’à écrire le reste du scénario.

Cette ruelle me ramène souvent à celle de ma petite enfance sur la rue Berri. Mais comme j’écrivais l’autre jour, elle a ceci de différent que les enfants ne l’accaparent pas comme nous le faisions à l’époque. On dirait un espace désertée, comme un terrain de jeu abandonné parce que devenu désuet. Les enfants restent dans leur petite cours arrière et ne s’aventurent dans la ruelle que si les parents y sont pour faire la garde.
Étrange évolution sociale dont la base est une sorte de paranoïa parentale qui ampute dès le plus jeune âge la découverte de l’autre, la mixité, l’échange, l’intégration. Quand cela se fait, c’est toujours sous haute surveillance parentale, comme s’il existait un danger sous-jacent dans l’action naturelle d’aller vers l’autre.
À mon époque, la ruelle était un lieu où les parents abandonnaient volontiers leurs enfants et celle-ci, la ruelle, devenait du même coup leur premier laboratoire social. Mes premiers pas dans cette société, je les ai faits dans la ruelle, avec les autres enfants et sans surveillance des parents. Ou à peine. Nos parents n’étaient pas pour autant des inconscients. Ils étaient simplement moins paranos que ceux d’aujourd’hui.
Décidément, je n’aime pas les jeunes parents d’aujourd’hui. Non, attends, je reprends ma phrase : décidément, je n’aime pas la manière dont les jeunes parents d’aujourd’hui élèvent leurs enfants. Cette peur-panique quasi permanente qu’il se passera quelque chose de grave dès lors qu’ils auront leurs yeux ailleurs que sur leur progéniture, ça ne peut donner qu’une génération de peureux. 
Mais je peux me tromper. Je me trompe souvent. N’empêche, je ressens souvent dans le regard de ces parents paranos une méfiance quand je passe par la ruelle avec mes sacs d’épicerie et qu’ils sont tous là à scruter à la loupe le moindre déplacement de leurs marmaille d’enfants du Plateau Mont-Royal dont, forcément, 50% au moins possède la nationalité Française. Je suis un voisin potentiellement suspect parce que pas d’enfants en bas âge. Du coup, on hésite à me parler. Si, si ! Je vous le dis, c’est comme ça. Je ne fais pas partie de la petite société parentale de la ruelle. Et quand un ballon du hasard tombe dans ma cours, il n’y a rien qui m’insulte le plus que d’entendre une voix de maman paniquée qui crie à son petit fifon « Ne va pas là Logan ! (Ou Dylan, ou Matisse, ou Victor) », comme si j’allais assurément bouffer tout cru son jeune surprotégé au prénom de snob.
Si, par une sorte de cocasserie quantique, il était possible de voyager dans le temps et que demain matin, Logan, ou Dylan, ou Matisse, ou Victor se retrouvait dans ma ruelle à moi dans le bon vieux temps de mon époque, assurément qu’avec mes potes de la ruelle, on lui fendrait le crâne à grands coups de Sherwood PMP pour lui apprendre ce que ça coûte que de porter un prénom de fif.
L’apprentissage social, c’est aussi ça.

samedi 7 novembre 2015

Réchauffement


Juste pour la forme, j’écris ces mots sur mon balcon arrière, assis su ma chaise comme en été malgré le chiffre 7 accolé à ce mois de novembre. C’est frais, mais pas froid. Je n’ai qu’un pull de laine. Si ce n’était du vent, le soleil serait largement assez chaud pour qu’on y soit parfaitement bien.
C’est sans doute la dernière fois de l’année que je peux faire ça. L’hiver tarde, on aime ça même si ça nous inquiète un peu.
Faut l’avouer, ce n’est pas normal. Mais bon, voilà, je l’ai fais. J’ai écris sur mon balcon un 7 novembre en étirant de force une saison qui est décidément trop courte, même avec son réchauffement.