samedi 17 octobre 2015

Y mouille en Tabarnak




C’est pour mon expo en novembre. Ce n’est pas terminé. Il manque le texte dans la bulle ainsi que quelques petits machins de finition ici et là. Mais en gros, ça va donner ça. Le mec, y va dire « Y mouille en Tabarnak ». Ben ouais, pourquoi pas.

Peut-être parce qu’y mouille en tabarnak partout sur la planète. Sur la condition humaine, sur les glaciers, sur l’espérance de vie de toutes espèces ici-bas.
Y mouille sur la liberté d’expression, sur la liberté point à la ligne. 
Y mouille sur l’intelligence, sur l’amour et même – et surtout devrais-je dire – sur l’espoir.  

Cette conversation avec cette jeune cliente d’à peine 20 ans l’autre jour. Cette peur qu’elle avait de faire un enfant dans ce monde de malades qui se déglingue et qui part en couilles. Me parlait de l’élection de lundi prochain, de cette supposée démocratie qui fait élire des partis politiques détestés par plus de 60% de la population. Disait préférer la proportionnelle, comme en France. Plus cynique qu’elle, je répondais que ça ne donnerait pas plus de démocratie puisque le peuple n’a pas d’avantage son mot à dire. T’as tes 3 ou 4 candidats tous appuyés par la finance et faut choisir là-dedans.
Faudrait tout faire péter que je lui explique. Tout faire péter au sens figuré je veux dire. Ne pas aller voter par exemple, ne pas consommer (ou le moins possible) et se trouver une journée par semaine où tous les travailleurs du monde resteraient chez eux. D’une claque, tu retires tout ton fric de ta banque. Tu ne fais plus jamais le plein de ta voiture, mais seulement qu’à moitié. (C’est prouvé que les pétrolière se retrouveraient du jour au lendemain avec des surplus impossibles à stocker). Tu fais ça en masse et je te jure que les gouvernements trembleraient. Oui bon, c’est impossible aujourd’hui, mais c’est possible demain. La certitude de l’improbable comme disait Stephan Hessel.
Elle acquiesçait gravement avant de me relancer sur les horreurs de l’alimentation. Ben oui, c’était ce genre de conversation où t’es content de trouver quelqu’un qui partage tes idées et t’essais justement d’en balancer un paquet juste pour voir jusqu’où l’autre va te suivre. Du coup, elle me parla de ces bœufs d’élevage goinfrés aux hormones de croissance, de ces tonnes de légumes qui ne se rendront jamais à l’épicerie parce que jugées inesthétiques pour la commercialisation (t’as déjà vu une carotte croche chez l’épicier ?), de la quantité de sucre ajoutée dans la transformation des aliments, des additifs de conservation qu’on ne sait pas trop ce que c’est, me parla aussi de Monsanto, de Gargill, de Nestlé. De ces tueurs à cravates qui créent des famines en spéculant sur le prix du blé, du riz et fort probablement bientôt sur celui de l’eau. 
Entre tout ça, elle souriait parfois. Ça faisait comme une cicatrice mouvante sur son visage. Elle souriait comme on sourit même dans la résignation. C’est son époque, elle n’a pas connu mieux.

Elle fait preuve de lucidité quand elle se questionne sur la pertinence des mettre des enfants au monde. Pas certain mois non plus que je ferais des enfants aujourd’hui.

Ces jeunes nés en 1995 sont de la première génération à prendre conscience qu’ils sont un peu condamnés d’avance. Je veux dire, qu’ils ne peuvent plus espérer que les hivers redeviennent de vrais hivers. Qu’on ne peut plus reboiser des forêts dévastées. Qu’on ne peut plus stopper le réchauffement de la planète. Qu’on ne peut plus compter sur nos gouvernements.
Les premiers vrais sacrifiés de nos merdes passées, ils ont 20 ans aujourd’hui. Leurs enfants termineront le siècle en héritant des conséquences de nos abus. Et c’est déjà commencé.

Je sais, ce n’est pas drôle. Même si c’est encore drôle par moments. Quand par exemple tu vois les Harper Mulcair, Trudeau ou Duceppe se la jouer en sauveurs, qui te promettent qu’ils feront tous « les choses autrement » alors qu’ils sont tous les putes du même système de merde. Pas un pour te proposer une réforme électorale par exemple, un vrai système qui donnerait le pouvoir au peuple, bref, une vraie démocratie avec une constitution qui obligerait les élus à être redevable au peuple. Un système où il y aurait un conseil-citoyen de surveillance et qui aurait le pouvoir de démettre les élus de leur fonction en cas d’abus, de mensonge, de fraude, enfin, pour tous les cas où l’élu ne remplierait pas ses fonctions de veiller au bien commun de la population. Un conseil-citoyen qui fonctionnerait un peu comme un jury, choisi aux 4 ans par tirage au sort parmi toute la population de 18 ans et plus. Ce conseil-citoyen apolitique d’au moins 60 membres (61 pour avoir une majorité +1) serait un véritable chien de garde de nos politiciens et, du même coup, de notre démocratie.
Impossible ? Aujourd’hui oui, mais demain non. La certitude de l’improbable comme disait Stephan Hessel.
Mais de toute manière, ça risque d’être déjà trop tard.
Parce qu’y mouille en Tabarnak.

dimanche 4 octobre 2015

Barbouillage coloré.



Presque terminé. Me suis amusé en laissant aller ma petite main sur la toile. Me fais plaisir en replongeant sans ménagement dans mes passions du temps jadis. J’en ai d’autres. Je vais vous montrer tout ça si vous êtes gentils.

Famille recomposée.


La sécheuse ronronne dans la cuisine. Son ronflement mécanique donne à mon logement une musique confortable. Ajoutons à cela l’odeur des potages de ma coloc et l’on comprendra que c’est une belle journée passée avec une présence quasi familiale. En fait, elle et moi, c’est une famille recomposée en quelque sorte. Mais sans les soucis habituels propres à tous les couples du monde entier.

Soleil d'octobre

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Les deux pieds sur la rambade de mon balcon – tout nus mes pieds – en ce 4 octobre de l’an de grâce 2015. Le soleil fait de son mieux et c’est bien apprécié.

Merci soleil d’octobre.

Un écureuil gris gros comme ça passe dans la ruelle au même moment où j’écris ces mots. Sans doute l’un de ceux qui ont passé l’été à venir bouffer mes tomates. Les écureuils du Plateau Mont-Royal sont les plus voraces de leur espèce.

Enculés d’écureuils.

Deux petits moineaux sur la rampe d’escalier, celui en fer forgé qui mène aux étages du dessus. Ils croient sans doute que je vais leur refiler du pain. J’ai pas de pain. J’ai juste un café pis des clopes et je ne crois pas qu’ils apprécieraient.

Désolé petits moineaux.

La ruelle est crissement calme malgré ce dimanche avant midi plein de soleil. J’habite une section du Plateau très familiale où il y a plein d’enfants. Si nous étions 40 ans plus tôt, la ruelle serait en ce moment envahie de mioches. Mais aujourd’hui, les kids ne jouent plus dehors et ça me renverse. Ici, dans cette ruelle, tu ne vas les voir qu’en fin d’après-midi quand les parents reviennent du boulot. Et justement, ces parents modernes me déconcertent aussi. Sont incapables de laisser leurs kids jouer sans surveillance ni supervision. Ce qui fait que vers les 17-18h, chaque jour de la semaine, d’avril à octobre, t’as autant de parents que d’enfants dans la ruelle. Qu’ils aient 4 ans, je comprends, mais ici, l’âge moyen de ces enfants est d’environ 7 ou 8 ans. À 5 ou 6 ans, je parcourais tout seul et sans surveillance les grands espaces de ma ruelle de la rue Berri. Pas que moi, mais aussi tous les enfants du quartier. Quand je vois les parents d’aujourd’hui surveiller à la trace les moindres déplacements de leurs enfants dans la ruelle, ils me font penser à ces propriétaires de chiens que tu vois dans les parcs à caca de chiens. Même routine de robot abrutis par cette société de merde. Ils sortent leurs enfants comme les autres sortent leur chien. Attend de voir quelle génération de dépendant affectif ça va nous donner. Une laisse avec ça ?

samedi 3 octobre 2015

Ma coloc


Ma coloc est la plus géniale du monde. Je la vois devenir jour après jour une figure incontournable du théâtre québécois, je la vois se faire encenser par Michel Tremblay, par Radio Canada, par le Devoir. Mercredi, on va savoir si elle est en liste pour le prix du Gouverneur Général. Mais malgré tout, elle persiste à plier consciencieusement mes chemises et mes bobettes qui sortent de la sécheuse. On vient de se faire une journée de bouffe où l’on a transformé nos montagnes de tomates en coulis ou en sauce à spag. On a canné ch’sais pas combien de pots de potage de courge avec des petits lardons dedans. On a fait des machins avec des carottes. Et puis une tonne de pesto avec notre basilic. Elle y rajoute du parmesan frais dedans. C’est mortel tellement c’est bon.
J’fais ça avec elle dans ma cuisine pendant que son cell vibre. Elle a les deux mains dans les tomates pendant qu’elle reçoit le texto. Elle se les essuies avec la lingette mouillée qu’on a laissé là pour ça d’ailleurs, regarde le message, et revient aussitôt aux tomates comme si de rien n’était.
-       C’était quoi ?
-       Radio can.
-       Ils voulaient quoi ?
-       Ils m’invitent à une émission.
-       Tu ne réponds pas ?
-       Rej, j’ai pas le temps. Faut terminer nos tomates.
Vous ai-je dis que j’adore ma coloc ?