mercredi 29 janvier 2014

La 68


Soirée avec trois collègues à regarder la partie de hockey et à parler du boulot. Chouettes potes qui parlent de solidarité et du principe d’équipe. Depuis notre dernière victoire, depuis qu’on a réussi à faire renverser une suspension en 5 petites journées, mes collègues n’ont jamais été aussi soudés. Ils sont fiers de ce qu’ils ont accompli. Moi aussi je suis fier. Fier d’eux. Heureux de les voir se tenir debout sans la moindre peur. Ils n’ont plus peur.
Je n’ai même plus rien à dire, je n’ai même plus rien à faire, ce sont eux qui proposent et qui agissent. Ils me tiennent au courant des actions prises dans telle ou telle succursale. J’ai donné l’exemple, ils suivent avec une assurance qui fait plaisir.
Ils viennent de comprendre qu’ensemble, tous unis, nous sommes une force terrible.
Et puis surtout, ils viennent de comprendre que les patrons chient dans leur pantalon de nous savoir unis. Nous sommes une division à part. Notre spécialité est de dégommer des directeurs qui veulent jouer les gros bras. Notre nouvelle cible est le directeur qui a suspendu Sam. Notre technique est de le faire suer, certes, mais aussi et surtout de faire suer les autres directeurs de la division en leur expliquant que tout ça est de la faute de XYZ, le directeur qui a suspendu Sam. Tant que XYZ restera dans la division, vous allez tous payer. Forcément, ça créé des frustrations chez les autres directeurs. Ils en viennent à détester XYZ. C’est le but et ça finit toujours par marcher.
Keep it simple stupid !
T’as un problème avec un directeur ? Vise tous les directeurs.
Sam, celui qui fut suspendu, est devenu un leader. Il va de succursale en succursale répandre la bonne nouvelle aux autres directeurs. Pierre, tout timide et low profile, répond maintenant aux directeurs que ses efforts de travail sont à la mesure des heures données sur le terrain et du respect donné par XYZ aux employés. Stef est un roseau qui plie, mais qui ne casse jamais. T’as beau taper dessus, il finira toujours par se redresser avec le même sourire baveux sur le visage.
Belle équipe.
Belle soirée.

On a bu raisonnablement, sans excès, sans débordement. Sam revenait sans cesse sur sa suspension. Avant d’arriver à Montréal-Nord, Sam travaillait à Laval. Le seul black dans sa division. Quand des clients blacks entraient dans sa succursale, les directeurs les suivaient pas à pas. Black = Voleur, c’est bien connu. À Laval, Sam se mangeait des mesures disciplinaires pour des retards de 30 secondes tandis que les autres employés blancs pouvaient se taper des retards de 30 minutes sans problème.
Ne vous offusquez pas, c’est encore comme ça au Québec.
En arrivant dans ma division, Sam a compris que ce n’était pas la même game. Les directeurs qui donnaient des mesures pour des retards de 1 minute, ils sont tous morts. Gracieuseté du Che et un peu de moi.
Ce soir, dans ses conversations, Sam revenait sans cesse sur sa suspension. Suspension donnée par un directeur venu de l’externe, un ancien de chez Maxi. Un type qui ne m’a pas écouté quand je lui ai dit de ne pas faire ça. Un type qui n’a pas écouté les autres directeurs de la division qui lui disaient de ne pas faire ça. Un type qui n’a pas écouté le Che qui lui disait de ne pas faire ça.
Il l’a fait quand même.
Sam n’en revenait pas quand il m’a vu mettre mon poing sous la gueule du directeur à la lecture de la lettre de suspension ; ne comprenait pas quand j’ai renversé le chariot dans l’air d’entreposage ; n’en revenait pas de voir des collègues qu’il ne connaissait pas arriver en succursale en tant que clients et aller directement dans le bureau du directeur pour l’engueuler et lui donner un chiard de marde. Sam n’en revenait pas de voir des collègues d’ordinaires timides faire du zèle pour retarder le travail. 5 jours ! 5 jours et ils ont pliés l’échine.
XYZ a compris qu’il venait de faire une gaffe.
Sam a compris qu’il était dans une division à part.
Les deux viennent d’apprendre.
Mais le plus heureux des deux, c’est Sam.
L’autre est en ce moment en enfer.
On le cible comme une proie. C’est une bête blessée.
Ses jours sont comptés. 

mardi 28 janvier 2014

slam


Ça faisait longtemps que je n’avais pas mis les pieds dans une soirée de poésie. Ça faisait au moins… oui bon, je préfère ne pas compter. Ça me déprimerait trop. Passé une belle soirée à écouter des gens rimer leurs angoisses ou leurs bonheurs. Mais plus leurs angoisses, because poésie oblige. Ça va avec comme dirait le poète.
Tous les clichés du genre étaient là. Ce qui est toujours réconfortant. Ça fait du bien de voir que dans ce milieu là, rien ne change vraiment avec les années.
Ah, mais si quand même. Certaines choses changent un peu. J’ai trouvé les gens moins prétentieux qu’à l’époque de mon Cégep. Moins chiants et surtout beaucoup moins constipés de l’humour, cette chose que les poètes de ma jeune vingtaine exécraient. Parce qu’il y avait des moments franchement drôles ce soir. J’ai adoré ma soirée.
Désacraliser le verbe qu’on déclame à micro ouvert, j’aime bien.
Il y avait tout ce qui faut pour faire un beau docu sur le sujet. Même l’incontournable gros poète à cheveux longs et grisonnants, chapeau noir callé sur la tête, foulard rouge, l’Aristide Bruant de Rosemont-Petite-Patrie qui y va de ses textes engagés sur ce poète iranien emprisonné à vie pour une rime de trop. Sa parole enragée faisait vibrer des mots qu’on voyait venir de loin « Toi mon frère poète… » Sa voix tonitruante rendait hommage au courage du poète maudit face à ses bourreaux incultes. Celui-là, on le devinait facilement frustré de ne pas être né au 19e siècle parce que ça ne dérange plus personne aujourd’hui de se couper une oreille pour l’offrir à sa pute préférée après une cuite à l’absinthe. Oui bon, je me moque, mais j’ai quand même du respect pour ces gens. Même que l’idée d’aller faire un fou de moi en février prochain, lors du prochain slam session, me démange ce soir.

Si j’y suis allé, c’est pour faire plaisir à MP qui organise ces soirées. Ça se fait toujours les lundis alors que moi, les lundis, je travaille. Ou alors j’ai des assemblées syndicales. Ou alors j’ai des machins de réunions avec mon délégué syndical qui ne sont que des prétextes pour refaire le monde à notre manière. Du coup, j’ai tout raté ses soirées de slam qu’elle organise toute seule comme une grande. D’ailleurs elle est grande, aussi grande que moi, ce qui n’est pas désagréable du tout. Elle commençait sérieusement à me mettre de la pression. Pas méchamment, mais, disons gentiment. À la blague. Au chantage. À la culpabilité bon enfant. MP, c’est ma pote du hasard rencontrée sur un fil de discussion politique lors du printemps érable. Ma bohème préférée à qui il fait bon donner des cours de conduite pour qu’elle puisse passer d’un seul coup son permis de conduire. Ce qu’elle vient d’ailleurs de faire de main de maitre. Très bon prof je suis avec ma Tercel toute pourrie.

MP slam et poétise, donne de son temps pour les femmes en prison, pour les mecs qui survivent à la Maison du Père, pour celles-là et ceux-ci que la société pousse du pied dans ses marges fétides où croupissent les victimes de l’efficacité sacralisée. MP n’a pas de boulot fixe, à part le fil tendu au-dessus d’un vide sans filet sur lequel elle funambule sa vie. Pigiste de la vie, elle glane les restants de bonheurs tout chauds méprisés par les aveugles de la liberté consommée à crédit. 
Moi y en a vouloir des MP partout dans le monde.
Le monde serait plus juste et plus beau. 

Genre,un dieu?


T’as 17 ans et t’écris des chansons. À 18 ans, tu deviens connu dans ton pays. À 20 ans, tu deviens connu dans le monde entier. À 30 ans, t’es déjà devenue une légende. T’es un Beatles mec. Tu serais sur la planète Mars qu’on te reconnaitrait. Comment t’arrives à gérer ta vie ? T’as 70 ans, et les autres êtres humains te prennent encore pour un extraterrestre descendu du ciel pour apporter je ne sais quoi de divin.

dimanche 26 janvier 2014

Album photos


Bon, si vous voulez bien, on va se faire un petit trip de photos, question de faire bouger un peu les pages de ce blogue. Je préviens tout de suite que je ne suis pas photographe, même si j’aime bien taquiner l’image à l’occasion.
Photos sans prétention, je chasse les images comme je griffonne mes petits dessins. Pour m’amuser et pour saisir l’instant présent.
Bon, on y va ?



Dans la ruelle derrière mon café préféré. Des ombres et des lumières qui filent ou qui stagnent. Un coin de la rue Beaubien un soir où l’hiver avait décidé de se pointer le nez. Le Mousse Café est un refuge essentiel en hiver. Et en plus, les serveuses sont toutes jolies.




Dans la ruelle derrière les bureaux du syndicat. Je trouvais que la scène ressemblait à l’un de ces films de SF paranoïaque nihiliste. Genre Blade Runner mais en version Bloc de l’Est. Y a une poésie dans cette image, mais je ne vois pas laquelle.




Escaliers extérieurs chez Geneviève après la première neige. Quand je vais chez elle, c’est sur le balcon arrière qu’on va fumer nos clopes. Gen ne fume pas dans sa maison, ce qui n’est pas une mauvaise idée quand on y pense. Mais l’hiver, c’est chiant. Mais après la deuxième bouteille, et si j’insiste un peu, on fini toujours par se les fumer sous la hotte de la cuisinière. Mais dès le lendemain, elle m’en veut toujours parce que ça sent dans la maison.
Anyway, je trouvais chouette cette image du noir et blanc et de l’ombre. Dommage que je ne sois pas un vrai photographe.




Quand mon pote s’est fait suspendre pour avoir refusé de servir un client raciste, on a été fêter la chose. On a bu à la primauté du respect humain sur le capital, à la résistance des justes, à nous, les rêveurs qui croient encore en un monde meilleur.




Encore sur le balcon chez Geneviève. C’était l’automne. J’adore les ruelles de Montréal.





Non, ce n’est pas un signe cabalistique. Ce n’est pas non plus un symbole gothique ou une croix celte. C’est juste une marque de palette de plastique sur le plancher de l’air d’entreposage de ma succursale. Chouette non ?




À la pêche cet été, à ce lac dont j’ai oublié le nom et où je devais faire un peu de portage dans la forêt, je suis tombé sur ce tapis de mousse. La photo ne rend pas l’éclat époustouflant du vert. Mais bon, je partage quand même.