jeudi 28 mars 2013

Wesh (N'Amal) - Rachid Taha



Écoutant le dernier Rachid Taha. Cette voix que j’aime dans ces mots que je ne comprends pas. J’ai une relation particulière avec ce chanteur algérien. Il vient me chercher, allez savoir pourquoi. Ça ne s’explique pas, c’est comme ça. En fait oui ça s’explique. 
J’ai aimé pour la première fois en écoutant ça : 





Ya Rayah, c’est l’histoire de tous les exilés du Maghreb. C’est un hymne. Fallait entendre la foule algérienne réagir quand il a entonné cette chanson lors du spectacle de clôture au Festival de jazz il y a 4 ou 5 ans. Une vraie folie. Un soir d’été, mon pote Marocain est venu me retrouver au chalet après son travail. Le lendemain, nous allions à la pêche. En arrivant au chalet, il téléphona à sa femme pour lui dire qu’il était bien arrivé. Mais au même moment, dans mon lecteur CD, c’était cette chanson qui s’est mise à jouer. Je l’ai entendu dire à sa femme « Attends... attends, il y a Ya Rayah qui joue... J’te jure, faut bien venir à Sainte-Émélie-de-L’Énergie pour entendre ça... j’te jure!» 



Et puis juste comme ça, essayer de ne pas vous trémousser en écoutant cette chanson. C’est gratuit. 




samedi 23 mars 2013

Une phrase dans un rêve


Un rêve fucké qui m’a réveillé en sursaut vers les 4h du matin. Je n’ai aucun souvenir de mon rêve, sinon qu’une phrase venue de je ne sais où et qui me collait au cerveau : 

LE TEMPS EST UN LONG MONOLOGUE

Ça veut dire quoi ça? 
J’sais ben pas. Mais c’est tout ce qui me reste de mon rêve. 

vendredi 22 mars 2013

Comment le décrire?


Le décrire? 
Je dirais que c’est une force tranquille. 
Un guide infaillible. 
Une lumière qui réchauffe. 
Une présence qui apaise. 
Un ami fidèle. 
Un exemple. 
Une idole. 
Une bonté qui pense. 
Un sourire qui fait croire en Dieu. 
Ou à la limite à la beauté de la vie si tu ne crois pas en Dieu. 
Un protecteur. 
Un sage. 
Un juste.
Qui donc? 
Mon père. 

Le gros méchant loup


Il devait être 17h quand j’ai décidé de m’arrêter à cette nouvelle succursale qui est en fait le jumelage de deux précédentes. Hasard ou coïncidence, c’est l’ouverture officielle et il y a là tout le gratin patronal réuni au grand complet. Moi je n’y suis que comme client et pas du tout comme élément syndical. N’empêche, de voir toutes cette agitation, ces ballons soufflés à l’hélium, ces dégustations, ces petits fourres, ces belles robes de directrices, ces belles cravates de directeurs, ça me donne le goût de rester et de me mêler à la fête. Question de mettre un peu de stress juste en déambulant entre les allées et à piocher dans les amuses-gueules. Je reconnais un collègue et je vais papoter un peu avec lui. Arrive la directrice de la succursale, toute nerveuse à cause du gratin et qui se demande bien c’est qui cette grande asperge blonde et mal rasée qui parle avec un de ses employés et qui l’empêche du même coup de faire son boulot. À la manière qu’elle a de me dévisager, je sais que mon visage lui dit quelque chose, mais elle n’ose pas trop se compromettre. En me présentant, je vois justement les traits de son visage qui dessinent une curieuse expression. De toute évidence mon nom provoque en elle un sentiment qui hésiterait entre une nervosité soudaine et un coup de masse sur la tête. Du genre «Ah non! Pas lui là, maintenant, pendant que ma succursale est remplie de patrons mur à mur!» En voilà une autre qui a entendu parler de moi et qui me croit sociopathe, mangeur de viande humaine et accessoirement syndicaliste. Je ne dis pas que c’est désagréable comme impression, mais vient un moment où ça commence un peu à virer au ridicule.  Je veux dire que la fille, elle ne me connaît même pas! Je n’ai jamais travaillé avec et je n’ai jamais eu à intervenir dans ses succursales. Elle ne me connaît que de nom. 
Je répète : que de nom! 
Juste pour en rajouter une couche, après m’être présenté et voyant sa réaction, je lui lance avec le sourire «Oui, c’est moi le gros méchant loup» Pour être gentille et pour bien me mettre à l’aise, elle dit «Ah, mais tu sais, ce n’est pas ce que ta directrice dit de toi» autrement dit, à part pour ma directrice, tous les autres directeurs disent que je suis vraiment le gros méchant loup. 
Pour le tact et le doigté, on repassera. 
Elle nous laisse et s’en va vers d’autres aventures quand au même moment, elle voit arriver vers elle une autre entité très inquiétante du syndicat : mon pote Dom-Dom, poings de béton et coeur tendre. Gros sourire, genre «bonjour la directrice, je m’en viens faire mon tour pour voir s’il n’y aurait pas des griefs à déposer pendant ta petite fête d’ouverture officielle» Ça rend toujours les directeurs très nerveux ce genre de visite syndicale dans un moment comme ça. N’empêche, je suis très content de le voir mon pote Dom-Dom. Ça faisait un bail qu’on ne s’était pas vus. À nous deux, et malgré la foule de directeurs dans les allées, on a qu’à se promener tranquillement pour voir le plancher se dégager devant nous. 
C’est chouette. 
Personne ne nous donne la main, on nous évite, on fait comme si on ne nous avait pas vus. Dom-Dom jubile. Il adore l’effet qu’on provoque. Outre les salariés très contents de nous voir, les seuls qui viennent nous saluer ce sont les directeurs de nos propres divisions, ceux qui ont à travailler avec nous. 
On reste là combien de temps? Deux heures. Deux longues heures à voir des têtes de directeurs se tourner subrepticement vers nous pour voir si on est encore là. En plus, c’est une succursale qui n’est même pas dans ma région. Le Che n’est pas avec nous, mais s’il était là, il me dirait «c’est ça le respect mon chum! Ça veut dire que t’as fait ta job comme il faut» 
C’est chouette. 
C’est moi le gros méchant loup. Je mange de la viande de directeur au petit matin. Et avec Dom-Dom avec moi, j’ai l’impression de mesurer 8 pieds de haut.

samedi 16 mars 2013

L'espoir


Ça se passait à la station-service près de mon boulot. La commis à la caisse se démenait pour synchroniser les pompes à essence, servir les clients à sa caisse, répondre au téléphone. Quel âge elle avait? 17 ans? 18 à tout casser? Premier boulot sans doute. Ou alors le deuxième. Ou bien le troisième, on s’en tape. Ça n’a pas vraiment d’importance dans ce qui va suivre. À côté d’elle, avec son manteau sur le dos, impassible et gueule de porc, son patron qui lui donnait les tâches à faire pour la soirée. Une longue énumération qui n’en finissait plus. Bien sûr, elle était seule et le resterait jusqu’à 23h. Manger? Si t’as le temps et juste quand il n’y a pas de client. Autrement dit, tu vas jeûner ma petite. Une envie de chier? T’as pas le droit d’aller chier sur les heures de travail. Attends ta pause. Mais comme le commerce doit toujours rouler, eh! ça veut dire que t’as pas de pause. Ou seulement après 23h, quand t’auras terminé ton quart de travail. (Il était 17h) 

Ce n’était pas dit comme ça, mais même avec des mots mieux choisis, le mépris était le même.

Gueule de porc je disais. 

Boulot de merde. Salaire minimum et exploitation maximum. L’enculé continuait sa litanie patronale tandis qu’une puissante envie de lui cogner le crâne contre le coin du comptoir me chatouillait l’estomac. Et puis ensuite, juste comme ça, pour le plaisir, le terminer proprement à grands coups de talon sur la mâchoire. Question de lui apprendre le respect. 

De toute manière t’as pas le choix cocotte, t’es une femme, t’es noire et en plus t’es étudiante. Tu vois le tapis absorbant en caoutchouc juste devant la porte d’entrée? Dans cette société, ton échelon social se trouve juste en dessous. C’est quoi cette idée d’être noire? Et femme en plus! Non mais tu cours après le trouble! Tu veux vraiment avoir une vie de merde? Même mon chien policier qui va te servir de garde de sécurité pour la soirée est mieux traité que toi. Il a droit à une caresse et en plus, il bouffe gratuit lui. C’est parce qu’il ne coûte rien et il est plus efficace que toi. Il donnerait sa vie pour moi. Tandis que toi, ta vie, ben ma vieille, faut que je te paie un salaire pour l’avoir. Ça me fait chier et faut me comprendre. T’es gentille et très compétente, mais t’es quand même un mal nécessaire. Un irritant incontournable. Une obligation désagréable. Un dangereux dérapage contre nature issu des combats menés par la méchante gauche depuis les 150 dernières années. Une femme noire étudiante qui a des droits! Mais dans quel monde vivons-nous? L’esclavage, ce n’était quand même pas une si mauvaise idée que ça quand on y pense. Pour la libre entreprise en tout cas, ça avait du bon. 

Gueule de porc je disais. 

La gamine, trop occupée à servir les clients, acquiesçait machinalement aux directives de son patron sans vraiment y porter une attention trop soutenue. Derrière elle, un poste de radio donnait les dernières nouvelles de la journée. Une voix monocorde annonçait qu’à la manif qui se déroulait au centre-ville, les policiers procédaient au moment même à des arrestations de masse. Un peu comme on en voit dans ces pays fascistes. D’ailleurs, la voix de la radio parlait d’une déplorable vitrine cassée, ce qui légitimait du même coup les policiers à venger cette même vitrine par le matraquage en règle de centaines d’êtres humains qui tentaient d’exercer un droit démocratique pourtant reconnu dans je ne sais plus quelle farce écrite qui traite de liberté d’expression et de droits communs. Un machin signé par un tas de pays démocratiques qui matraquent  démocratiquement (c’est à dire au hasard) de sombres gauchistes qui revendiquent le droit démocratique de manifester pour une vie meilleure. En entendant ça, une lumière s’allume dans la pupille de la gamine qui monte aussitôt un tout petit peu le volume du poste de radio. Mais le patron-gueule-de-porc lui, lève le sourcil. «Encore ces osties d’étudiants! Tabarnak, kess ki zattendent pour toutes les câlisser en prison! Ferme la radio!»  La gamine, sans rien dire, ferme le poste de radio. Mais j’ai vu dans ses yeux, l’espace d’une fraction de seconde, et je le jure, une sourde colère qui était beaucoup plus forte que la mienne, moi, homme blanc et plus du tout étudiant depuis longtemps. 

Il y a donc de l’espoir. 
Il est juste en gestation. 

jeudi 7 mars 2013

Chavez, suite

Il dit grosso modo la même chose que moi hier. Mais en mieux et en moins aviné.

http://quebec.huffingtonpost.ca/jules-falardeau/lettre-a-mon-vieil-ami-chavez_b_2815440.html

mercredi 6 mars 2013

Mauvais sort


Une collègue Haïtienne. Jeune et belle, à la mode de son âge. N’a pas 25 ans. Un client s’amène. Un vieil Haïtien édenté. Je suis un peu éloigné, mais je comprends qu’il vient de se passer quelque chose quand le monsieur me prend à témoin en me disant que ma collègue est impolie et n’a pas les qualités requises pour travailler avec le public. Ma collègue lui rétorque que ce qu’il lui a fait est impardonnable. Je m’approche pour en savoir plus et pour seconder ma collègue. 
    • Qu’est-ce qu’il t’a fait? 
    • Il vient de me jeter un sort! 
Pendant un moment, j’ai cru avoir mal entendu. 
    • Un sort? 
    • Oui, un sort! On ne lance pas des sorts aux gens comme ça! Ça ne se fait pas!
Comme aurait dit madame l’ex-ministre Beauchamp, j’en reste un peu «pantoite», l’impression d’être amené malgré moi à arbitrer un conflit dont les ramifications créoles sont au-delà de mes compétences.  Mais parce que je commence à trouver ça vraiment intéressant, je me lance. 
    • Monsieur, avez-vous vraiment lancé un sort à ma collègue? 
    • Oui monsieur! Elle refuse de répondre à mes questions! Je suis un client et j’ai le droit de poser des questions!
Ma collègue se fâche. «Mais vous me demandez des informations sur ma vie privée! Je ne suis pas obligée de vous répondre, non, mais!» 
Impassible, le monsieur n’a que faire des arguments de ma collègue. Il pointe le doigt vers elle et ajoute : «d’ici samedi prochain, il va t’arriver quelque chose. Tu sauras alors que ça vient de moi» Puis il quitte le magasin d’un pas assuré. Je reste là, bouche bée. J’entends ensuite ma collègue qui enrage et qui peste dans son coin. «Non, mais ça ne se fait pas lancer des sorts aux gens comme ça! Il ne faut pas déconner avec le Vaudou» Je reste là un moment, sans trop comprendre ce qui vient de se passer. Je décide finalement de me fermer la gueule et de retourner à mes affaires puisque je n’ai aucune habilité pour contrer les mauvais sorts que les gens se lancent à la tête.

Hugo Chavez




Hugo Chavez est mort et je suis triste. Je l’aimais beaucoup celui-là. Il n’était pas parfait, avait ses défauts, a dit et fait des conneries, mais il a eu le courage de tenir tête aux Américains en nationalisant le pétrole de son pays. Avec les profits, il a considérablement aidé à diminuer la pauvreté de son peuple, à implanter des réformes sociales et économiques plus justes, à redonner aux plus pauvres ce que les précédents leaders laissaient filer aux exploiteurs étrangers. 

Les Américains le détestaient et le décrivaient comme un dictateur, alors qu’il a été élu, réélu et réréélu démocratiquement. D’ailleurs ils sont drôles les Américains quand ils parlent de démocratie. Ils s’en servent comme justification pour envahir des pays (ayant des richesses naturelles) dirigés par des dictateurs, mais quand un pays démocratique (ayant aussi des richesses naturelles) ose élire démocratiquement un leader de gauche fort, là, ils feront fi de la démocratie et s’emploieront à le déstabiliser de toutes les manières possibles. 

Chavez dérangeait les Américains. Comme le président Lula du Brésil (Cancer du larynx), comme sa successeure madame Dilma Roussef (Cancer du système lymphatique), comme Fernando Lugo, président du Paraguay (Cancer du système lymphatique), comme Christina Kïrchner, présidente de l’Argentine (cancer de la thyroïde), tous leaders de pays d’Amérique du Sud, tous de gauche, tous sociale-démocrates, tous pour une vision axée sur une plus juste répartition des richesses, tous contre la main mise de leurs richesses naturelles par les étrangers, tous immensément aimés par les plus pauvres et surtout, tous fervents chrétiens (donc, pas des communistes... ça serait drôlement gênant pour les Américains de les assassiner par des coups d’État sous prétexte qu’ils sont des communismes, comme ils le faisaient dans le temps. Allende, ça vous dit quelque chose? Faut donc inventer autre chose. Tiens tiens... et si on leur foutait le cancer?) Il n’y a que Evo Morales, président de la Bolivie qui, par miracle, n’a toujours pas attrapé la terrible maladie. Il est de gauche et catholique et fut un proche de Chavez. Si j’étais lui, j’embaucherais des goûteurs pour tester ma soupe avant d’en bouffer. 

À partir de maintenant, vous allez voir dans les médias de masse (contrôlés par des intérêts privés et, faut-il le rappeler, pas particulièrement de gauche) une subtile manipulation de l’information pour mettre en doute son intégrité. 
Chavez était-il un dictateur? 
Chavez a-t-il vraiment aidé son peuple? 
Chavez contrôlait-il les médias? 
Chavez était-il réellement démocrate? 
Vous allez voir, ils vont en remplir des pages et des pages juste pour discréditer le bonhomme. Les Desmarais de ce monde n’aiment pas les Chavez de ce monde. La droite est une patente planétaire pour maintenir les riches en haut et garder les pauvres en bas. Quand les pauvres parviennent à mettre au pouvoir l’un des leurs, ou simplement un en qui ils ont confiance, la patente planétaire se met en branle pour casser le chef des pauvres. C’est comme ça depuis la nuit des temps. Tout notre système politique et économique est basé sur ce principe. Mais ne vous y trompez pas, entre Chavez et Obama, le plus meurtrier des deux, c’est Obama. Quoi qu’on en dise. En cinq ans de gouvernance Obamienne, le gouvernement américain a fait plus de 3 000 victimes suite à des opérations menées par des drones en Afghanistan, en Irak et au Pakistan. Obama, le prix Nobel de la paix, a donné son accord pour ces opérations. Quant à Chavez, vous aurez beau chercher, il n’a aucune goutte de sang sur ses mains. Son pire crime aux yeux des Américains fut de crisser dehors les Américains exploiteurs des richesses de son pays. Chavez était un caillou dans la grosse botte américaine. Il fallait s’en débarrasser. 

  • Quoi? Tu dis que les Américains ont empoisonné Chavez? 
  • Oui. 
  • T’as des preuves? 
  • Non. 
  • Alors tu es un complotiste!
  • Non, je suis juste lucide. Je ne vois pas en quoi empoisonner Chavez serait plus impossible que d’instaurer un Pinochet au Chili après l’élection démocratique d’un Salvador Allende. 

Chavez était aimé et Chavez était détesté. C’était tout l’un ou tout l’autre. Sauf que justement, cette fracture est on ne peut plus symbolique : les pauvres et les opprimés l’aimaient, les riches et les puissants le détestaient. Pour moi c’est suffisant et je n’ai pas besoin de grande analyse. 

Hugo Chavez est mort. Ça me fait chier. Ça m’attriste. Ça m’enrage. Quand on a en un de notre bord, ils le tuent. Pour les pauvres du Venezuela, c’est un peu comme les noirs américains quand on a assassiné Martin Luther King. Pire! Parce que Chavez lui, il était au pouvoir et le peuple avait un défenseur qui pouvait agir. Luther King n’était qu’une voix qui parlait. Chavez était un bras qui agissait. 

Salut à toi Hugo Chavez. Je t’ai beaucoup aimé. Tu rentres dans l’histoire ce soir.