mercredi 28 janvier 2009

En primeur: Les premières lignes de mon roman!!!

L'écriture d'un roman est un exercice de création qui vous plonge dans une impitoyable solitude. Je suis sur le point d'en terminer un. Mon premier. J'en suis à la quatrième ou cinquième version, je ne sais plus. J'ai perdu le compte. J'ai tellement lu et relu certains passages que j'en ai parfois la nausée. Ce fut une longue, très longue traversée en solitaire.
Il ne me reste qu'un dernier tour de dépoussiérage général, quelques dernières coupes, quelques petits ajustements ici et là et je refile la chose à mon coach et correcteur personnel. Il le passera sous sa loupe implacable, trouvera encore deux ou trois millions de fautes et de coquilles, tout autant d'incohérences et de cocasseries narratives que je devrai encore retoucher mais après ça, je le jure, je ne touche plus à rien. Je le laisserai tel quel. Plus capable d'aller plus loin!

Grosso modo, c'est l'histoire d'un type de 43 ans qui voit sa vie basculer après une séparation douloureuse. Suicidaire, il cherchera de l'aide auprès d'une psychologue nihiliste qui finira par le convaincre que l'humain est fondamentalement mauvais et que le salut de l'homme se trouve dans son individualité et dans sa capacité à dominer ses émotions sans se soucier des codes moraux qui régissent la société. C'est une histoire cynique mais drôle (enfin, je crois) et qui se termine mal et bien à la fois. Il y a des explosions, des effets spéciaux incroyables, de la vulgarité narrative et du cul ici et là mais jamais sans condoms et toujours entre adultes consentants.

Je n'ai pas encore de titre officiel. J'hésite entre quelques uns. J'avais pensé à Fragment d'éternité, mais j'ai vu dernièrement qu'un livre portait déjà ce titre. J'ai aussi pensé à :
Six Milliards d'enculés et moi.
Sale temps pour être heureux.
Les gens heureux me font chier.
Les chroniques d'une sale époque.
Troublants trous noirs. (Mais ça aussi ça déjà été utilisé)
Rémi Bernier au pays des angoisses.
La vague impression d'un Tsunami.
Coup de foudre et coup de foutre (piqué à Pierre Bourgault)
La quarantaine de mes vingt ans.
Poil de couilles blanc.
Pierre Kiroule.
Les bourreaux aussi caressent leur chat après une journée de travail.
La mort est une femme qui vous quitte.

Voici donc en primeur les premières lignes de ce roman.
*****************
Je la vois qui émerge de ce long corridor qui mène sans doute à son bureau. Elle vient à ma rencontre. Normal, je suis là pour ça. N’empêche, elle me fait une curieuse impression. Tailleur sombre, longue jupe grise, chaussures noires, l’oeil foncé, le regard opaque, des cheveux d’ébène rattachés vers l’arrière, elle dégage toutes les subtiles nuances d’un ciel annonçant l’orage. Plutôt que de me lever à son approche, j’ai la tentation de m’enfoncer davantage dans le creux de mon fauteuil.
J’ai soudainement un doute sur cette démarche.
- Je suis Diane Duclos.

Elle me tend la main d’un geste militaire.
- Enchanté. Rémi Bernier.

Poigne ferme et la paume sèche. Elle retire rapidement sa main de la mienne comme si elle craignait une contamination.
- Suivez-moi!

L’ordre est lancé impérativement. Je marche derrière elle et j’en profite pour reluquer son cul de psychologue. C’est la première fois que j’en vois un d’aussi près. Joli. Mais je ne suis pas là pour ça. Si j’ai décidé de consulter, c’est parce que ****** vient de me quitter et que je jongle avec l’idée de me foutre l’eau ou de me mettre une corde au cou.
J’hésite encore.
J’ai besoin d’un avis compétent sur le sujet.

La décoration de son local a quelque chose de singulier. Quand on y entre, son bureau fait face à la porte. Au-dessus, et accrochée sur le mur, une immense reproduction du Saturne dévorant ses enfants de Goya. L’effet est saisissant.

On croit reprendre son souffle en regardant sur le mur de droite mais l’on tombe aussitôt sur Le Cri de Munch.
C’est tout?
Non, car sur celui de gauche, le client verra L’Enfer de Jérôme Bosch. Pour l’ambiance détendue, on repassera. L’oeil ne trouve qu’un peu de repos à se mettre dans la pupille que par les quelques plantes un peu sèches qui reposent sur le rebord de la fenêtre. Celle-ci donne sur le parking arrière de la bâtisse et n’offre aucun charme particulier pour le regard. À moins d’aimer contempler des voitures garées côte à côte, ce qui n’est pas mon cas.

D’un geste de la main, elle me prie de m’asseoir sur l’un des deux fauteuils verts caca-d’oie qui meublent l’endroit. Celui qu’elle me désigne est situé sur ma gauche. C’est à dire "côté Bosch". Quand je m’y installe, j’ai les gargouilles et les démons au-dessus de ma tête et devant moi, j’ai cette angoissante vision de Munch. Il n’y a guère que sur le bout de mes chaussures que je peux trouver un peu de repos visuel.

Une petite table est jouxtée à chacun de nos fauteuils. La sienne est libre tandis que sur la mienne reposent un pichet d’eau et une boîte de kleenex. Ce dernier élément me laisse donc deviner que l’on pleure souvent ici. Elle prend place et dépose sa paperasse sur sa table tandis que j’en profite pour m’allonger les pieds.
Sa réaction est immédiate.
- Il serait souhaitable d’adopter dès le début une position plus conventionnelle monsieur Bernier. Nous sommes ici pour travailler et non pour nous détendre.

Le ton est donné.
Elle sort une paire de lunettes de son étui qu’elle accroche sur son nez et se met à fouiller dans son porte-document. Elle met la main sur un calepin à annaux qu’elle dépose sur ses genoux, redresse ses lunettes, se racle la gorge et débute la séance.

mardi 27 janvier 2009

Valse avec Bachir

Film d'animation israélien du réalisateur Ari Folman.
Un voyage au bout de l'enfer raconté par les yeux d'un ex soldat de l'armée d'Israël au prise avec ses démons. L'enfer ici, c'est le Liban en 1982. Et dans cet enfer, il y a surtout le massacre des camps palestiniens de Sabra et Chatila.
Le personnage central de l'histoire, qui serait Ari Folman lui-même, n'a gardé que des images très vagues de son affectation au Liban. Amnésie post traumatique. Mais après la rencontre d'un ancien camarade de troupe qui lui parlera de ses propres cauchemars ramenés de cette guerre, Ari se mettra en quête de retrouver sa mémoire par la recherche de témoignages de ses anciens camarades. Peu à peu, il retrouvera les pièces du puzzle que sa conscience avait volontairement effacé en lui.

Un film coup de poing et qui n'a rien à envier aux meilleurs films de guerre jamais réalisés. L'utilisation de l'animation déroute le spectateur autant qu'elle le cloue sur son fauteuil. Elle permet de nous démontrer des scènes mille fois vues dans mille autres films du genre mais avec cette fois un décalage visuel qui vient nous déstabiliser, comme dans un cauchemar justement. Et ça frappe solide. La fin ne laisse personne indifférent et l'on quitte la salle en silence, complètement remué par ce qu'on vient de voir.

lundi 26 janvier 2009

De ces choses pour faire un texte sans trop de conviction.

Bruce Springsteen sort un nouvel album ce mardi. C'est certain que pas plus tard que mardi soir, il sera dans ma discothèque personnelle. The boss is the boss et chaque nouvelle parution est pour moi un événement incontournable.
Mardi donc.

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Un type que je connais. Jeune, pas 30 ans encore. Me contait que depuis toujours, il aimait se promener dans un recoin de la forêt où son grand-père possède un chalet. Il regarde pousser depuis des années une série de cèdres sauvages et m'a dit que son rêve, dès qu'il achètera sa première maison, sera de les transplanter pour en faire une haie. Il a cette idée depuis sa jeunesse.
Je ne savais pas trop quoi répondre.

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Il fait moins 21 000 degrés sous zéro mais les putes du quartier ne délaissent pas pour autant leur bout de trottoir. J'ai remarqué cependant qu'elles travaillaient un peu plus de jour qu'à l'ordinaire. Sans doute pour profiter des quelques degrés de chaleur de plus. Il y en a une nouvelle dernièrement et qui semble un peu moins défoncée que les autres. Sans doute parce qu'elle est nouvelle dans le métier justement. Même que son apparence extérieure tranche considérablement sur celle, disons plus conventionnelle, de ses conseurs. On dirait une madame de Repentigny qui se serait perdue dans Hochelaga-Maisonneuve.
Elles font la rue a proximité du dépanneur vietnamien du coin et il m'arrive parfois de les croiser-là le soir quand je vais acheter mes clopes. Chaque fois qu'elles entrent dans le magasin, un certain malaise tombe sur les lieux. Elles se font servir par le proprio mais contrairement aux autres clients, elles n'ont pas droit à ses sourires.

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Été passer la soirée chez M... hier. J'ai couché là parce que nous avons descendu quelques bouteilles d'excellents vins et que reprendre la route après ça aurait été du suicide. Pendant la soirée, et parce que je lui parlais d'un mec que nous avions connu au Secondaire, il a sorti son album des finissants. On a feuilleté un peu, mais pas longtemps. C'était trop déprimant après 29 ans.

samedi 24 janvier 2009

Deux voix

J'écoute Billie Holiday. La plus grande chanteuse anglophone du 20e siècle selon un sondage fait juste avant l'an 2000. Et qui est la chanteuse francophone selon le même sondage? Allez, c'est facile. Un petit effort.
Bravo!
Piaf, of course.
Dans les deux cas, j'acquiesce.

Deux registres différents mais la même misère partagée. Deux voix complètement hors normes. Deux voix uniques justement. De ces voix qui naissent dans la pauvreté et la survivance. Des voix rescapées dans la rue et burinées par la faim et la violence. À une certaine époque, on coupait des couilles pour moduler des voix. C'était inutile puisque la société peut très bien moduler des voix sans rien charcuter. Suffit de la laisser aller et elle modulera elle-même selon les misères qu'elle sèmera sur sa route.
La voix de Billie est une plainte. Celle d'Édith est une rage. Les deux se conjuguent parfaitement par les bas-fonds dont elles sont issues.

C'était encore à l'époque où la planète n'était pas globalisée et que la chanson réaliste française pouvait rivaliser avec le jazz américain. En ce sens, l'après-guerre marque définitivement le début de l'uniformité de la culture. Mais ce n'est qu'un cycle. Le problème c'est que nous avons les deux pieds dedans et que nous n'en voyons pas la fin.

Le premier rendez-vous.

J'allais souper chez mes parents mais il était encore un peu trop tôt. Je me suis donc arrêté dans ce café de Repentigny pour lire tranquillement un roman d'Antonine Maillet.
Un couple est arrivé et s'est installé près de moi. Ils parlaient. J'ai subtilement délaissé mon livre pour mon petit calepin de notes que je traîne toujours sur moi.
Voici la chose:

Je suis dans un café de banlieue. Repentigny pour ne pas la nommer.
À ma gauche, un couple qui apprend à se connaître. La cinquantaine tous les deux, la banlieue jusqu'au fond de leur conversation. Je crois que c'est leur premier rendez-vous.
Ils semblent mal à l'aise de se parler. Le mec surtout. Me donne l'impression d'être un propriétaire de garage. En tout cas, c'est un manuel et la femme doit être quelque chose comme assistante adjointe à la directrice administrative d'un bureau de dentiste. Ou quelque chose comme ça.

Lui: Voix caverneuse et accent de la campagne. Il porte une grosse bague au doigt et s'est pointé à son rendez-vous avec un manteau de motoneigiste sur le dos. La grande classe. Il portait aussi une casquette qu'elle lui a demandé de retirer au bout d'un moment. La conversation s'est aussitôt déroulée sur la perte des cheveux et les couronnes capillaires. Un grand débat de société.

"Il faut que la peau respire" lui dit-elle en lui expliquant pourquoi il devait retirer sa casquette.
"Je suis un gars à chapeaux" lui répond-t-il pour se justifier.
Je perçois déjà le début d'une grande histoire d'amour.

Elle: Accent traînant, genre infantilisant. Cheveux teints d'une couleur indéfinissable qui hésite entre le roux, le rouge ou la rouille. Ou alors c'est un mélange des trois. Lunettes dans les mêmes teintes que ses cheveux, c'est à dire impossible.

Ils boivent un café.

Elle : Prend rapidement confiance et dirige la conversation. On sent en elle l'habitude du travail en public. Elle est peut-être chef caissière dans une épicerie finalement.
Lui: Ne se contente que de répondre en essayant de se montrer le plus intéressant possible. Mais comme il passe la moitié de sa vie couché sous un voiture à tripatouiller des bidules mécaniques, c'est difficile.

Lui: Dès qu'il en a la chance, il lui parle de sa maison de Lachenaie qu'il a vendu "seulement" $250 000. " À perte mais je n'avais pas le choix." Il fait le faux modeste et son jeu est trop gros. Clairement, il veut dès le début lui montrer qu'il pourra la faire vivre convenablement. Il glisse aussi ses voyages passés. Jamaïque, Cuba, Mexique.
Les mots "Famille reconstituée" sort de sa bouche. La prononciation lui a demandé un effort considérable. Je n'entends pas le reste et je ne sais pas de quelle famille reconstituée il parle. La sienne ou celle de la femme? Le mystère reste entier.

Elle: Vient de Verdun mais dit "Sud-Ouest de Montréal" pour camoufler son origine de pauvre. Elle a aussi vécu à Rosemont avec son premier mari. Elle passe rapidement sur cette période.

Lui : Veuf... perdu son père, sa mère et sa femme en 18 mois. Puis il rajoute... (et je jure sur la tête de ma fille que c'est vrai) "Un an avant, c'était mon chien. Un boxer. Ça n'a pas été une période facile" Elle semble touchée et réplique en lui parlant de son chien à elle.

J'arrête ici. C'est trop déprimant.

jeudi 22 janvier 2009

Messie beaucoup.

J'ai pensé à un truc un peu débile. Ça m'est venu hier en regardant les reportages sur la journée Obama. Voyant toute la planète littéralement danser de joie, voyant toute la planète applaudir l'arrivée au pouvoir de Obama en espérant qu'il sauve le monde (littéralement! On s'attend à ce qu'il règle tous le putains de problèmes du globe!!), je me suis dit comme ça que ce mec là est acclamé comme un Messie.
J'avoue que ça m'a fait un peu freaker par moments.

J'ai peine à m'imaginer comment ce type-là devait se sentir hier.
Quand on parle de boulot stressant...

mardi 20 janvier 2009

Le café est bon ce matin.

Je me lève je prépare mon café et soudain, ça me frappe en pleine gueule.
- Mais c'est vrai! C'est aujourd'hui que l'histoire s'écrit!
Du coup, le café semble tellement meilleur! Eh! C'est mon premier café sous la présidence Obama!
Je lève ma tasse aux flocons qui tombent juste devant ma fenêtre!
- À la bonne vôtre mes petits flocons!

Enfin, pas encore officiellement... il reste quelque heures au règne Bush. Mais bon, c'est tout comme.
N'empêche, quelle émotion quand on y pense.

Déjà, juste la fin de l'époque W Bush serait quelque chose à fêter. 8 années interminables qui pourraient aussi se compter par le nombre de civils tués en Irak.

Combien de morts?
Environ 48 000 selon l'Iraq body Count.
Environ 150 000 selon l'Organisation Mondiale de la Santé.
Environ 600 000 selon l'IFHS (Iraq Family Health Survey) http://content.nejm.org/cgi/content/full/NEJMsa0707782

Même ici, dans les macabres statistiques, la guerre fait rage et chacun tient à ses chiffres.
De toute manière, c'est déjà beaucoup trop. Quel terrible lègue que laissera W dans l'histoire. Sans doute l'un des pires présidents américains.

Je reste réaliste toutefois. Obama ne pourra tout faire à lui seul et le travail s'annonce titanesque. Il y aura très certainement des déceptions. Impossible de faire autrement. Ce n'est pas une petite boutique qu'il se prépare à diriger, c'est le pays le plus puissant au monde. Forcément, il va y avoir des ratés.
Mais n'empêche, le café est bon ce matin et pour la première fois en 8 ans, l'avenir semble un peu moins sombre.
Un tout petit peu moins.