jeudi 1 janvier 2015

Non merci, pas de Champagne.

Je n’ai pas popé de Champagne hier. J’aurais trouvé déplacé de fêter la fin d’une année qui aura vu le départ de mon père.
Tu crois vraiment qu’il y a avait quelque chose à fêter mec ? Tu me vois tout seule avec ma mère attendre la dernière minute, puis les dernières secondes et les saluer une par une jusqu’à la dernière, pour ensuite nous souhaiter Bonne Année avant de faire sauter le bouchon ?
Ça ne s’est pas passé comme ça. On s’est plutôt contenter de manger ensemble en parlant de tout et de rien, en faisant presqu’exprès pour ne pas évoquer le sujet, mais chacun avec dans le ventre une sourde hâte de passer ce cap symbolique et d’effacer enfin ce chiffre maudit sur le calendrier.
Voilà, c’est dernière nous. Comme on ne peut pas revenir dans le passé et changer les choses, aussi-bien mettre le plus de distance possible entre nous et cette date de merde. Avançons donc.

Oui bon, d’aucuns diraient qu’il faut justement regarder en avant, saluer la vie et savourer chaque seconde qui passe parce que justement, tout passe ici-bas. Oui, oui, j’sais ça et c’est ce que je m’efforce de faire. Mais j’ai aussi le droit d’être un peu en colère, d’être encore très triste, d’être envahi de nostalgie au point d’en avoir les pieds qui collent sur le plancher, que ça me fait trainer le pas, que ça ralenti mes déplacements, que ça retarde la guérison.
D’ailleurs, se guérit-on jamais de ça ?
J’en doute.

Les moments marquant de 2014 pour moi ? Vas-y mec, t’as le choix, mais je t’avertis, ce n’est pas jojo.

Au premier rang, bien sûr, t’as cette vision coup de poing du corps de ton père, mais sans ton père dedans. T’as à peine trois heures de sommeil en 24 heures, on vient de te réveiller, mais tu ne sens déjà plus la fatigue. Ça se passait à 5h10 du matin. Tu vois cette chose immobile dans le lit, couché sur le dos, la main droite reposant près du cœur et l’autre allongé près du corps. La tête légèrement penchée vers la gauche, la bouche formant un léger rictus qui avait toutes les apparences d’un sourire. Quelque chose qui disait que malgré sa condamnation des deux dernières années, malgré ce combat impossible, au bout de la ligne, c’est quand même lui qui gagne sur la maladie. Mourir avec le sourire, c’est comme faire un bras d’honneur à la mort. Ça veut dire qu’il s’est bien battu, qu’il est fier de son combat, qu’il aura donné tout ce qu’il avait à donner, qu’il aura contre toute attente amené ce combat jusqu’au douzième round, qu’il n’aura jamais plier le genou, qu’il aura surpris son adversaire, qu’il aura même donné les meilleurs coups pendant quelques rounds, qu’il ne s’est jamais découragé, qu’il s’est toujours tenu debout, qu’il n’a jamais cédé un pouce à ce monstre et qu’à la toute fin, sentant son âme s’échapper de ce corps devenu prison, il a eu la force de sourire pendant que l’arbitre céleste comptait les neuf secondes.  

Au deuxième rang… et puis non, on va s’arrêter là. C’est déjà trop il me semble.

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