Je me lève péniblement.
Douloureusement. La langue râpeuse comme et sèche comme du papier à sabler.
L’impression que ma tête va exploser. Ou imploser, ça dépend de la position que
j’adopte. Non, ça ne tourne pas autour de moi. On dirait plutôt que ça
s’effondre dans un trou sans fond très très très loin sous le plancher.
J’ai tellement soif !
Et puis ce mal de bloc ! Mais
qu’est-ce qui s’est donc passé ?
Pourtant le souper s’est bien
passé. Un an et demi que je n’avais pas vu Christophe. Il était de passage au
Québec. Sorte de voyage d’affaire et touristique combiné. Il était avec un
collègue du boulot qui lui n’était jamais venu dans ces Nordiques contrées. Ils
ont fait la totale : motoneige, pêche blanche, traineau à chiens (qu’aucun
Québécois de ma connaissance n’a jamais fait, mais bon, ils sont comme ça les
touristes du vieux continent), Québec et son hôtel de glace, et puis quoi
encore ? J’sais pas trop.
Le souper s’est bien passé
pourtant. Il a ramené de chez lui deux bouteilles du Valais, un blanc délicieux
et un Pinot Noir. On s’est fait le blanc en apéro en préparant la bouffe. Tout
doucement, modérément même. Pour le roastbeef, j’avais déjà un vin australien
qui carafait. On se l’est bu sans se presser en se bouffant la viande et en se
racontant nos histoires. Même qu’on a bu de l’eau entre nos coupes de vin.
Alors pourquoi j’ai si mal à la
tête ce matin ? Pourquoi j’ai si soif que j’ai l’impression d’avoir séché
au soleil ?
Le souper s’est bien passé
pourtant. Deux bouteilles de vin pour deux mecs, un rouge un blanc, pendant un
souper qui a duré 4 heures de temps, ce n’est rien. J’ai déjà fait bien pire
avec beaucoup moins de dommages. Même qu’à la fin, ouais je me souviens, on
s’est fait un thé à la menthe. Un vrai avec de la vraie menthe que j’ai acheté
à la fruiterie créole sur Pie IX. Est-ce à cause du sucre que j’ai mis
dedans ?
Ah merde, je me souviens
maintenant. Après le thé… j’avais encore un peu soif. J’avais une bouteille de
blanc dans le frigo. Un petit portugais inoffensif. Un truc léger, 12% je
crois. Christophe n’a pris qu’une goutte, juste pour y goûter. Mais pourquoi la
bouteille est vide ce matin ? Pourquoi elle me regarde en riant ?
Qu’est-ce qui s’est passé ? Comment peut-elle être vide alors que mon pote
n’a fait que s’y tremper les lèvres.
Oh fuck…
J’ai glissé comme on dit. Je me
suis enfargé dedans. Je me suis claqué cette maudite bouteille en moins de deux
pendant que Christophe terminait son thé à la menthe.
Ah ouais, je me souviens
maintenant.
Fuck, c’est pour ça cette
impression de sécheresse ce matin, cette désagréable pression entre mes deux
oreilles, ce pénible sentiment de fin du monde dans mon organisme.
Eh merde.
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