dimanche 29 avril 2012

Truites et matraques


Je reprends le clavier, comme ça, discrètement, sans avertissement. Ça me démangeait. Envie d’écrire des choses sur la vie qui passe et qui ne s’arrête jamais. 
Ça m’a pogné hier alors que je tentais de taquiner la truite coquine qui se planquait sous les cailloux et les souches de ma rivière. Il faisait un froid de canard les amis. Et même plus que ça. Un froid d’outarde tiens. Ou d’oie sauvage ou quelque chose comme ça. En tout cas, je me gelais les pieds, les mains et tout le reste de mon Moi. Il y avait un vent du Nord qui plantait ses crocs refroidis dans ma chair de pêcheur. Difficile de se concentrer sur l’omble dans un moment comme ça. Très désagréable comme dirait l’autre. Et puis ça m’est venu comme ça. «Tiens, me suis-je dit en moi-même, ça serait chouette de recommencer à écrire». 
Parler de quoi pour commencer? De cette grève étudiante puisque c’est dans l’air du temps. Je me demandais pourquoi les centrales syndicales n’en profitaient pas pour descendre elles aussi dans la rue? Pourquoi ne pas appuyer ce vaste mouvement de contestation populaire par un appel général de solidarité? Pourquoi laisser les étudiants faire le boulot à leur place? 1 million de syndiqués dans la rue, c’est bien assez pour faire plier un gouvernement. Voici l’Histoire en marche et nos leaders syndicaux la regardent passer. Triste constat d’immobilisme. L’Histoire est là, dans la rue, en train de s’écrire. Mais si on ne fait rien, elle s’effacera d’elle-même. Une occasion comme celle-là ne repasse pas deux fois dans une génération. Il faudra attendre encore 25 ans pour que ça se reproduise. 
Bruit d’hélicoptère dans le ciel de Montréal au moment où j’écris ces lignes. Sans doute celui de la SQ. Il y avait une énième manif ce soir. Ça les inquiète. Ça prend le ciel comme point d’observation. Comme Dieu quoi. C’est pourquoi il faut renverser Dieu. 
Pour ceux qui en doutaient encore, cette grève étudiante nous prouve que nous ne sommes plus en démocratie. Dans une démocratie, on ne traite pas la liberté de parole à coups de matraque. On ne frappe pas les jeunes qui ont des opinions et on ne frappe pas les aînés qui les appuient. Matraquer son peuple qui manifeste pacifiquement, c’est du déni de démocratie. Cette grève nous montre toute l’hypocrisie du discours pseudo politique de ceux qui nous gouvernent et qui réconforte les pleutres et les larbins qui s’abreuvent de bêtises prêt-à-penser publiées dans le Journal de Montréal. La plus grande bêtise est de croire que nous sommes dans un pays libre. Il n’existe plus de liberté de penser si on réprime le droit de s’opposer. Ce n’est pourtant pas difficile à comprendre. 
Je l’avoue, j’aime ce qui se passe en ce moment. J’aime voir le bon peuple trouillard et repu de conformisme chier dans son froc devant la rue qui s’anime et qui conteste. Pour une fois que c’est nous qui leur faisons peur, je me délecte. Mais ça ne va pas assez loin. On ne renverse pas l’ordre des choses en gueulant des slogans. Ça prend du tumulte. Ça prend de l’audace. Ça prend une étincelle. En ce moment, ce n’est que du bouillonnement. C’est jouissif, mais ce n’est pas assez. 
Qu’est-ce que je voudrais? Tout! La fin du cynisme politique. La naissance d’une vraie démocratie. La fin de l’injustice. Je sais, je suis un rêveur. Mais bon, c’est comme ça. On ne me changera pas. J’ai encore le droit de rêver sans risquer de me prendre un coup de matraque il me semble. Remarquez que ça viendra peut-être un jour à voir comment nos fascistes de flics se comportent en ces jours de bouillonnement social. Bande de cons! Bande de tristes crétins! Sont tellement cons qu’ils ne voient pas qu’ils sont les instruments d’un pouvoir corrompu. Ils tapent dans le tas d’étudiants sur les ordres d’un gouvernement mafieux. La crasse dictant aux représentants de «l’ordre» de se comporter comme de la crasse. Et ça se dit protecteur du citoyen! Mon cul ouais! 
Bon j’arrête sinon je vais dire des énormités. 

Jolie chute au bas de laquelle je tentais de pêcher de la truite. Il faisait froid. Trop froid. 

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