Suis passé chez ma mère pour le souper. On s’est fait livrer du poulet
en caoutchouc de chez Benny que c’est toujours bon. À me voir la gueule toute
croche, les yeux globuleux et les cernes qui n’en finissaient plus de tomber
sur le plancher, elle croyait que je terminais une grippe alors qu’en fait, je
revenais de ma cuite de la veille.
J’étais content de la voir parce que ça me faisait une présence
réconfortante après une journée de merde à me sentir vraiment con d’avoir été
con avec M… la veille.
Ma mère se relève d’une opération mineure qui l’oblige tout de même à
rester tranquille. Faut pas forcer. Faut pas trop bouger. Faut pas tirer sur la
balayeuse parce que bon, c’est comme ça après une opération.
Du coup, elle se fait chier à regarder des conneries toute la journée à
la télé. Elle s’est alors souvenu que j’avais des milliers de boîtes de cartes
de hockey qui remontent à mon enfance et qui sont toujours pêle-mêle, sans
classement ni rien et qui dorment dans des recoins obscures de mon logement.
Elle s’est mise dans la tête que j’en avais pour des millions de $ et que ça
serait une bonne idée de les classer.
Comment ?
Par année.
Par joueurs.
Par équipes.
On s’en fout. L’idée c’est qu’elle veut s’occuper. Alors vas-y maman,
classe et trie mes cartes de hockey. Elle a commencé ce soir, devant moi et
drette après le poulet en caoutchouc.
Blues de St-Louis, Bruins de Boston, Red Wings de Détroit… kossé ça Les
Barons de Cleveland ? Oooh ben yé donc ben beau lui ! Peter Statsny.
Hey ? Serge Savard ! Mais y était ben jeune ! On dirait un p’tit
cul !
Je me suis pris aussi au jeu, forcément. Sans valoir des millions,
c’est vrai que je dois en avoir pour quelques jolis dollars. Ça vaut combien
une carte recrue de Raymond Bourque ? J’en ai 4 comme ça. Et puis Mark
Messier, Wayne Gretzky, Gilbert Perrault, Denis Savard, Jaromir Jagr, Mario
Lemieux.
Après quoi, je suis revenu à Montréal en roulant doucement à cause du
verglas de merde. G… voulait que je passe chez elle parce que c’est ma
meilleure amie et qu’on ne s’est même pas vus depuis 2015. G… et moi, on est
comme frère et sœur. On ne peut pas passer deux semaines sans se voir, mais en
même temps, côté cul, y a rien. Frère et sœur je disais. Ça existe en ce
bas-monde. C’est d’ailleurs pour ça que ça marche si bien entre nous.
« Viens donc face de pète, on ne s’est pas vu depuis le début de
l’année ». Tu ne peux pas dire non à G…, mon amie. J’ai donc craqué vers
la fin et je me suis pointé chez elle.
M’a offert un Château Soudard millésimé 2000 alors que je venais de
faire la promesse d’arrêter de boire. Tu regardes la bouteille et tu te dis que
le World Trade Center était encore debout quand ce vin fut vendangé. Vas donc ensuite
cracher là-dessus malgré toutes tes promesses du 4 janvier que c’est même pas
le Premier.
Tu peux pas mec, tu peux pas.
Au niveau vinicole, je suis dans la famille des faibles.
J’assume néanmoins.
On s’est sifflé ça en jouant aux cartes parce que c’est comme ça avec
G… T’es son grand frère, pas son amant espèce de con. Elle t’adore pour ce que
tu es, pas pour ce que tu fais. Ta main au cul, tu peux te la mettre dans
l’cul. Je le sais. J’ai déjà essayé. Ça fait longtemps. Mais j’accepte. C’est
chouette d’avoir une petite sœur.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire