mercredi 5 septembre 2012

Il y avait quand même une élection


Parlons néanmoins de cette élection. 
La première chose à retenir c’est le score impressionnant du PLQ malgré tous les sondages, malgré tous les événements, malgré ce gigantesque ras-le-bol populaire. 
Comment expliquer ça? 

D’abord et avant tout grâce à son chef. Rendons à César ce qui appartient à César. Monsieur Charest constitue la plus féroce machine politique de l’histoire récente du Québec. Son flair est incomparable. Son audace n’a d’égal que son extraordinaire pouvoir de conviction. 
Et puis merde, que dire de son talent de débatteur!! Ici, rien à voir avec les politiciens français. Pas d’élégance dans le propos, pas de belles phrases qui feront les pages du dictionnaire. Rien de tout ça. Mais de la hargne! Mais de la conviction! Mais de la combativité! Mais de la pugnacité! 
Et puis l’instinct de tueur! Charest dans un débat, c’est un prédateur affamé. Je déteste le politicien, mais fuck, je dois admettre qu’il torche tout le monde quand vient le temps de débattre. Pas de pitié. Tous les coups sont permis. Il tapera sur un seul clou s’il le faut, mais avec tellement d’intensité et de persuasion qu’il finira par l’enfoncer dans le cercueil de son adversaire. Jusqu’au bout, jusqu’à la toute dernière minute de la dernière journée de la campagne, il plantait ses clous. Les derniers sondages le mettaient 3e avec à peine 25% des votes. Résultat? Il termine 2e, nez à nez avec le PQ. 
Un diable d’homme. 
N’allez pas parier qu’on ne le reverra plus. Mon petit doigt me dit deux choses : 
1 - Va donner sa «démission» mais restera là, pas très loin. Au bon moment, il reviendra. Un peu comme Bourassa. 
2- Un collègue lui cèdera son siège. 
Si j’étais un membre en règle du PLQ, je me rendrais ce matin à Sherbrooke pour me mettre à genoux devant lui et l’implorer de rester. 
On l’aime ou on ne l’aime pas, mais il incarne Le chef. T’as pas peur d’aller à la guerre avec un général comme lui. 
Avouons-le!  

Ensuite nous pouvons parler des comtés anglophones qui sont pour le PLQ autant de gains acquis d’avance. Quand tu peux commencer une campagne électorale avec une vingtaine de comtés déjà dans la poche, t’as déjà une longueur sur tous les autres. Les anglophones n’ont pratiquement pas d’autres options, croient-ils. Ainsi, autant la droite, le centre et la gauche vont se rabattre sur le PLQ, seul parti 100% fédéraliste. Ce qui donne dans certains comtés (D’Arcy-McGee par exemple) des résultats qui ressemblent à ce qu’on voit souvent dans les républiques de banane. À ce sujet, j’ai bien hâte de voir l’émergence d’un parti provincial NPD ouvertement fédéraliste. Là ouais, on pourra peut-être voir de l’effritement dans le vote du PLQ. 

Puis finalement l’effet de la CAQ. Ils ont grugé davantage dans les comtés francophones qu’anglophones, causant des dommages extrêmes à l’appareil péquiste. Contrairement à ce que bien des péquistes racontent depuis le début de la campagne, ce n’est pas sa gauche qui lui a coûté la majorité, mais bien son centre droit. Monsieur et madame 450, la famille bungalow, les cousins-cousines centre d’achats. Eux quoi. 
Le PLQ n’a presque pas souffert de la présence de ce parti surréaliste du ni ni. (ni fédéraliste, ni indépendantiste) Le pari de Legault n’a pas marché en terme de comtés victorieux, mais en terme de % de vote, c’est une victoire sur toute la ligne. Avec un système proportionnel, nous aurions une Assemblée divisée en trois parties pratiquement égales. Mais attention, les prochaines élections risquent de nous donner un gouvernement CAQiste pour peu que Legault manoeuvre comme il faut. Il vient de se doter d’une base. 

Ce que le PLQ doit faire dans les prochaines années : travailler leur base franco. Autour de 11% d’appuis chez les moins de 45ans. À moyen long terme, c’est le Titanic qui s’annonce. 

Madame Marois, première femme à diriger le Québec. Il était temps. Malheureusement pour elle, la minorité ne lui donnera que des frissons et des maux de tête chaque jour d’ici les prochaines élections. Son entêtement à fermer la porte à toute idée d’une alliance avec la gauche indépendantiste lui aura sans doute coûté la majorité (ON 2%, QS 6%... la majorité était là...je n’ai pas regardé avec attention les chiffres, mais je suis certain que quelques courses à trois - PLQ-PQ-CAQ - furent perdues par les votes QS ou ON) 

Elle ne devra jamais oublier que 68% des électeurs n’ont pas voté pour son parti. Sa victoire est dû à cette tendance du «vote stratégique». De fait, de tous les partis, c’est celui de madame Marois qui comptait le plus de votants stratégiques. (près de 25% disait je ne sais plus quel sondage... quoi qu’il faut se méfier de ces maudits sondeurs...) Elle est première ministre par défaut, pieds et mains liés par une majorité constituée par le PLQ et la CAQ. 
Elle ne pourra pas faire ce qu’elle veut. Elle devra jongler plutôt que diriger. 
Bonne chance quand même. 

Ce que le PQ doit faire dans les prochains mois : patiner, ramer, convaincre et trouver un moyen de faire des miracles. Madame Marois n’aura pas de seconde chance chez les «indépendantistes stratégiques». Vous pouvez parier votre chemise qu’elle tentera de ratisser à droite, chez les CAQistes. Elle devra aussi commencer à écouter les petits partis indépendantistes. 

Pour Québec Solidaire, déception malgré la belle victoire de Françoise David. On peut penser qu’ils auraient pu mettre la main sur au moins deux autres comtés, n’eût été cette élection atypique. On ne le saura jamais. Néanmoins, il y a une progression. 

Ce que QS devra faire : trouver le moyen de dégoter 2 ou 3 gros noms pour les prochaines élections. 

Bon, je dois aller travailler. Je vous laisse. 

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