jeudi 16 février 2012

Lendemain de la St-Valentin


Acheter un bouquet de fleurs le lendemain de la St-Valentin, c’est un peu comme se rendre dans un magasin de jouets le lendemain de Noël. On te regarde comme si tu arrivais d’une autre planète et le choix qu’il te reste est particulièrement minimaliste. Genre ambiance post tsunami. J’en ai fait l’expérience aujourd’hui. Quand j’ai demandé à la fille qui était de service s’il elle pouvait me faire quelque chose de sympa, elle s’est gratté longuement la tête en regardant son stock. Il y avait encore quelques bouquets tout préparés qu’elle m’a proposés, mais ça se ressemblait à des arrangements pour service mortuaire. Je ne voulais pas jouer le client bouche-trou qui allait l’aider à se débarrasser de sa merde qu’elle n’a pas vendue hier. Un peu déçue, elle me demande : 
    • C’est pour quelle occasion? 
J’ai hésité avant de lui répondre. Ce n’était pas pour une occasion particulière, c’était juste pour faire plaisir à une fille, comme ça, gratuitement et même pas pour me faire pardonner quelque chose. Ce qui est un événement dans mon cas. Un bouquet de fleurs, quand j’en achète à une fille, c’est généralement parce que j’ai fait une connerie. Qu’est-ce que je pouvais bien lui dire? Du coup, j’ai répondu  : «C’est pour un événement spécial». Ça ne disait  absolument rien, mais ça ouvrait la porte à toutes sortes de choses. Elle m’a alors bricolé quelque chose de très acceptable malgré les maigres ressources à sa disposition. 
Ça faisait quelques jours que je pensais ce bouquet. «L’événement spécial», c’était justement que je pensais à ça gratuitement, pour faire plaisir. Juste pour dire «merci d’exister» ou quelque chose comme ça. Pas officiellement «je t’aime» mais quand même un tout petit peu finalement. Il y a toujours un «je t’aime» implicite dans un bouquet de fleurs quand on y pense. 
Il y a des gens comme ça qui vivent près de toi et qui te font sentir bien chaque fois que tu les vois, mais que va savoir pourquoi, on dirait que c’est quelque chose d’acquis alors que ça ne l’est jamais tout à fait. Tu finis par négliger par des silences ou des absences. Et en ce moment justement, je dirais que je suis dans ma plus grande phase de silence à vie. Je suis en hibernation sociale en quelque sorte. Je ne vois plus personne, je sors plus, ne bouge plus. C’est comme ça. Ça va passer, mais pour l’instant, c’est ça. Faut pas s’en faire. 
Elle, elle vit près de mois depuis 4 ans. Jamais d’engueulade, toujours souriante, jamais chiante, toujours drôle, jamais laide, toujours belle, jamais ennuyante, toujours là. 
Un bouquet de fleurs donc. Je n’ai pas les moyens de lui acheter un château en Espagne. Ça sera peut-être pour plus tard, quand j’aurai du fric. Dans la voiture avec mon bouquet, je voulais écrire un petit mot sur la carte. Il n’y avait rien qui me venait. Enfin, non, c’est faut. Il y avait un tas de trucs, mais comment dire? 
Parce que tu es toujours là...
Nnna! Trop froid. Trop impersonnel. 
Parce que finalement, je dois bien t’aimer un peu... 
Nnna! Trop risqué. Ça porte à confusion. 
Pour rien. 
Ça aussi ça porte à confusion. Elle pourrait peut-être s’identifier au «rien», ce qui serait catastrophique. 
Rien à voir avec la St-Valentin, mais tout à voir avec toi! 
Pas mal, mais encore là, ça pourrait être perçu comme une déclaration sous-jacente. 
Tu comptes beaucoup pour moi. 
Pff! Minable. 
Si tu savais le mal que je me suis tapé pour ce putain de bouquet que je t’offre comme ça, gratuitement, en ce lendemain de la St-Valentin, tu comprendrais que finalement, je suis beaucoup mieux en tant qu’ami que tous ces cons qui sont sortis avec toi et qui disaient pourtant t’aimer avec leurs tristes bouquets achetés faciles le 14 février. Y sont où aujourd’hui ces enfoirés? 
Sympa mais trop long. 
Je n’ai rien écrit finalement. 

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