Passé une partie de l’après-midi au Mousse Café pour travailler sur un truc qui n’a même pas avancé d’une miette. En face de moi, sur l’autre table, il y avait cette fille avec qui j’ai échangé quelques mots en arrivant. Je ne la connais pas, mais je l’ai vue à quelques reprises travailler sur son laptop. Âge indéfini. Début trentaine peut-être. Ou fin vingtaine. Difficile à dire. Il y en a comme ça. Mais belle en tout cas. De cette beauté naturelle qui fait que la fille, justement, elle doute vraiment de sa beauté. Ce sont les plus belles d’ailleurs à cause de ça; de ce doute. Rien qui fait plus chier qu’une belle fille qui se sait belle. Celles-là, il ne faudrait même pas les regarder pour leur apprendre ce que c’est que l’humilité. Moi, j’aime le doute dans la beauté. J’aime quand une femme a un je ne sais quoi de «pas conforme» avec les normes conventionnées. Un nez long, des oreilles décollées, un menton pointu, turlututu! Va savoir, ça les rend toutes complexées, mais justement, c’est cette attitude complexée qui les rend belles à se péter la tête contre des murs de briques. Assurance fragile, porcelaine de luxe, ça me fait craquer. Il faut en prendre soin plus qu’avec les autres, ces top-modèles arrogantes et trop sûres d’elles. D’abord, les filles avec des imperfections sont plus intelligentes parce que justement, elles ont appris plus tôt que les autres à se démerder dans la vie. Le doute est un puissant carburant pour le charme naturel. La belle n’est que belle, tandis que celle avec les oreilles décollées possède un je ne sais quoi de plus dans son arsenal de séduction. Le bon mot, l’intelligence subtile, l’humour, l’instinct de survie, va savoir, mais ça tue raide.
J’ai connu un mec qui était amoureux d’une femme qui avait une tache de vin sur le visage aussi grosse qu’une mappemonde. Même qu’on pouvait voir les fuseaux horaires et les reliefs des montagnes dessus. En Angleterre pendant la période victorienne, la pauvre fille aurait pu figurer (jeu de mots inconscient) comme attraction principale dans un cirque. Pas de blague, quand tu la regardais, tu ne voyais que ça et t’avais juste envie de regarder c’était quoi le nom de la capitale qui se trouvait près de sa narine droite. Et au début, comme tout le monde, le mec aussi ne voyait que ça. Mais la fille avait tellement d’autres qualités, elle était tellement charmante, tellement drôle et tellement brillante que le mec, forcément, il en est tombé amoureux fou. Et puis comme par magie, il ne voyait plus du tout la tache quand il la regardait. Il ne voyait qu’elle. Et nous aussi d’ailleurs. C’était pareil pour les amis. Je veux dire, une fois que tu connais bien la personne, qu’elle ait les cheveux roux ou le visage rouge, quelle est la différence profonde? Y en a pas. Le mec, il est resté toute sa vie avec elle. Jusqu’à ce qu’un matin, il décide de mourir dans la quarantaine. Comme ça, bêtement. Triste histoire.
Prends la plus belle fille du monde. Genre ch’sais pas moi, mettons Monica Bellucci. Non pas Monica. Elle est trop brillante. Mais disons quelqu’un comme Angelina Jolie qui est quand même plus pétasse qu’intelligente. Enfin, c’est l’image qu’elle me donne. Fais ensuite un gros plan de ses yeux. Juste ses yeux. Prends ensuite une obèse morbide et fais un gros plan de ses yeux, juste ses yeux. Place ensuite les deux photos une à côté de l’autre et demande à n’importe quel mec de choisir. Je vous jure qu’Angelina aurait de la concurrence.
Remarquez, y a des belles filles qui savent qu’elles sont belles, mais qui ne sont pas chiantes avec ça. Elles sont rares, mais j’en connais au moins une. Ce qui fait son charme c’est qu’elle est mal dans sa peau. Ne sait pas trop où elle s’en va et même qu’en quelque que part, elle n’aime pas trop être belle. Je veux dire qu’elle apprécierait plus que les mecs lui parlent non pas parce qu’elle est belle, mais parce qu’elle est brillante. Elle est coquette, coquine, rieuse, chausse du 42 au moins et je crois que ça la complexe. Elle se tape un boulot pénible qu’elle n’aime pas trop, mais qu’elle supporte parce que c’est un peu comme ça qu’il faut faire en société.
Les filles, ça reste un inépuisable sujet de blogue. Et je viens de me rappeler que ce texte est parti à cause de la fille qui était devant moi au Mousse Café. Belle de cette beauté que d’autres mecs que moi n’auraient pas vue. Je suis venu à deux doigts de lui dire d’ailleurs juste avant de quitter. J’ai fantasmé cette scène pendant toute l’heure où je la regardais travailler à son ordi. Voici la scène : je me lève, range mes trucs et juste avant de m’en aller, je fais trois pas dans sa direction.
- Est-ce que je pourrais vous dire un mot?
Bien sûr, elle aurait dit oui. Alors je n’aurais rajouté que ceci : «Vous êtes très belle» et puis je m’en serais allé comme un mystérieux gentleman comme il ne s’en fait plus en ce bas monde. Bien sûr, elle aurait pensé à moi tout le reste de la journée et même une partie de la soirée, allez savoir. Mais je n’ai rien dit et elle ne saura jamais que le mec en face d’elle aujourd’hui, ben merde, il la trouvait belle comme c'est même pas possible d'être belle, malgré ses oreilles décollées. Qu’est-ce que j’ai été con!
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