jeudi 29 avril 2010

Halak 3


Le café était bondé, pas une chaise de libre. Certains clients étaient debout. On manquait même de vaisselle et certaines bières se buvaient dans des tasses à café. Quand Dominic Moore a fait 2-0 pour le CH tard en troisième, j’ai cru que le toit allait littéralement sauter. Mais il restait environ six minutes à jouer et c’était encore beaucoup de temps pour la plus puissante attaque de la ligue. Combler deux buts, les Caps peuvent faire ça en moins d’une minute et quand les clients ont commencé à chanter en croyant que le match était joué, j’ai voulu leur péter la gueule tous autant qu’ils étaient. Et quand ils ont fait 2-1 et qu’il restait 3 minutes et des poussières, j’ai voulu les égorger tous autant qu’ils étaient. Et quand une pénalité fut décernée à Markov à 2 minutes de la fin, j’ai voulu tous les exterminer sans distinction.

Mais le miracle s’est produit et je n’en reviens pas encore! Battre cette machine à marquer des buts après avoir été mené 3-1 dans la série, c’est tout simplement incroyable!


Après la partie, l’espace d’une célébration méritée, tous les clients formaient une grande famille. Au-dessus de ces rires et de ces accolades échangées, il y avait Halak, ce nouveau dieu de Montréal. Son couronnement s’est fait ce soir quelque part vers 22h. J’aime ce genre de moment. J’aime cette folie. J’aime cette euphorie généralisée qui soude et qui intègre en un bloc unifié toute une population bigarrée. Il n’y a plus de discussions imbéciles sur les accommodements raisonnables quand toute une communauté pousse en même temps le même cri de satisfaction après 60 minutes de jeu. Ce soir, Halak fut un élément d’unification globale de ce grand métissage citoyen. Plus fort que toutes les lois d’intégration, plus efficace que toutes les politiques d’immersion, plus subtile, plus soft, plus jouissif aussi. À ma table, il y avait ce Québécois d’origine algérienne qui criait aussi fort que tout le monde. Sur l’autre table, une Québécoise d’origine vietnamienne. Entre deux périodes, j’ai échangé quelques impressions de la partie avec un Québécois d’origine congolaise qui était désespéré de devoir quitter la partie pour aller travailler. La patronne du café est d’origine portugaise. L’un des serveurs est d’origine haïtienne. Tous unifiés derrière cette équipe et tous ne parlaient que de Halak-Halak-Halak, avec cette lueur indescriptible dans la pupille. Tous dans la même famille et tous heureux grâce à Halak.


Oui je sais, ce n’est que du sport. Oui je sais, c’est futile. Oui je sais, il y a des choses plus importantes dans la vie. Mais bordel de merde, c’est tellement rare de voir un peuple heureux, uni, souriant, peut-on se laisser aller un tout petit peu? Ça fait tellement de bien! Ce soir, pendant ces sublimes 60 minutes de jeu, la seule chose qui comptait pour des millions de gens c’était que Halak tienne le coup jusqu’à la fin. Ce qu’il a fait. Il est maintenant un dieu. C’est un peu con, je sais, mais c’est drôlement chouette d’être con parfois.

Ça repose des angoisses de la vie.

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