C'est la nuit qui tombe juste devant ma fenêtre de salon, que c'est même pas mon salon mais ma chambre parce que je n'avais pas de place pour faire un vrai salon. Enfin si, mais je l'ai fait justement dans ma chambre. Du coup, ma chambre est dans le salon et le salon est dans ma chambre.
C'est une permutation de pièces.
Comme dans "Vous permutez madame?"
Faut pas chercher à comprendre. C'est de l'humour planté dans une nuit qui tombe devant la fenêtre d'un salon qui n'est pas un salon.
Donc, la nuit tombe devant chez moi en même temps qu'elle tombe aussi juste en face du vieux d'en bas; ledit vieux d'en bas qui se trouve à habiter justement le logement tout en bas.
Je veux dire, en-bas-en-bas.
Parce que juste en bas, c'est le type qui bé---qui bé--- qui bégaie.
Le vieux d'en bas est donc tout en bas et au-dessus de lui y a le type qui bé---qui bé--- qui bégaie et au-dessus du type qui bé---qui bé--- qui bégaie, il y a moi.
Et devant nous, ben merde, il y a la nuit qui tombe.
Et en tombant cette salope, elle force à changer le jour en nuit et du coup, quand le jour se change en nuit, ben il faut aussi changer de chiffre sur le calendrier. Ça va avec et tu peux pas faire autrement. Sinon t'es dans la merde. Ou en tout cas, t'es décalé et ça complique drôlement tes paiements de factures.
Ça vient du fait que les jours se comptent en heures et qu'il y a 24 heures dans une journée. Pas une de plus, pas une de moins. Tu voudrais changer ça que tu ne pourrais même pas. C'est comme ça et il faut faire avec. C'est une convention signée par tous les pays du monde. La nuit, on avance dans le temps. C'est pour ça qu'on dit la nuit des temps.
Je disais que la nuit tombait juste en face mais ce n'est pas tout à fait ça. Pour dire vrai, la nuit elle tombe partout en même temps mais seulement là où le soleil se couche. Sinon, c'est le jour. Ou l'après-midi, ou le matin. Mais en tout cas, ce n'est pas la nuit. Ça, c'est certain. Parce que tous les spécialistes de la chose vous le diront: La nuit, il n'y a pas de soleil.
Ou enfin si, mais pas visible. Parce que s'il n'y avait pas de soleil, il n'y aurait même pas de vie. Et on dira ce qu'on voudra, ça prend la vie pour définir le temps. Car s'il n'y a pas de vie, il n'y a pas d'humain. Et s'il n'y a pas d'humain, il n'y a pas de Suisse. Et sans Suisse, pas d'horloge suisse et du coup, pas non plus de moyen de marquer le temps. C'est pas plus compliqué que ça et c'est pour ça que la Suisse est toujours restée neutre. Pour compter le temps que durent les guerres. Sinon, les guerres seraient éternelles et tout le monde sait que si les guerres sont éternelles, ça viendrait à anéantir les humains. Et plus d'humains, plus de temps à marquer.
C'est un cercle extrêmement vicieux. Plus vicieux que ça, tu meurs.
Curieusement, quand le soleil se lève, on ne dit pas "le jour tombe" mais plutôt "le jour se lève".
La nuit tombe et le jour se lève. C'est métaphorique.
La nuit tombe sur la ville donc. Ça nous fait une journée de moins à attendre le printemps.
Joie?
Pas certain parce que du même coup, ça nous fait une journée de moins à vivre.
Eh ben oui mon vieux, c'est comme ça. Tu peux pas tout avoir dans la vie. (Déjà que tu as la vie justement!) Tu ne peux pas comme ça avoir hâte au printemps et du même coup ne pas avoir hâte de crever. L'un va avec l'autre et les deux se trouvent juste un peu plus loin en avant sur ton chemin. En te rapprochant de l'un, tu te rapproches inévitablement de l'autre.
C'est mathématique et même pas métaphorique du tout.
C'est bien connu, la mort n'a rien à foutre de la métaphore. Même si les deux mots riment ensemble, ça ne veut pas dire qu'ils peuvent se piffer. C'est pas aussi simple la vie. Ou la mort.
Donc, si j'ai bien compris ce que je tente d'expliquer, il serait un peu con d'avoir hâte au printemps parce que cela me rapprocherait mathématiquement de ma propre mort?
La solution serait donc de ne pas avoir hâte à demain et de profiter du moment présent?
Carpe diem comme disait l'autre gugus avec sa langue morte. (L'autre gugus étant ici Horace.)
Littéralement, cette phrase signifie « Cueille le jour présent et sois le moins confiant possible en l'avenir ». (J'ai pas de mérite, je viens de piquer ça sur Wikipédia.)
Carpe diem, c'est bien beau mais que puis-je carper la nuit? Ou plus simple encore, que pourrais-je bien carper dans mon logement de Hochelaga-Maisonneuve après minuit passé alors que la nuit vient justement de carper comme une salope sur toute la ville où il n'y a pas de soleil?
On ne s'en sort pas.
Je carpe en ce moment un petit sangiovese sans prétention que j'ai acheté en caisse de 12. C'est sans doute pour ça que mon texte ne va nul part. Parce que je carpe solide.
Je carpe, je carpe, je carpe en me disant qu'il en restera bien quelque chose mais chaque fois, je me réveille dans un lendemain où il faut encore changer de date parce que la nuit aura terminé de tomber pendant mon sommeil en faisant mathématiquement place au jour d'après qui se lève tout le temps métaphoriquement sur un nouveau chiffre sur le calendrier.
La vie est un tapis roulant sur lequel nous sommes attachés comme des saucissons.
- Si! Si! Des saucissons.
Et au bout du tapis roulant, il y a la mort.
Ce truc là commence à notre naissance et on a toute la vie pour essayer de faire quelque chose entre le point de départ et le point d'arrivée.
Oui mais faire quoi?
Carpe diem mon vieux, carpe diem!
Mais putain de merde, que peut-on carper joyeusement pendant ce trajet funeste en sachant que tout au bout, on se fera carper en morceaux? Qu'on carpera une bonne fois pour toute et qu'on nous carpera six pieds sous terre sans possibilité de revenir carper une dernière fois la serveuse de la Brûlerie du Roy à Joliette?
- Laquelle?
- Celle avec de gros seins.
- Ah oui, d'accord. Je vois de qui tu veux carper.
Ce qui reste à faire? Profiter du bon temps qui roule sans se poser de question. Comme ce soir où j'ai été me taper la partie de hockey sur grand écran avec ma fille dans ce merveilleux café remplie de serveuses qui me font carper à chaque fois.
Elle est un peu tristounette en ce moment parce qu'il y a son Australien d'amoureux tout blond qui est retourné vivre dans son pays tout en bas. Quand il parle de moi à ses amis sur Facebook, il dit V...'s old man. V.... étant ici le nom de ma fille et old man étant ma dénomination officielle dans son argot de crocodile dundee. C'est pas péjoratif ni métaphorique. Ni même mathématique. C'est juste comme ça que les jeunes Australiens disent pour "Papa", "Père", "Vieux" ou "Pops".
N'empêche, I'm a fucking old man.
Et roule le tapis roulant, et roule et roule et roule....
Ma fille et son old man étaient donc tous les deux ensemble ce soir à prendre un pichet de bière et à regarder un match de hockey sur grand écran, grand écran que nous avions en pleine face parce que je m'étais pointé 1heure 1/2 avant la partie pour avoir la table la plus près possible.
Carpe diem quand on a vu Kovalev marquer sur un avantage numérique et une fois de plus pendant les tirs de barrage. Quelle feinte maman! Quelle feinte old man!
Et quand la rondelle glisse derrière le gardien de but, et quand le père et la fille gueulent en même temps dans le café, c'est Carpe diem mon vieux, c'est Carpe diem jusqu'au bout des bras levés au ciel! Oeuvre d'art spontanée, aussitôt faite, aussitôt morte. C'est la beauté du sport. Tu étais là, tu as vu l'instant, tu as touché de tes pupilles sa seconde formidable où le gardien a mordu la poussière et tu as gueulé ta joie une fraction de seconde avant que la rondelle ne franchisse la ligne rouge parce que tu savais que ça y était! Et tu gueules parce que tu ne peux pas retenir le primate en toi et putain de merde, c'est bon!
Et quand Lapierre vient te carper ça tout de suite après avec une autre feinte d'anthologie, et bien là, tu carpes solide en tapant ta chope de bière contre celle de ta fille et franchement, tu ne vois même plus le tapis roulant sous ton cul qui t'amène pourtant vers la mort. Tu es un peu immortel quand le Canadiens gagne et que tu viens de voir le match avec ta fille en buvant de la bière dans un café.
C'est une permutation de pièces.
Comme dans "Vous permutez madame?"
Faut pas chercher à comprendre. C'est de l'humour planté dans une nuit qui tombe devant la fenêtre d'un salon qui n'est pas un salon.
Donc, la nuit tombe devant chez moi en même temps qu'elle tombe aussi juste en face du vieux d'en bas; ledit vieux d'en bas qui se trouve à habiter justement le logement tout en bas.
Je veux dire, en-bas-en-bas.
Parce que juste en bas, c'est le type qui bé---qui bé--- qui bégaie.
Le vieux d'en bas est donc tout en bas et au-dessus de lui y a le type qui bé---qui bé--- qui bégaie et au-dessus du type qui bé---qui bé--- qui bégaie, il y a moi.
Et devant nous, ben merde, il y a la nuit qui tombe.
Et en tombant cette salope, elle force à changer le jour en nuit et du coup, quand le jour se change en nuit, ben il faut aussi changer de chiffre sur le calendrier. Ça va avec et tu peux pas faire autrement. Sinon t'es dans la merde. Ou en tout cas, t'es décalé et ça complique drôlement tes paiements de factures.
Ça vient du fait que les jours se comptent en heures et qu'il y a 24 heures dans une journée. Pas une de plus, pas une de moins. Tu voudrais changer ça que tu ne pourrais même pas. C'est comme ça et il faut faire avec. C'est une convention signée par tous les pays du monde. La nuit, on avance dans le temps. C'est pour ça qu'on dit la nuit des temps.
Je disais que la nuit tombait juste en face mais ce n'est pas tout à fait ça. Pour dire vrai, la nuit elle tombe partout en même temps mais seulement là où le soleil se couche. Sinon, c'est le jour. Ou l'après-midi, ou le matin. Mais en tout cas, ce n'est pas la nuit. Ça, c'est certain. Parce que tous les spécialistes de la chose vous le diront: La nuit, il n'y a pas de soleil.
Ou enfin si, mais pas visible. Parce que s'il n'y avait pas de soleil, il n'y aurait même pas de vie. Et on dira ce qu'on voudra, ça prend la vie pour définir le temps. Car s'il n'y a pas de vie, il n'y a pas d'humain. Et s'il n'y a pas d'humain, il n'y a pas de Suisse. Et sans Suisse, pas d'horloge suisse et du coup, pas non plus de moyen de marquer le temps. C'est pas plus compliqué que ça et c'est pour ça que la Suisse est toujours restée neutre. Pour compter le temps que durent les guerres. Sinon, les guerres seraient éternelles et tout le monde sait que si les guerres sont éternelles, ça viendrait à anéantir les humains. Et plus d'humains, plus de temps à marquer.
C'est un cercle extrêmement vicieux. Plus vicieux que ça, tu meurs.
Curieusement, quand le soleil se lève, on ne dit pas "le jour tombe" mais plutôt "le jour se lève".
La nuit tombe et le jour se lève. C'est métaphorique.
La nuit tombe sur la ville donc. Ça nous fait une journée de moins à attendre le printemps.
Joie?
Pas certain parce que du même coup, ça nous fait une journée de moins à vivre.
Eh ben oui mon vieux, c'est comme ça. Tu peux pas tout avoir dans la vie. (Déjà que tu as la vie justement!) Tu ne peux pas comme ça avoir hâte au printemps et du même coup ne pas avoir hâte de crever. L'un va avec l'autre et les deux se trouvent juste un peu plus loin en avant sur ton chemin. En te rapprochant de l'un, tu te rapproches inévitablement de l'autre.
C'est mathématique et même pas métaphorique du tout.
C'est bien connu, la mort n'a rien à foutre de la métaphore. Même si les deux mots riment ensemble, ça ne veut pas dire qu'ils peuvent se piffer. C'est pas aussi simple la vie. Ou la mort.
Donc, si j'ai bien compris ce que je tente d'expliquer, il serait un peu con d'avoir hâte au printemps parce que cela me rapprocherait mathématiquement de ma propre mort?
La solution serait donc de ne pas avoir hâte à demain et de profiter du moment présent?
Carpe diem comme disait l'autre gugus avec sa langue morte. (L'autre gugus étant ici Horace.)
Littéralement, cette phrase signifie « Cueille le jour présent et sois le moins confiant possible en l'avenir ». (J'ai pas de mérite, je viens de piquer ça sur Wikipédia.)
Carpe diem, c'est bien beau mais que puis-je carper la nuit? Ou plus simple encore, que pourrais-je bien carper dans mon logement de Hochelaga-Maisonneuve après minuit passé alors que la nuit vient justement de carper comme une salope sur toute la ville où il n'y a pas de soleil?
On ne s'en sort pas.
Je carpe en ce moment un petit sangiovese sans prétention que j'ai acheté en caisse de 12. C'est sans doute pour ça que mon texte ne va nul part. Parce que je carpe solide.
Je carpe, je carpe, je carpe en me disant qu'il en restera bien quelque chose mais chaque fois, je me réveille dans un lendemain où il faut encore changer de date parce que la nuit aura terminé de tomber pendant mon sommeil en faisant mathématiquement place au jour d'après qui se lève tout le temps métaphoriquement sur un nouveau chiffre sur le calendrier.
La vie est un tapis roulant sur lequel nous sommes attachés comme des saucissons.
- Si! Si! Des saucissons.
Et au bout du tapis roulant, il y a la mort.
Ce truc là commence à notre naissance et on a toute la vie pour essayer de faire quelque chose entre le point de départ et le point d'arrivée.
Oui mais faire quoi?
Carpe diem mon vieux, carpe diem!
Mais putain de merde, que peut-on carper joyeusement pendant ce trajet funeste en sachant que tout au bout, on se fera carper en morceaux? Qu'on carpera une bonne fois pour toute et qu'on nous carpera six pieds sous terre sans possibilité de revenir carper une dernière fois la serveuse de la Brûlerie du Roy à Joliette?
- Laquelle?
- Celle avec de gros seins.
- Ah oui, d'accord. Je vois de qui tu veux carper.
Ce qui reste à faire? Profiter du bon temps qui roule sans se poser de question. Comme ce soir où j'ai été me taper la partie de hockey sur grand écran avec ma fille dans ce merveilleux café remplie de serveuses qui me font carper à chaque fois.
Elle est un peu tristounette en ce moment parce qu'il y a son Australien d'amoureux tout blond qui est retourné vivre dans son pays tout en bas. Quand il parle de moi à ses amis sur Facebook, il dit V...'s old man. V.... étant ici le nom de ma fille et old man étant ma dénomination officielle dans son argot de crocodile dundee. C'est pas péjoratif ni métaphorique. Ni même mathématique. C'est juste comme ça que les jeunes Australiens disent pour "Papa", "Père", "Vieux" ou "Pops".
N'empêche, I'm a fucking old man.
Et roule le tapis roulant, et roule et roule et roule....
Ma fille et son old man étaient donc tous les deux ensemble ce soir à prendre un pichet de bière et à regarder un match de hockey sur grand écran, grand écran que nous avions en pleine face parce que je m'étais pointé 1heure 1/2 avant la partie pour avoir la table la plus près possible.
Carpe diem quand on a vu Kovalev marquer sur un avantage numérique et une fois de plus pendant les tirs de barrage. Quelle feinte maman! Quelle feinte old man!
Et quand la rondelle glisse derrière le gardien de but, et quand le père et la fille gueulent en même temps dans le café, c'est Carpe diem mon vieux, c'est Carpe diem jusqu'au bout des bras levés au ciel! Oeuvre d'art spontanée, aussitôt faite, aussitôt morte. C'est la beauté du sport. Tu étais là, tu as vu l'instant, tu as touché de tes pupilles sa seconde formidable où le gardien a mordu la poussière et tu as gueulé ta joie une fraction de seconde avant que la rondelle ne franchisse la ligne rouge parce que tu savais que ça y était! Et tu gueules parce que tu ne peux pas retenir le primate en toi et putain de merde, c'est bon!
Et quand Lapierre vient te carper ça tout de suite après avec une autre feinte d'anthologie, et bien là, tu carpes solide en tapant ta chope de bière contre celle de ta fille et franchement, tu ne vois même plus le tapis roulant sous ton cul qui t'amène pourtant vers la mort. Tu es un peu immortel quand le Canadiens gagne et que tu viens de voir le match avec ta fille en buvant de la bière dans un café.
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