vendredi 17 octobre 2008

Les sondages.

Donnez-moi un sondage à faire et je lui ferai dire tout ce que vous voudrez. Vous voulez 95% de souverainistes? Pas de problème. Suffit de décomposer la question en 5.
- Seriez vous en accord ou en désaccord à n'avoir qu'un seul impôt au Québec et que cet impôt soit uniquement géré uniquement par le gouvernement du Québec?
- Seriez vous en accord ou en désaccord à ce que toutes les taxes perçues sur le territoire du Québec soient gérées uniquement par le gouvernement du Québec?
- Seriez vous en accord ou en désaccord à ce que toutes les lois sur le territoire du Québec concernant le Québec soient uniquement dictées par l'assemblée nationale du Québec?
- Seriez vous en accord ou en désaccord à ce que toutes les décisions concernant le Québec à l'extérieur du Québec soient uniquement décidées par l'assemblée nationale du Québec?
- Seriez vous en accord ou en désaccord à ce que l'immigration sur le territoire du Québec soit gérée par l'assemblée nationale du Québec?

Je viens de décomposer la notion d'un pays souverain en 5 questions. Et vous avez là à peu près tout ce qui faut pour récolter au moins 95% de "oui" à chacune des 5 questions, même en prenant un échantillonnage fédéraliste. À l'inverse, je peux faire basculer vers la négation mon % de souverainistes d'au moins 40% avec une seule question :
- Seriez pour ou contre la souveraineté du Québec?
Et si je veux faire droper de 15 % de plus cette option, ma question sera la même mais cette fois, en utilisant un choix de mots plus spécifiques. Par exemple:
- Seriez vous pour ou contre à ce que le Québec se sépare du reste du Canada sans garder aucun lien juridique ou économique?
Notez ici que j'ai sciemment utilisé le verbe "Séparer" plutôt qu'utiliser un terme comme "Accède à sa souveraineté". C'est voulu parce que c'est prouvé que c'est ce qui fait peur aux gens. Et si je sais tout ça, c'est que j'ai travaillé de longues semaines sur ce sondage au temps des accords du lac Meech. Au temps où monsieur Parizeau était chef de l'opposition et n'attendait qu'une élection pour prendre le pouvoir. Je sondais pour le PQ et notre travail, entre autres choses, consistait à décrypter les mots sensibles à utiliser ou à rejeter dans une éventuelle question référendaire. Travail passionnant qui m'a fait découvrir que le citoyen ordinaire est un animal immensément manipulable.

J'ai ensuite travaillé de nombreuses années dans les boîtes de sondages privées. Assez longtemps pour savoir que c'est la plus belle crosse qui ne puisse pas exister. Surtout pour des sondages politiques en temps d'élections. La seule manière d'avoir un éclairage un peu plus précis serait de sonder jour après jour et après jour pendant des années un échantillon régulier de répondants en ne posant toujours que les mêmes questions de base. Unique manière de te faire un portrait constant et à peu près cohérent de l'électorat parce que tu peux toujours revenir en arrière pour comprendre les mouvances selon certaines situations précises. Exactement ce que font les sondeurs internes des partis politiques comme le PQ. Ça serait un peu long à expliquer ici cependant.
Les boîtes privées pendant les campagnes électorales n'ont grosso modo que 30 jours pour se monter une photographie de la tendance. De plus, et pour une question d'économie, ils ne vont se concentrer que sur ce que l'on nomme dans le jargon "la course de chevaux", c'est à dire sur "celui qui va gagner dans telle ou telle circonscription", laissant tomber les questions parallèles, trop nombreuse et trop coûteuses, qui aident pourtant à solidifier la photographie de la tendance en tenant compte des irritants imprévisibles ou difficilement quantifiables (taux de participation, possibilités de changer d'idée à la dernière minute, l'influence potentiel sur l'électorat d'un parachutage d'un candidat, etc) Au PQ, on va même jusqu'à sonder le répondant sur ses votes lors des précédentes élections, question de savoir si le répondant est un butineur qui va d'une fleur à l'autre ou plutôt un indéfectible qui ne changera jamais d'idées.

Enfin bref, je m'emporte. Ce que je voulais dire, c'est que les présidents des boîtes de sondages son de pseudos experts qui se prennent pour des oracles en essayant de quantifier le vent qui souffle dans la tête des citoyens. Ils habillent leurs analyses de grandes formules qui impressionnent le profane.

Les sondeurs privées sont aux actuaires ce que les critiques sont aux artistes: Des ratés sympathiques.

Les sondages se sont plantés lors de la dernière élection. Et aussi sur celle d'avant, quand l'ADQ a fait sa percée surprise. Les sondages (privées) se plantent tout le temps, mais les patrons de ces boîtes ont toujours de bonnes raisons pour nous expliquer que ce n'est jamais de leur faute. Je sais aussi, et uniquement par le vent de panique qui a soufflé sur le PCC lors des dernières semaines de la campagne, (voir ou relire les réactions de Blackburn quand un sondage le donnait à 40% seulement) que ce parti n'a pas de sondeurs internes. Ou s'ils en ont, ils ont travaillés uniquement comme les privées, c'est à dire seulement à partir du début de la campagne.

Aujourd'hui, la palme de l'explication la plus idiote pour expliquer ce énième grand ratages des sondages privés, revient à Raynald Harvey président de Segma. Voyez cette explication : «Quand on a réalisé nos coups de sonde, dit-il, le portrait s'était pas mal figé. La participation a fait la différence. Le NPD a été défavorisé car les jeunes ont moins voté et le PLC et le PCC ont fait mieux que prévu."
En bref, ce n'est pas que les sondeurs soient incompétents, mais c'est de la faute à la participation, aux jeunes surtout qui n'ont pas été voter. Voilà! C'est pas plus compliqué que ça. Blackburn a fait 12% de plus que prévu mais c'est de la faute à la participation, aux jeunes, au "portait qui était pas mal figé au moment où le sondage fut fait". Ce n'est certainement pas du tout la faute des sondeurs.
Mais le plus drôle c'est quand il dit :"... et le PLC et le PCC ont fait moins que prévu"
Prévu par qui ducon? Par toi non? C'est pas ta job justement de "prévoir"? Un sondage, ce n'est pas supposé servir à ça justement?
Plus loin, il rajoute: "Rappelons qu'un sondage porte sur 100% de la population, donc cela crée de la distorsion.»
De la distorsion?? Kossé ça ciboire?? Tu t'es planté pauvre con, c'est pas plus compliqué que ça.
Pour lire l'intégrale: http://www.cyberpresse.ca/actualites/elections-2008/200810/15/01-29786-les-sondages-avaient-vu-juste-ou-presque.php

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