C’était jeudi soir, jour de paie et comme tous les jeudis soirs, il
décida d’aller bouffer au St-Hubert à sa pause repas. Question de se
récompenser. Il allait prendre comme à son habitude une poitrine avec des
frites, deux sauces avec une salade traditionnelle à volonté parce qu’il
n’aimait pas la crémeuse. Pour l’occasion, il avait traîné son Monde Diplo avec
lui. On y parlait en détails de la dette de la Grèce et du bras de fer qui se
jouait entre les créanciers européens et le nouveau gouvernement de gauche. Dans
un des articles, on y disait que la situation financière actuelle de la Grèce
était comparable en tout points à celle de la France en 1945. Cette image
l’avait marqué.
Sa table habituelle du jeudi soir était prise et il dû se contenter
d’un autre, moins confortable et plus haute à cause de la banquette. C’était le
jeudi soir nous avons dit et comme à tous les jeudis, c’était R*** qui était de
service aux tables au St-Hub, celle qui travaillait toujours avec un décolleté
traditionnel ou crémeux, ça dépendait des fois, mais heureusement toujours à
volonté. R*** était une gentille serveuse d’environ 25 ans, pas vraiment son
genre mais tout de même agréable à regarder. Elle était jolie, mais de cette
beauté un peu gâchée par certains artifices extérieurs très à la mode chez
certaines de ces filles de cette génération nées avec les télé-réalités. D’ailleurs,
il soupçonnait qu’elle s’était fait rehausser les seins par on ne sait plus
quelle technique qui faisait que les rondes choses ne bougeaient pas et restaient
artificiellement droits même dans ses déplacements (ou mouvements) les plus
incongrues. Néanmoins, et nonobstant toutes ces considérations plastiques,
quand elle lui plantait ses deux gros totons à trois pouces du visage
lorsqu’elle lui apportait le menu en lui lançant des « mon cher »
gros comme le bras, il en oubliait momentanément ces troublantes révélations de
Christine Lagarde, PDG du Fond Monétaire International, quand elle mettait en
garde la Grèce contre un défaut de paiement. Toute son attention tenait plutôt dans
ce douloureux exercice qui exigeait de la regarder dans les yeux pour lui
commander une poitrine.