Une nouvelle directrice au boulot. Elle vient de l’externe, ce qui fait chier beaucoup de directeurs parce qu’on lui a offert une succursale hyper payante sur un plateau d’argent. Ça fait deux semaines que je travaille avec elle.
Je condense ici des pans de discussions que nous avons eues ensemble.
Elle : C’est fou à quel point tu peux être gentil avec les clients.
Moi : Merci.
Elle : (hésitante, mais ne pouvant s’empêcher de le dire) et puis j’apprécie beaucoup ta gentillesse avec moi.
Moi : heu... merci, mais pourquoi tu me dis ça? On t’avait parlé de moi?
Elle : (Sourire gêné) ouais... beaucoup.
Moi : Ah! OK. Et on t’a dit que j’étais méchant, je suppose?
Elle : Quelque chose comme ça. On n’a pas cessé de me dire «fais attention à Varice & versa!»
Moi : À ce point-là?
Elle : Ils m’ont tous dit ça.
Moi : Qui?
Elle : Les autres directeurs.
Moi : Et c’est tout?
Elle : Non. On m’a même dit que tu venais dans cette succursale pour me casser.
Moi : C’est Trucmuche qui t’a dit ça?
Elle : Non.
Moi : Alors c’est Unetelle?
Elle : (ne répond pas).
Moi : Donc c’est bien Unetelle. C’est vraiment cool.
Elle : Pourquoi?
Moi : Parce que je faisais un test. J’ai dit à Trucmuche que j’allais m’occuper de toi juste pour savoir le chemin qu’allait prendre ma petite confession. Je testais sa fiabilité. Tôt ou tard, je savais que ça allait sortir quelque part. Tout finit par se savoir dans cette boîte de merde. C’est un vieux truc apache que j’ai appris quand je travaillais dans un bureau et que je voulais remonter la source jusqu’au délateur de la place. Ça marche toujours. Qu’il ne te l’ait pas dit, c’est cool. Je peux donc encore avoir confiance en Trucmuche. Qu’il l’ait dit à Unetelle, c’est correct aussi parce qu’elle est directrice comme lui. Entre directeurs, c’est normal de se refiler des confidences. Mais que Unetelle se soit ouvert la gueule à toi, ça, c’est vraiment génial. Ça me confirme ce que je pensais d’elle, la petite salope. Elle fait les yeux doux quand elle me voit, mais elle me backstab quand je ne suis pas là. Cool. Merci pour l’info.
Elle : (un peu mal à l’aise) mais qu’est-ce qu’il y avait de vrai dans ce que t’as dit?
Moi : Tout. Que si tu commences à faire chier les collègues, je vais te faire chier solide. Et puis je vais rester en règle pour le faire. Tu ne pourras même pas me déposer un avis verbal.
Elle : Ce n’est pas mon but!
Moi : Mais moi non plus! Je ne me lève pas le matin avec l’envie de m’engueuler dans la journée.
Elle : Alors on est d’accord?
Moi : Oui, pas de problème. J’ai fait ma petite enquête. Jusqu’à maintenant, tout le monde t’aime bien. Si tu respectes la convention collective, t’auras jamais de problème avec moi ni avec personne. C’est comme ça ici.
Elle : Je sais. On m’avait prévenu quand j’étais en formation dans les autres divisions. Quand je leur disais que j’allais hériter de cette succursale, tout le monde faisait la grimace. Il y a même un directeur en région qui m’a demandé si j’étais armée.
Moi : À cause de la clientèle de Montréal Nord?
Elle : Non! À cause des employés syndiqués! Vous avez une terrible réputation.
Moi : La division 68, c’est la fine fleur du syndicat de la boîte. On a une tradition à respecter et on a le meilleur délégué de toute l’histoire de ce syndicat. Le seul délégué qui se fait appeler directement par les VP de la boîte parce qu’ils sont certains qu’en lui parlant directement, les problèmes vont se régler. Parle aux vieux directeurs, ils te diront que le Che c’est un molosse terrible, mais qui respecte sa parole. Si t’as le Che de ton côté, t’auras jamais de problème. Respecte la convention et brûle des cierges pour le Che. T’auras la paix éternelle. Mais bon, confidence pour confidence, je sais ce que les autres directeurs pensent de toi.
Elle : Et ils pensent quoi?
Moi : Quand on sera plus amis, je te le dirai.
Elle : Donc ils me chient dessus?
Moi : T’apprends vite.
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