mercredi 4 avril 2012

Entre le pouce et l'index...


Il y a trois ans, mon oncle m'a vendu le chalet "clé en main" comme on dit. Je l'ai acheté avec tout ce qu'il contenait; meubles, vaisselle, literie... tout quoi. Même son équipement de pêche. 

Voilà, c'était mon intro. Poursuivons. 

C’est une manière de long tube en plastique jaune qui traînait dans le cabanon du chalet. Ça sert à ranger les cannes à pêche lors des déplacements. Un vieux modèle qui appartenait à mon oncle. En principe, le machin est muni de deux capuchons fermoirs - un à chaque bout - qui se vissent et se dévissent à volonté. Celui-là n’en avait qu’un seul. Il était comme ça lors de l’achat du chalet et il était encore ainsi hier quand je me suis mis à faire du nettoyage. Sans doute mon oncle l’aura-t-il paumé avec les années. Peu importe, ça n'a aucune importance. 
Vraiment? attendez, vous serez surpris. 

Depuis trois ans qu’il reposait appuyé dans le coin derrière la porte, le bout vissé en bas et la partie ouverte en haut. J’avais scruté l’intérieur qu’une seule fois, au lendemain de ma prise de possession du chalet lors de l’achat officielle. Mais depuis je n’y ai jamais retouché. Des lignes à pêche, j’en ai à plus savoir où les entreposer. Une de plus ou une de moins, je n’en suis pas à ça près. Mais hier, poussé par une crise de nettoyage aigüe (et aussi éphémère, je dois le dire...), je me suis décidé à faire du ménage dans le cabanon. Du coup, je suis tombé sur ce tube et en voulant retirer la canne à pêche qu’elle contenait, je me suis aperçu que celle-ci était coincée tout au fond du tube. 

Bizarre autant qu’étrange! 

Quelque chose semblait la retenir là. J’ai pensé qu’il pouvait s’agir du moulinet, même si je ne me souvenais pas en avoir vu trois ans plus tôt. J’ai voulu dévisser le capuchon, mais sans succès. C’était plus serré qu’une vis. En observant la chose de plus près, je constatai en même temps qu’une fine giclée de je-ne-sais-quoi de huileux et de brunâtre s’était solidifiée après s’être écoulée des parois du capuchon. Sans doute que mon oncle avait tenté lui aussi d’ouvrir ce damné capuchon, pensais-je. Il aura utilisé l’ajout de graisse de vélo ou de ch’sais pas quoi du même genre, mais sans succès. 

Ça s’expliquait en tout cas. 

Puis, à force de gosser et de triturer la chose, une des deux parties de la canne finit par glisser et s’échappa hors du tube. L’autre partie, la plus grosse, celle avec le manche, ne voulait toujours rien savoir et restait insaisissable au fond de son long tuyau. En examinant de plus près la partie de la canne que j’avais maintenant entre les mains, je remarquai que les oeillets étaient recouverts d’une espèce de texture spongieuse et humide. Sans réaliser la stupidité de la chose, je me suis dit que c’était simplement des résidus d’algues ou de mousse accumulées lors de la dernière pêche de mon oncle, ces machins qui poussent dans l’eau et qui n’existent que pour faire chier les pêcheurs. (Quoique pour pêcher le brochet, c’est l’endroit idéal). Après au moins 3 ans de non-utilisation, cette réflexion était en effet idiote. Mousse ou algue, la chose ne pouvait naturellement pas être encore humide, pas après tout ce temps. 

J’ai compris un peu plus tard ce qu’était exactement ce mystérieux composé humide et spongieux que je tentais d’identifier entre mon pouce et mon index. Vous allez voir, c’est franchement dégueulasse. 

De retour à ma préoccupation première, je gossais encore avec ce maudit tube en essayant d’atteindre l’autre partie de la canne pour la tirer hors de son réceptacle. Il m’était difficile d’identifier ce qui pouvait le maintenir coincé à cause de l’obscurité qui se faisait tout au fond de ce damné tube. Mais il y avait quelque chose, ça, c’était certain. J’entrepris donc de dégager la canne avec l’aide du bâton de bois que j'utilise pour tisonner le feu de camp. Lorsque le bout de mon bâton atteignit le fond du tube, j’ai senti que c’était tout mou tout au fond. 

Tout mou tout au fond? Qu’est-ce que ça peut bien être? 

Et c’est là que j’ai eu le déclic! Une image bucolique qui me plaisait bien depuis que j’ai acheté ce chalet me passa subitement par la tête. Celle de cet écureuil qui s’introduit toujours dans mon cabanon pour y éplucher les cocottes de pins. Il passe par un trou sous le plancher et planque sa bouffe dans mon cabanon. Ça m’a toujours fait rire. Je trouvais ça mignon comme tout. 

Maintenant que vous avec cette image dans la tête vous aussi, refaites le même cheminement de pensée que moi à cet instant précis : Écureuil... trou dans le plancher... intrusion de mon cabanon... tube jaune avec ouverture en haut suivit d’une longue, très très très longue chute vers le capuchon tout en bas... 

Fuck! 

Eh oui. Le truc mou, la graisse de vélo tout huileuse, la mousse spongieuse et visqueuse entre mon pouce et mon index... c’était ça. 




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