jeudi 27 octobre 2011

Les poireaux étaient en solde

Ça commence à cailler comme on dit. L’hiver n’est pas loin. J’ai vu son avant-garde ce soir. Elle se cachait dans une flaque d’eau d’apparence innocente, mais dont les rebords se couvraient d’un givre presque imperceptible. J’en ai profité pour l’écraser du pied, manière de lui dire qu’il n’est pas le bienvenu. Alors qu’on l’attend généralement le nez planté dans ses nuages gonflés de neige, il fallait se baisser la tête ce soir pour l’entrevoir.

Putain d’hiver.

Je l’ai vu aussi dans la morosité des regards des gens que je croisais dans la rue. Dans ces têtes engoncées, dans ces écharpes qui sentent encore le renfermé et même dans la morve du petit voisin qui jouait dans la ruelle. Mais lui, il semblait plutôt indifférent à tout ça. Cet hiver qui s’amène serait-il nucléaire qu’il n’effacerait pas pour autant son sourire de petit morveux heureux.

Je ne vois plus la voisine qui avait l’habitude de promener son chien. Ou alors c’est à cause des putains de journées qui rapetissent. Si ça se trouve, elle le promène toujours à la même heure, mais comme il fait noir très tôt, on ne voit plus rien. Et en plus, elle ne doit plus mettre ses petites jupes.

Putain de journées qui rapetissent.

Putain de chien con.

Putain d’automne.

Putain de froid.


Les poireaux étaient en solde à l’épicerie. $2 le gros paquet. J’en ai acheté trois paquets. J’sais pas ce que je vais faire de tout ça. Mon achat fut impulsif. Paraît que ça se congèle après les avoir nettoyé et coupé. Ça me fera des dizaines de poireaux à laver et à couper. Quand on y pense bien comme il faut, la vie est une jungle. Je vous le dis braves gens.


Finalement, j’ai opté pour un poulet tout cuit. Je me suis acheté une petite sauce St-Hubert hyper chimique et avec des petites patates rissolées, c’était délicieux. J’ai mangé tout ça en regardant le hockey avec deux potes. Un qui est marié et l’autre qui vient d’être largué par sa femme après 8 ans de vie commune. Ce dernier est en enfer malgré mes délicieuses petites patates. Se faire larguer, c’est la pire chose qu’une femme ne peut pas faire à son mec. Il devrait y avoir des lois contre ça. On n’est pas faits pour être largués. Ça, c’est sûr. Je me demande bien ce que fait le gouvernement. Et mon pote n’en pense pas moins. Il croit encore avoir une petite chance avec elle. Le pauvre! Il est néophyte dans le domaine. Moi j’ai l’expérience et je lui ai tout expliqué. T’auras beau avoir passé 8 ans avec elle mon vieux, si elle te dit qu’elle veut prendre un peu de recul pour mieux réévaluer votre relation, ça veut dire que t’es déjà largué. Surtout si elle est dans la trentaine comme ta femme. L’urgence mon vieux, l’urgence de plaire encore avant qu’elle ne se trouve trop vieille.

C’est horrible ce que tu dis.

C’est pourtant la triste réalité.

Mais on s’aime!

Ça n’a rien à voir. L’urgence de plaire n’en a rien à foutre de l’amour. C’est se donner une dernière sensation de jeunesse. Quand elle aura atteint 40 ans, ça lui passera et elle réalisera peut-être l’erreur. Parce que franchement, le type avec qui elle te remplace, c’est pas ce que l’on pourrait appeler un Apollon. T’as déjà vu un Apollon qui bave en parlant toi? Moi pas. En attendant, mange tes petites patates et concentre-toi sur la partie. Quand ça fera trois fois qu’on t’aura largué solidement, tu comprendras mieux ce que je veux dire.

Aucun commentaire: