La boîte où je travaillais avant vient de fermer ses portes cette semaine. Une vente.
Les employés l'ont appris le jour même lors d'un meeting. À la fin de cette petite réunion d'informations, ils n'avaient plus d'emplois.
Merci beaucoup, bonsoir, c'est terminé.
Après mon congédiement, mes anciens employeurs déversaient leur fiel sur mon dos, m'accusant de tous les noms d'oiseaux pour avoir été de l'équipe qui avait monté un syndicat. J'étais un traître, une merde finie, un galeux, un horrible et le syndicat était une chose immonde dont il fallait se débarrasser. J'ai lu ces mémos qu'ils donnaient aux employés. De la grande poésie.
Le monstre, c'était moi. L'enfer, c'était le syndicat. Eux, ils étaient des anges et le paradis se trouvait dans cette boîte.
J'étais cadre et un cadre n'a pas le droit de prendre la part des employés. La Commission des Relations de Travail leur a d'ailleurs donné raison sur ce point. Manque de loyauté envers l'entreprise qu'il fut écrit dans le jugement. Vouloir protéger son poste via un syndicat est perçu comme un manque de loyauté envers l'entreprise dans notre beau code du travail au Québec. C'est interdit. Nous vivons dans un pays démocratique mais semblerait-il que cette démocratie, quand elle attaque les fondements même de l'entreprise privée, c'est à dire leur privilège féodal, leur droit de vie ou de mort sur le salarié, n'est pas compatible.
Mon titre de cadre primait donc sur mon titre d'employé. En d'autres mots, les cadres d'une entreprise n'ont pas le droit à la moindre protection. Ainsi, une femme cadre qui refuserait de faire une pipe à son employeur pourrait donc se faire foutre à la porte pour manque de loyauté envers l'entreprise et la CRT n'aurait rien à redire. À moins bien sûr que la femme PROUVE qu'elle fut victime de harcèlement. Bonjour la longue bataille!
C'est beau l'entreprise privée au Québec.
On ne demandait pas grand chose pourtant, juste être payé convenablement. Moi, ça allait parce que j'étais directeur de projet et que je touchais un salaire presque convenable, mais les autres, ceux qui étaient dans la centrale téléphonique, ils avaient des salaires de merde. Le plafond salariale était de 10$ de l'heure, peu importe le nombre d'années de service.
Notre boîte était tout de même syndiquée. Mais ils ont utilisé tous les moyens pour retarder le plus possible la première convention collective, sachant que le milieu des sondages en était un où le roulement de personnel est vertigineux. Ils y sont parvenus après trois longues années à faire toutes sortes de promesses et toutes sortes de bassesses aux employés. Trois ans, c'est tout de même incroyable que cet embryon de syndicat toujours impuissant parce que toujours contesté à la CRT ait pu survivre quand on connaît le milieu et quand on sait que plus de 95% des signataires du début n'étaient plus là.
Les employés qui organisèrent la mort du syndicat l'an dernier s'étaient laissés berner par les promesses de l'employeur. J'avais lancé quelques coups de téléphone pour tenter de réanimer le corps encore chaud auprès des quelques anciens qui y travaillaient encore mais c'était peine perdue. On accusait le syndicat et on voulait donner une chance à l'employeur. En gros, on m'avait dit que cette histoire de syndicat avait été une erreur et qu'elle était la source de tous les problèmes. Des jours meilleurs allaient maintenant arriver puisqu'on était parvenu à s'attendre avec les patrons sans passer par le syndicat.
Moins d'un an plus tard, et parce que le bail arrivait à terme, ces mêmes patrons viennent de fermer la boîte en transférant les contrats à une entreprise avec laquelle ils feront désormais affaire au Québec. Pourtant, il n'y avait plus de syndicat. Pourtant, tous les éléments indésirables avaient été lynchés. Pourtant, les employés avaient fait confiance aux patrons.
Les employés l'ont appris le jour même lors d'un meeting. À la fin de cette petite réunion d'informations, ils n'avaient plus d'emplois.
Merci beaucoup, bonsoir, c'est terminé.
Après mon congédiement, mes anciens employeurs déversaient leur fiel sur mon dos, m'accusant de tous les noms d'oiseaux pour avoir été de l'équipe qui avait monté un syndicat. J'étais un traître, une merde finie, un galeux, un horrible et le syndicat était une chose immonde dont il fallait se débarrasser. J'ai lu ces mémos qu'ils donnaient aux employés. De la grande poésie.
Le monstre, c'était moi. L'enfer, c'était le syndicat. Eux, ils étaient des anges et le paradis se trouvait dans cette boîte.
J'étais cadre et un cadre n'a pas le droit de prendre la part des employés. La Commission des Relations de Travail leur a d'ailleurs donné raison sur ce point. Manque de loyauté envers l'entreprise qu'il fut écrit dans le jugement. Vouloir protéger son poste via un syndicat est perçu comme un manque de loyauté envers l'entreprise dans notre beau code du travail au Québec. C'est interdit. Nous vivons dans un pays démocratique mais semblerait-il que cette démocratie, quand elle attaque les fondements même de l'entreprise privée, c'est à dire leur privilège féodal, leur droit de vie ou de mort sur le salarié, n'est pas compatible.
Mon titre de cadre primait donc sur mon titre d'employé. En d'autres mots, les cadres d'une entreprise n'ont pas le droit à la moindre protection. Ainsi, une femme cadre qui refuserait de faire une pipe à son employeur pourrait donc se faire foutre à la porte pour manque de loyauté envers l'entreprise et la CRT n'aurait rien à redire. À moins bien sûr que la femme PROUVE qu'elle fut victime de harcèlement. Bonjour la longue bataille!
C'est beau l'entreprise privée au Québec.
On ne demandait pas grand chose pourtant, juste être payé convenablement. Moi, ça allait parce que j'étais directeur de projet et que je touchais un salaire presque convenable, mais les autres, ceux qui étaient dans la centrale téléphonique, ils avaient des salaires de merde. Le plafond salariale était de 10$ de l'heure, peu importe le nombre d'années de service.
Notre boîte était tout de même syndiquée. Mais ils ont utilisé tous les moyens pour retarder le plus possible la première convention collective, sachant que le milieu des sondages en était un où le roulement de personnel est vertigineux. Ils y sont parvenus après trois longues années à faire toutes sortes de promesses et toutes sortes de bassesses aux employés. Trois ans, c'est tout de même incroyable que cet embryon de syndicat toujours impuissant parce que toujours contesté à la CRT ait pu survivre quand on connaît le milieu et quand on sait que plus de 95% des signataires du début n'étaient plus là.
Les employés qui organisèrent la mort du syndicat l'an dernier s'étaient laissés berner par les promesses de l'employeur. J'avais lancé quelques coups de téléphone pour tenter de réanimer le corps encore chaud auprès des quelques anciens qui y travaillaient encore mais c'était peine perdue. On accusait le syndicat et on voulait donner une chance à l'employeur. En gros, on m'avait dit que cette histoire de syndicat avait été une erreur et qu'elle était la source de tous les problèmes. Des jours meilleurs allaient maintenant arriver puisqu'on était parvenu à s'attendre avec les patrons sans passer par le syndicat.
Moins d'un an plus tard, et parce que le bail arrivait à terme, ces mêmes patrons viennent de fermer la boîte en transférant les contrats à une entreprise avec laquelle ils feront désormais affaire au Québec. Pourtant, il n'y avait plus de syndicat. Pourtant, tous les éléments indésirables avaient été lynchés. Pourtant, les employés avaient fait confiance aux patrons.
J'aimerais bien maintenant reparler à ces mêmes personnes. Savoir ce qu'ils pensent maintenant des promesses des patrons.
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